Une conférence de presse se tenait au Syndicat Mixte de l’Eau et de l’Assainissement de Mayotte (SMEAM) ce mardi, en présence du président Fahardine Ahamada, et du préfet Jean-François Colombet, qui n’a pas la compétence de l’eau mais qui mouille se chemise depuis plusieurs mois, « nous travaillons en confiance avec la nouvelle gouvernance, et je souligne que le SMEAM est particulièrement mobilisé ». Autre temps, autre discours, le duo avec droit de regard de l’Etat semble fonctionner.
Les écarts entre les courbes d’étiage des deux retenues collinaires avec l’année dernière donnés par le DGS Ibrahim Aboubacar, sont parlants, 32% de remplissage contre 50% à la même époque en 2019 (voir courbe ci-dessous), face à une demande qui s’est accrue de 3.000 m3 par jour. (Pour mémoire, le niveau bas de 2017 correspond à l’année de pénurie, avant qu’un cours d’eau ne soit dévié pour alimenter la retenue).
Un nombre conséquent d’abonnés supplémentaires, et le confinement sur le territoire de la totalité de la population explique ce décalage, aggravé par l’absence d’investissements de la part du syndicat des Eaux, les travaux sur Combani, et les problèmes de l’usine de dessalement.
La consommation de 35.000m3 d’eau par jour, ne peut être couverte par la production. Celle-ci se compose pour 22.000 m3 du captage en rivière, des forages, et de l’usine de dessalement, et de 13.000 m3 dans des retenues collinaires qui voient leur assèchement venir à grands pas. Il était même prévu pour mi-décembre si aucune restriction n’avait été décidée par le préfet.
En espérant un Noël plus arrosé qu’au balcon
Les variables d’ajustement ne sont pas légion. En matière de production, il faut forer d’avantage, « 3 forages supplémentaires devraient entrer en production d’ici fin novembre, pour une capacité de 1.400 m3 par jour », indique le DGS, et l’usine de dessalement a reçu la visite d’une expertise extérieure pour accroitre sa production de 200m3 par jour, en attendant les gros travaux de prise d’eau de mer.
En matière de consommation, les fuites sont endiguées peu à peu. « Habituellement, nous en traitons 800 par an, là nous en sommes à 30 à 40 par semaine, détectées sur les zones privées d’eau par des écoutes acoustiques », indique Vinci Constructions.
Mais la consommation reste encore trop plafonnée, pour repousser l’échéance d’assèchement des oasis que sont les retenues collinaires, un tour de vis supplémentaire est nécessaire, explique Jean-François Colombet : « Dès ce mercredi, nous passons d’une coupure d’eau plutôt nocturne à un arrêt de 24h par zone, une fois par semaine ». Une décision qui devrait prolonger leur durée de vie jusqu’au 10 janvier. Avec un point d’étape le 2 novembre : « Si à cette date, la situation ne s’améliorent pas, nous durciront encore pour tenir jusqu’à mi-février. » D’ici là, les prévisions de météo France devraient s’affiner.
Des kits hydro-économes seront distribués à chaque foyer, « 40.000 qui ont été financés par l’ARS », et aux administrations, pris en charge par la préfecture. Chaque sachet, « confectionnés par des jeunes en insertion », contient 4 adaptateurs, notamment pour l’évier, la douche et le lavabo. “Ils doivent permettre de diminuer la consommation de 10 à 15%, et donc la facture d’autant”, commente Ibrahim Aboubacar.
Il mettait cependant en garde la population contre le risque de surstockage : « On peut anticiper sur la coupure en mettant de l’eau de côté, mais strictement nécessaire à ses besoins. Sinon, elle est jetée dans la nature, et l’effort est nul. On prend alors le risque d’avoir des restrictions plus graves à l’avenir. »
Anne Perzo-Lafond
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