Un article intitulé « Sun, sand and synthetics : the sharp rise of synthetic cannabinoids in the Indian Ocean islands », du dernier Risk Bulletin du Civil Society Observatory of Illicit Economies in Eastern and Southern Africa, évoque l’explosion de l’usage des cannabinoïde dans les îles de l’océan Indien. Spécifiquement à l’île Maurice, à Mayotte et aux Comores. (Lire Risk Bulletin #13 – Global Initiative against Transnational Organized Crime – October-November 2020)
Ces cannabinoïde de synthèse, dont fait partie la drogue « chimique », sont faciles à se procurer sur les plateformes en ligne, indique l’article qui pointe la Chine comme pays exportateur. Une économie s’est donc créée avec des bénéfices importants pour les organisateurs, mais sur la santé des jeunes puisque les hospitalisations de victimes de cette drogue sont de plus en plus nombreuses sur les 3 îles.
Notamment aux Comores où, selon l’auteur de l’article, la drogue serait « importée depuis Mayotte par la mer ». Une information que nous n’avions pas jusqu’à présent et qui semble étonner le nouveau directeur des Douanes, Christian Lacoume : « Je ne dis pas que c’est impossible, mais nous n’avons pas fait de constatation de ce type. Nous contrôlons systématiquement les navires à passagers de la compagnie qui effectue la liaison Mayotte-Comores, à l’aller et au départ. Les seules saisies que nous avons effectuées au départ de Mayotte sont des capitaux, des sommes d’argent importantes, supérieures à 10.000 euros, pas déclarées alors qu’elles devraient l’être. Mais nous n’avons pas constaté d’autres transports par ce véhicule maritime. » Il n’est plus possible pour ses agents d’opérer des contrôle en mer, puisque depuis décembre, la Douane n’a plus de vedette garde-côte.
Un trafic aérien
D’autre part, les interventions menées au port de Longoni sur les navires y escalant ne semblent pas accréditer ces dires selon lui. Des investigations qui mériteraient malgré tout d’être menées régulièrement.
En matière de kwassas au départ de Mayotte, leur interception concernerait davantage la PAF, toutefois logiquement davantage positionnée sur les arrivées. Mais de ce côté là aussi, Jean-Marie Cavier, Directeur Territorial de la Police nationale qui coiffe la PAF à Mayotte, est formel : « Nous n’avons jamais trouvé de drogue de synthèse dans les kwassas, que ce soit à l’arrivée, ou au départ. Par contre, des saisies ont été déjà été opérées par voie aérienne, notamment dans des colis postaux. »
Même chose pour le directeur des Douanes qui est davantage concentré sur les entrants, « les cannabinoïde de synthèse sont bien élaborés en Asie du Sud-Est, spécifiquement en Chine, lieu de production. » Ils arrivent essentiellement par le vecteur aérien indique-t-il également, « ils sont ensuite mélangés à différents produits, au spectre large puisque certains avaient utilisé de la mort aux rats. »
Une explication à la violence
Difficile de savoir d’où le Risk bulletin sur les trafics illicites tire son information d’une importation de chimique des Comores depuis Mayotte. Il pourrait s’agir d’informations livrées par le gouvernement comoriens, selon une source.
Des dires démentis donc puisqu’il semble que ces substances se faufilent sur les territoires par voie aériennes. Causant des dommages parfois irréversibles, puisque le docteur Ali Mohamed Youssouf, chargé du Centre d’addictologie en 2015, évoquait « des tremblements, des troubles cardio-vasculaires pouvant aller jusqu’à l’arrêt cardiaque ».
Nous avions rapporté ses propos qui pointaient surtout un phénomène qui peut expliquer une partie des violences commises sur le territoire : « Avec le cannabis, on n’a pas de phénomène d’agressivité, au contraire, beaucoup de jeunes s’endorment. La chimique provoque l’effet inverse avec une accélération cardiaque et des comportements de nervosité ». Le nombre d’affaires instruites par le tribunal de Mamoudzou pour des faits d’hyper-violence liée à la chimique était déjà impressionnant il y a 5 ans. La consommation engendrant de fort besoins financiers pour assurer la dépendances à la drogue, nourrit les actes de délinquance.
Le chien de la Douane n’a donc pas fini d’arpenter les voyageurs fraichement sortis de l’avion en attente de leurs valises, pas question de lever le pied… ou la patte.
Anne Perzo-Lafond
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