Une habitante de la pointe de Koungou qui rentrait chez elle en scooter mercredi 3 février, a été menacée à l’intérieur même du lotissement surveillé pourtant par des gardiens, par trois jeunes d’une quinzaine d’années, qui l’ont menacé avec un bâton pour lui dérober son sac. La parentalité est là encore interrogée, quand le jeune revient chez lui avec un téléphone à prés de 1.000 euros. Le contrôle par la police ou la gendarmerie de la détention de tels appareils ne serait d’ailleurs pas superflu, puisque des effectifs supplémentaires sont arrivés nous dit-on. Cela permettrait de démanteler les filières et de mener de véritables enquêtes, surtout quand le numéro de téléphone du voleur ou du receleur est affiché sur l’écran…
Un habitant du village qui souhaite garder l’anonymat, témoigne : « C’est de pire en pire. J’habite avec ma femme dans le quartier ETPC, à droite à la carrière. C’est impossible de dormir, toutes les nuits, des jeunes font du raffut après avoir acheté du vin en vente libre dans un douka illégal implanté au sein du village. On voit même de très jeunes enfants s’enivrer ! » Il ne veut pas déposer plainte, “après, les jeunes savent très bien qui a contacté les gendarmes, et comme la justice est inefficace, ils se vengent”.
Des jeunes ont occupé la route plusieurs nuits durant en décembre, nécessitant l’intervention des forces de l’ordre avec tirs de grenades lacrymogènes.
Jusqu’à présent, la commune n’a pas été très active sur la prévention de la délinquance, mais le recrutement de Maylis Pouny-Fagalde, Chargée de mission Ville, est encourageant, puisque c’est elle qui supervise désormais les actions dans ce secteur. A la suite de l’appel à projet du Fonds Interministériel de Prévention de la Délinquance et de la Radicalisation (FIPDR), et sollicité par la préfecture, une réunion s’est tenue en présence du maire Assani Saindou Bamcolo le 4 février dernier.
Les réparations concrètes des délits encore trop rares
Au regard de l’urgence du territoire dans ce domaine, et du volume d’une enveloppe qui a doublé pour se monter à 600.000 euros, avec l’espoir d’encore la gonfler, les maires sont priés de répondre présents à ce FIPDR. Et il faut aller vite, la clôture des dossiers est fixée au 28 février 2021.
La 2ème commune la plus peuplée de l’île étant le théâtre d’actes de délinquance réguliers, des priorités ont été fixées, mais qui peuvent être transposées ailleurs sur le territoire. « A la demande du maire, 3 postes de coordonnateurs du dispositif Conseil Local de Sécurité et de Prévention de la Délinquance (CLSPD) seront demandés pour la commune, pour les répartir sur les 3 zones : Majicavo Koropa et Lamir, Koungou-Trévani, et Kangani-Longoni, rapporte Maylis Pouny-Fagalde, ils iront à l’intérieur des quartiers et travailleront sur la médiations. »
Un précédent coordonnateur avait été nommé, mais n’avait pas fait long feu, bien que payé, peu d’actions sont à mettre à son actif. Des postes stratégiques qui demandent un personnel formé, et non de complaisance.
La Chargée de mission rapporte de nouvelles actions qui verront la prise en charge des jeunes fauteurs de troubles, avec « des dispositifs de sanctions diversifiés et plus facilement applicables ». Parce que ce travail de réparation, c’est aussi de la prévention. Le dispositif des Travaux d’Intérêt Général (TIG), qui permet de mettre le jeune à disposition de la collectivité, est appliqué dans la commune, mais n’est pas facilement extensible, comme nous le rapporte Mounirou Ahmed Boinahery, DGA Développement humain à la mairie : « Nous avons actuellement 5 TIG en mairie, mais je manque d’encadrants qu’il faut former ». Il s’agit de demander au jeune une vraie réparation, et non pas de se planter devant la machine à café pour en assurer la distribution ! Il étudie la possibilité d’inclure cette formation dans l’appel à projets du FIPDR.
Météo particulière à Koungou où il pleut des cailloux
Pour Maylis Pouny-Fagalde, il faut donc diversifier ce concept qui permet au jeune de réparer directement le délit commis : « Le capitaine Chamassi qui représentait la préfecture a proposé qu’ils effectuent un travail sans rémunération, comme un TIG, mais porté par une association, sur décision du maire et avec l’accord du procureur. » La jeune femme se démène donc pour trouver une association ad-hoc avant la clôture de l’appel à projets ». Balayage et nettoyage de la voirie, de la plage, aide aux familles des victimes… des opérations qui pourraient être dupliquées à l’infini.
Autre proposition du capitaine de police et chargé de mission du préfet, mettre en place les Conseil pour les Droits et devoirs des familles (CDDF). Il nous avait expliqué que les familles en difficulté étaient identifiées et accompagnées dans l’éducation des enfants. « Nécessairement porté par la mairie, ils pourraient venir en complément de la Maison des Familles initiée par le Collectif des parents d’élèves de la commune de Koungou, financée à hauteur de 80.000 euros par la DJSCS l’année dernière », note Maylis Pouny-Fagalde.
Beaucoup de choses sont également mises en place chacune dans son coin comme nous l’avions rapporté, de la scolarisation d’une centaine d’enfants à domicile, ou de fabrication de meubles, « ce n’est pas une question d’argent, ce qui manque, c’est une coordination efficace de tous ces projets en mairie », rapporte un acteur de la prévention. La Chargée de mission Ville s’y emploie justement.
Des contrats aidés devraient être financés, « et d’autres moyens seront priorisés, comme la vidéo protection, la sécurisation et les équipements de la police municipale en gilets ou radios. Un accompagnement des associations de médiation et prévention de la commune sera assuré par les services de la mairie pour présenter leurs demandes de subventions et pérenniser leurs actions.
« Mais le maire a bien insisté sur le fait que si le territoire manque de possibilités d’accueil et de prises en charge des jeunes en difficulté, la répression reste primordiale. »
La situation explosive d’il y a un mois s’est un peu apaisée, avant et depuis le confinement, selon le lieutenant-colonel de gendarmerie Bisquert que nous avons contacté, « mais avec de temps à autre, des caillassages au niveau de La Poste, Koungou reste un point sensible ».
Anne Perzo-Lafond
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