La programmation pluriannuelle des constructions et rénovations de salles de classe dans le 1er degré vient de tomber. L’Etat tient ses engagements, elle porte sur 52,78 millions d’euros pour 2022. Pour moitié issue de la Dotation Spéciale de Construction et d’Equipement des Etablissements scolaires (DSCEES), 24M€, et pour partie du Fonds Exceptionnel d’Investissement (FEI), 20M€. Les 8,6M€ restant proviennent du FCTVA des communes, mais qui est ensuite remboursé.
Face au besoin crucial du département en scolarisation, les constructions scolaires sont un poste important du budget d’investissement des mairies, de 18% à 60% avait rapporté l’observatoire des communes en 2019. Avec une proportion plus importante naturellement dans les plus peuplées.
Il y a peu de chance que le déficit estimé par le recteur Gilles Halbout en 2020 de 800 salles de classe, ait grandement évolué à la baisse, la crise sanitaire ayant ralenti les chantiers sur ces deux dernières années. Et, phénomène aggravant, la démographie est en hausse puisque la barre des 10.000 naissances est dépassée sur 2021, autant d’enfants qui feront leur rentrée scolaire dans 3 ans.
Sur 800 salles à construire, 500 environ sont nécessaires à l’arrêt des rotations, et 300 à l’inscription des plus de 3 ans. En rapportant le nombre de classe manquante au nombre de commune, l’objectif était de 50 nouvelles salles par an, pour envisager de combler ce déficit.
La carte SETEC-IDEPHI pour booster les constructions
Les communes sont différemment dotées, en fonction de deux critères, toutes n’ont pas les mêmes besoins, et certaines ayant été davantage dotées l’année dernière. Les plus demandeuses en infrastructures scolaires du premier degré sont naturellement Mamoudzou, dotée de 11 millions d’euros, Koungou, 3,4 M€ (complément de 2021) et Dembéni, 4M€, communes à forte densité de population.
Les enjeux devenant gigantesques, il a fallu passer à un stade supérieur en matière d’assistance en maitrise d’ouvrage. Car sur les 50 millions d’euros programmés annuellement et financés par l’Etat, tout n’est pas consommé, le taux de réalisation de salles de classe sur la période 2014-2018, était de 23% à Mayotte, avait même indiqué la secrétaire d’Etat à l’éducation prioritaire.
Le président des maires de Mayotte, Madi Madi Souf, avait résumé les difficultés rencontrées : « Nous avions du mal à construire des écoles à Pamandzi, j’ai donc proposé qu’on recrute un ingénieur, mais ça coûte cher, toutes les communes ne peuvent pas se le permettre ! » C’est pour répondre à cette problématique qu’une nouvelle structure est née d’une convention signée en octobre 2021, entre l’AFD, la préfecture, l’AMM et le rectorat, impulsée par ce dernier.
Le marché a été notifié, et c’est le groupement SETEC IDEPHI (ex cabinet Deltah) qui a été retenu. Il va conduire les opérations aux côtés de la DEAL (Direction de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement), dans les communes prioritaires, ayant besoin d’assistance.
500 salles de classe neuves d’ici 2028
L’Etat ayant engagé 50 millions d’euros pas an pour les établissements scolaires du premier degré depuis 2019, nous avons fait le point avec Christophe Trollé, directeur adjoint de la DEAL Mayotte, sur ce qui est réellement mis en œuvre : « Aujourd’hui, 155 opérations actives sont engagées, que ce soit en constructions neuves ou en rénovation de salles de classe, ou en mise en place de réfectoires. Si le rythme est maintenu, d’ici 2028, nous pourrons compter sur une livraison de 500 nouvelles salles de classe et 600 rénovées. Sans compter les réfectoires. Et la programmation est constamment réévaluée. »
Les dernières statistiques des naissances ne sont pas là pour faire baisser la pression, « la situation devient critique, des communes sont à 100% de rotation. » Sur la programmation 2022, ce sont une trentaine de salles de classes qui doivent être construites à Koungou, en complément de celles programmées en 2021, plus d’une vingtaine à Dembéni et une cinquantaine sur tous les villages de Mamoudzou, sans compter les rénovations dans ces trois communes en tension. Dans d’autres communes, le rythme n’est pas assez soutenu, « ce sont des opérations très importantes, on parle maintenant de T32 (écoles de 32 classes, ndlr), il y a donc un décalage entre les études, la programmation, et les réalisations. Il faut voir que de telles opérations sont menées tous les 30 ans sur le territoire national. Ici, les maires doivent les mettre en place sur une mandature ! », nuance Christophe Trollé.
En attendant, le rectorat jongle avec les classes itinérantes et les moyens du bord, « pour laisser le moins possibles d’enfants hors des écoles », dixit le recteur dont on connaît la détermination sur ce sujet.
A Mayotte, les maires gardent un œil sur un indicateur, le chiffre des naissances, dont la baisse doit devenir le premier objectif de santé du territoire, que ce soit pour les infrastructures, ou pour la pression que fait peser cette jeunesse. On attend beaucoup de l’ARS sur ce sujet.
Anne Perzo-Lafond
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