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vendredi 22 novembre 2024
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Au Sidevam, la nouvelle équipe promet de mettre les vieilles pratiques à la benne

L’heure de la relève ? Après la publication d’un rapport accablant de la Chambre régionale des comptes sur la gestion du Sidevam, le syndicat intercommunal dédié à la gestion des déchets, la nouvelle équipe, par la voix de son directeur général des services Chanoor Cassam, veut montrer qu’un changement est à l’oeuvre. Entretien.

Le Journal de Mayotte : Quel enseignement tirez-vous du rapport de la Chambre régionale des comptes portant sur le Sidevam ?

Chanoor Cassam : Il est communément admis aujourd’hui que le Sidevam a du mal à remplir à bien ses missions. Il y a des carences, sur lesquelles nous travaillons, à l’instar de la collecte ou de la distribution de bacs. Cependant je pense qu’il faut également être au clair sur les compétences du Sidevam et celles de ses partenaires. Car lorsque l’on évoque les dépôts sauvages, ce n’est pas de son ressort. Même chose pour les déchets électroniques et électroménagers. Mais au vu des circonstances, et parce que tout le monde ne joue pas le jeu, on sollicite énormément le Sidevam sur ces questions.

Il faut donc repenser le dimensionnement de l’outil qu’est ce syndicat, tant en fonction des enjeux du territoire que des compétences qui lui sont dévolues. Je pense que c’est la première leçon à tirer de ce rapport.

Le J.D.M : La CRC a également lourdement insisté sur les dérives qui existaient en matière de gouvernance. Que mettez-vous en place pour garantir une gestion exempte de tout soupçon ?

C. C. : Effectivement, des gros problèmes d’ingérence notamment ont été soulevés. Nous n’avions pas forcément idée de cela à l’extérieur de la structure mais lorsque je suis arrivé, je n’ai pu qu’être frappé par cela. Le changement d’équipe dans ce cadre a mis en évidence qu’il y avait beaucoup de tension. D’ailleurs, une semaine après notre prise de fonction, les agents se sont mis en grève. Notre rôle, dans un premier temps, avec le nouveau président et les élus a été de tenter de calmer le jeu, d’assurer une médiation. C’est une ambiance qui pèse encore avec de forts enjeux. Nous essayons de briser des mécaniques anciennes pour proposer un cadre nouveau sous l’impulsion de la nouvelle équipe. Nous avons aujourd’hui une administration qui se veut profondément respectueuse des rôles et des compétences de chacun. Les choses se mettent en place, même s’il y a une forte inertie et que le contexte Covid n’aide pas.

J’ai proposé une nouvelle organisation, qui a été acceptée par le bureau, avec notamment une direction de la collecte et une direction dévolue au contrôle de gestion. C’est une grande nouveauté et qui vient directement répondre au rapport de la CRC en tant qu’il crée un garde fou face aux dérives. Nous aurons donc désormais une direction dédiée au contrôle juridique, financier et de la qualité des prestations. C’est un organe de contrôle qui aura les yeux partout, sur tous les volets de notre action. Pour faire simple, sa feuille de route sera le rapport de la chambre régionale des comptes et les recommandations qu’elle a émises. Nous ferons un point d’étape tous les mois là dessus. Aujourd’hui, nous en sommes à presque six sur vingt. L’objectif est de régler tout cela en deux ans.

Cette réorganisation doit se finaliser courant mai avec l’arrivée d’une directrice des ressources humaines, d’un directeur de collecte et de la directrice de contrôle de gestion. Nous aurons donc posé à cette date le cadre général de notre nouvelle administration qui doit nous permettre de nous inscrire dans un cercle vertueux de fonctionnement.

Le J.D.M : Concrètement, quelles actions allez-vous mettre en place pour rendre le territoire plus propre ?

C. C. : Nous allons par exemple lancer une campagne massive de distribution de bacs. Nous avons obtenu des financements européens pour ce faire et le soutien de plusieurs partenaires. C’est en cours d’instruction et l’on espère avoir 5000 bacs par semestre arrivés à Mayotte pendant trois ans. Cela doit permettre de mettre les foyers à niveau tout en facilitant le travail de collecte.

De manière générale, viser de satisfaire à toutes les recommandations de la CRC implique aussi des nouveautés sur le terrain. Dans ce cadre, nous planifions chaque année un

5000 bacs par semestre doivent être livrés à partir de la fin 2021.

nouvel élément d’ampleur. Par exemple, pour cette année nous envisageons de mettre en place des déchetteries mobiles, à l’image de ce qui se fait en Petite-Terre. Ça ne va pas changer la vie du territoire du jour au lendemain mais c’est un début de réponse qui permet de soulager la question des déchets les plus encombrants. L’année prochaine, nous allons mettre en place un service de collecte régulier des encombrants à l’aide de nouveaux véhicules. Puis l’année d’après, en 2023 donc, nous aurons l’ouverture de la première déchetterie, au nord de Mamoudzou. Sept autres doivent ensuite suivre, l’objectif est de les voir toutes en activité d’ici la fin de la mandature.

