Créé suite à la départementalisation, le conseil cadial rassemble les cadis, autorités religieuses et anciennement juges coutumiers, au sein d’un service de médiation du conseil départemental. Les cadis ne rendent donc plus la justice, mais ils restent une présente respectée, sur laquelle le Département et les communes comptent s’appuyer.
La convention signée ce vendredi à la mairie de Mamoudzou a vocation à être répétée auprès de chaque commune de l’île explique Issa Issa Abdou, 4e vice président du conseil départemental. Le but est de “mettre à disposition les Cadis pour participer à la réflexion et à la mise en place des projets de territoires dans la commune partenaire” mais aussi “mettre en place un Conseil Educatif et Ethique Local (CEEL) composé du Grand Cadi de Mayotte, du Maire de Mamoudzou, des Cadis de Mamoudzou et des maîtres coraniques de la commune, le Président du madras, des Enseignants et délégué des Parents, et des Notables de chaque ville de la commune de Mamoudzou pour la médiation sociale, la prévention de la délinquance et la lutte contre les incivilités”. Parmi les objectifs : “transmission des valeurs éducatives et à la promotion de l’identité culturelle de Mayotte”, “accompagner et superviser le développement des structures éducatives en faveur de la Jeunesse” , “sensibiliser les madras et les pa la shio de la commune de Mamoudzou à l’éducation à l’environnement, la propreté et la santé” et plus globalement “impulser et participer aux projets de prévention de la délinquance dans la commune partenaire”.
L’objectif premier n’est assurément pas de se substituer aux dispositifs existants, mais pour la commune de Mamoudzou et le Département d’ajouter une corde à leurs arcs en matière de prévention de la délinquance.
Pour Issa Issa Abdou, il s’agit aussi d’officialiser et légitimer l’action des cadis dans les communes afin de donner du poids à leur rôle de médiateurs. La convention prévoit ainsi de les laisser régler certains “conflits de voisinage”.
Pour le maire de Mamoudzou Ambdilwahédou Soumaïla, ce rôle de médiateur “essentiel” est un outil en faveur du “vivre-ensemble” et de la “cohésion sociale”. Il y voit un espoir contre la délinquance juvénile.
Le premier “Grand Mariage” de l’année ?
Pour le représentant du Grand Cadi, c’est un “grand mariage pour la paix et la tranquillité entre les cadis et la Ville de Mamoudzou”. “Sans la paix et la tranquillité sur cette île, il n’y aura pas de développement. Car n’importe quel pays, n’importe quel village qui manque de stabilité peut avoir besoin de faire appel au divin”. “Dieu nous a enveloppé d’habits de peur, personne n’est en sécurité dans sa maison, mais je suis convaincu que grâce à cette coopération on va y arriver” a-t-il poursuivi dans un discours parsemé de références coraniques. “Tout se qui se passe dans notre pays est le fruit de notre politique. Tout ce que nous vivons est le fruit de notre politique. Un religieux qui ne s’intéresse pas à la politique, c’est une erreur, et le contraire aussi est une erreur aussi. Nous savons tous l’influence des hommes religieux dans une communauté”.
Reste à voir si les jeunes qui échappent à l’autorité de leurs parents, de l’Etat, de l’école, seront sensibles à l’influence des hommes religieux. Toujours est-il que dans la salle des mariages de la mairie de Mamoudzou, cadis, oulemas, représentants de la Ville et du Département étaient unanimes pour y croire. Mais l’Etat, lui, n’était pas représenté. Qu’à cela ne tienne, l’attribution de la légion d’honneur au Grand cadi est bien vécue comme une reconnaissance de tout le corps cadial.
Le conseil départemental compte bien étendre ce type de partenariat aux 17 communes de l’île.
Y.D.
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