Trahisons, prise de pouvoir et manoeuvres en tout genre, le scénario a tout d’une fiction politique. Mais la délibération votée par le conseil de municipal de Pamandzi ce mercredi est, elle, bien réelle. Les élus y demandent « le retrait immédiat » de leur commune du sein de la Communauté des communes de Petite-Terre. Avec une justification qui traduit bien l’état d’esprit de la majorité, évoquant « une entente et une confiance entre les deux communes qui n’existent plus depuis les élections municipales de 2020 en raison de la volonté délibérée d’écarter la majorité municipale de Pamandzi de la gouvernance de la Communauté des communes de Petite-Terre ». Ambiance.
Pour bien comprendre ce qu’il se joue, un observateur avisé de la politique locale rappelle d’abord que lors de la création de l’interco en 2014, les deux communes « s’étaient mises d’accord pour une présidence tournante tous les trois ans. » Si le pacte ne crée pas d’obligation juridique, force est de constater qu’il avait jusqu’à présent été respecté. En 2017, « Pamandzi avait laissé sa place à Labattoir six mois avant l’échéance avec la démission du maire de Pamandzi de l’époque », se souvient ainsi notre observateur.
Une CCPT verrouillée
Seulement voilà, trois ans plus tard, en 2020 donc, c’est le tour de force. Avec l’aide de sa propre majorité de Dzaoudzi-Labattoir et le soutien de l’opposition de Pamandzi, Saïd Omar Oili est réélu à la tête de la CCPT. Et rien ne semble plus pouvoir ébranler le roc de la politique petite-terrienne, régulièrement désigné au premier tour. Pire, à en croire la majorité de Pamandzi, un véritable verrouillage s’installe à ses dépens au sein de l’interco. « Depuis les dernières élections, la partie labattoirienne refuse catégoriquement de travailler avec la partie pamandzienne d’après certains élus de Pamandzi et le fait que le bureau de l’interco, côté Pamandzi, n’est composé que d’élus de l’opposition n’a pas
arrangé les choses », poursuit notre analyste, selon qui, « vu sous cet angle, le divorce était inévitable ». « Mais je trouve ça extrêmement dommage car les enjeux du territoire sont quasiment les mêmes », regrette-t-il.
Reste dorénavant à savoir comment acter ce divorce. Car si le retrait de Pamandzi est accepté par l’autorité préfectorale après avis de la commission départementale de la coopération intercommunale (en vertu des dispositions de l’article L5216-11 du code général des collectivités territoriales), les points d’interrogations se font légion. D’abord, comme pour tout divorce, se posera la question de la répartition des biens, des finances… Celle des enfants ? Non, mais quid des agents ? Ensuite, puisque seules deux communes composent l’interco, le retrait de l’une d’entre elle suppose la dissolution de fait de la structure. Sauf à ce qu’une autre commune vienne rejoindre Dzaoudzi-Labattoir au sein de la CCPT. Quoiqu’il en soit, toute commune se doit d’adhérer à un établissement public de coopération intercommunal. Alors, pour trouver nouveau partenaire, les villes de Petite-Terre vont devoir prendre la barge.
Mariages sur la barge
Et ça, Pamandzi l’a bien compris. Le sixième considérant de sa délibération évoque ainsi « l’union entre la commune de Pamandzi, la commune de Mamoudzou ou la commune de Dembéni ». Lesquelles sont également en instance de divorce. Si l’on peut s’interroger sur la pertinence d’un regroupement avec l’une ou l’autre des communes, Pamandzi assure pourtant qu’elle permettrait « la création d’un espace de solidarité en vue de l’élaboration d’un projet commun de développement ». Malgré le bras de mer qui les sépare, en vertu de la jurisprudence administrative selon laquelle « l’exigence de continuité [requise pour créer une intercommunalité] est satisfaite si les communes sont seulement séparées par un élément naturel ».
Selon nos informations, les tractations seraient déjà en cours, sous l’oeil vigilant de la Case Rocher. C’est d’ailleurs de là que l’on aurait proposé de marier Pamandzi à Dembéni et Dzaoudzi-Labattoir à Mamoudzou. Du côté des élus de Pamandzi, préférence irait cependant à une union avec la ville cheffe-lieu… D’intense négociations sont promises, d’autant que Dembéni ne semble pas prête à renoncer à la Cadema qui doit notamment porter le projet Caribus.
Voilà donc pour l’équation mais une question demeure : est-ce bien l’intérêt de la population qui est en jeu ?
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