Le J.D.M : S’agissant de la collecte des déchets ménagers, quelles actions sont prévues pour l’améliorer ?

C. C. : Il y a justement une étude en cours sur l’optimisation de la collecte. Elle suggère de revoir les circuits en changeant le parcours des camions et le nombre de passage par semaine. L’étude se fait en fonction de l’analyse quartier par quartier du niveau de remplissage des bacs. On se rend compte qu’il y a un rééquilibrage à faire puisque l’on passe parfois trop souvent à certains endroits, pas assez à d’autres. On se rend également compte qu’en collectant mieux, on peut utiliser moins de camions. Il faudrait cependant attendre l’arrivée de la première livraison de 5000 bacs -d’ici la fin de l’année- pour que cela se mette en place.

Le J.D.M : Le calendrier semble riche en actions d’ici la fin de la mandature, pour autant, comme l’a pointé le rapport, les finances ne sont pas au beau fixe. Comment faire pour concilier redressement financier et amélioration des services ?

C. C. : C’est un gros sujet effectivement. Depuis 2014, même si le syndicat avait perçu près de cinq millions d’euros à sa naissance, les budgets sont structurellement déficitaires. Jusqu’à présent, le Sidevam consommait plus qu’il n’avait de ressource et a donc grignoté tout cet excédent de départ. À notre arrivée en 2020, nous n’avions plus de marge de manœuvre. Tout l’enjeu est donc de rompre avec ce mode de fonctionnement, réinterroger toutes les dépenses, optimiser les services. C’est déjà en route et pour cette année, nous n’aurons pour la première fois pas de déficit. Dans nos prochains budgets, une nouvelle méthode sera à l’œuvre. Par exemple, la contribution des intercos, qui représente près de 70% de nos recettes sera calculée en fonction du tonnage de déchets que produisent leur territoire. Une méthode de calcul à la fois plus juste et plus transparente que la dernière, qui se basait sur la population recensée par l’Insee.

Le J.D.M : De nombreux surcoûts sont aussi pointés dans le rapport, notamment à travers un recours excessif et pas toujours transparent aux sous-traitants…

C. C. : Tout à fait. Cela représente des sommes largement excessives. Comme pour le reste, l’idée est de nous réorganiser en interne pour que, lorsque nous avons une panne sur un véhicule, l’alternative ne soit pas de faire appel à la location, mais de trouver une solution en interne. Il faudra savoir être plus flexible et utiliser un autre type de véhicule par exemple. De manière générale il faut voir autrement, nous avons les moyens pour répondre aux différents incidents. Cela commence à porter ces fruits puisque en 2020 nous avons divisé par deux ces dépenses de location.

Le J.D.M : Du point de vue des agents, ce sont des années de fonctionnement qui semblent être remises en cause. La Chambre pointait un manque de contrôle du temps de travail et des sureffectifs à certains postes, qu’en dites-vous ?

C. C : Il est clair qu’il y a des sujets sur lesquels il va falloir changer. Je pense par exemple aux congés irréguliers. De manière générale il s’agit de se mettre en conformité avec les horaires et les congés. Nous mettons également en place un système automatisé de pointage avec une badgeuse dans les différents sites.

Nous avons près de 300 agents en service aujourd’hui. Une partie d’entre eux se dirige vers la retraite et nous ne renouvellerons pas forcément tous leurs postes. Et si c’est le cas, ce sera essentiellement pour pallier aux déficits de cadre auquel nous faisons face pour manager les équipes, par exemple.

Si nous nous organisons bien, nous pourrons mieux faire avec moins de camions, et donc avec moins d’équipe. L’idée serait donc de travailler en partenariat avec les intercos et de leur mettre à disposition nos agents pour la sensibilisation, l’entretien des zones naturelles etc.

Le J.D.M : Depuis 2014, le Sidevam n’a pas rempli les promesses qui étaient à l’origine de sa création. Que diriez-vous sept ans plus tard aux intercos qui le financent et qui, face à ces manquements, seraient tentées de s’organiser en interne ?

C. C : Je pense qu’il faut encore croire en ce schéma de fusion des syndicats de 2010 et qui a conduit à la création du Sidevam. C’est un bon modèle d’économie d’échelle et la CRC l’a rappelé. Nous avons encore envie d’y croire de notre côté, que ce soit en relevant l’intégrité de la structure ou en améliorant nos services. Dans le même temps il faut aussi entretenir le dialogue, et plus l’implication des intercos sera grande sur ces sujets, plus nous avancerons vite tous ensemble.

Propos recueillis par Grégoire Mérot

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