Les épais murs en béton étouffent de moins en moins les mugissements des machines à l’approche de l’imposant bâtiment Longoni 1. Ses cinq massives portes renferment chacune un moteur diesel, tels ceux que l’on trouve dans les voitures, à ceci près que les proportions sont titanesques. Dans son prolongement, s’élève Longoni 2 dont les entrailles contiennent trois loges abritant chacune son moteur ; les plus récents et les plus puissants du site. « Les huit moteurs ne fonctionnent pas tout le temps », éclaire Hadidja Ali Toybou, cheffe de centrale à Longoni. « Il y en a quatre souvent qui tournent et les autres sont en appui, par exemple, en cas de pic de consommation d’électricité », précise-t-elle.
De la mécanique de précision pour assurer la maintenance des moteurs
Cette disposition en loge individuelle permet« de couper le bruit entre les moteurs et de limiter les vibrations quand un mécanicien est en maintenance », explique la cheffe de centrale. Ces opérations d’entretien préventif sont régulières sur les moteurs, « toutes les 1000 heures de fonctionnement », informe Ibrahim Baco, chef de pôle adjoint au pôle production.
Ces contrôles permettent de prémunir l’usure de la mécanique et d’allonger leur espérance de fonctionnement. Une nécessité dans la mesure où « toute nouvelle centrale qui n’est pas en lien avec l’énergie renouvelable ne peut se construire », poursuit-il. En somme, en l’état, c’est-à-dire avec une alimentation au gasoil, si un des moteurs venait à expirer, il ne pourrait tout simplement pas être remplacé au regard des réglementations en vigueur. « Ce sera différent quand nous basculerons sur le bioliquide », renseigne Ibrahim Baco. Quand le basculement de carburant est-il prévu ? « Nous attendons la signature de la Programmation pluriannuelle de l’énergie », informe le chef de pôle adjoint au pôle production, tout en précisant « pour l’échéancier, d’ici 2 à 3 ans pour le site des Badamier et un peu plus long pour Longoni compte tenu de certains travaux à réaliser ».
Pour minimiser les risques de casse, ces opérations de contrôles sont doublées « tous les deux ans par
une maintenance constructeur, ce qui correspond à 10 000 heures de fonctionnement. Le moteur est alors entièrement désossé », détaille Hadidja Ali Toybou. Néanmoins, si une panne se déclare sur l’une des machines, le site dispose d’un service magasin stockant les pièces nécessaires pour, au besoin, réparer. Sachant que tous les moteurs ne fonctionnent pas simultanément, il y en a toujours un pour prendre le relais. « Il y a eu beaucoup d’efforts réalisés pour réduire les coupures d’électricité. A partir du moment où on décide de mettre en marche un moteur, il faut deux minutes pour qu’il commence à produire de l’électricité », renseigne le chef de pôle adjoint au pôle production.
Se prémunir contre le risque d’incendie
La disposition en loge est aussi un moyen efficace pour lutter contre le feu. « Elle circonscrit le risque de propagation d’incendie d’un moteur à un autre », indique la cheffe de centrale. Cet aménagement tient à la modernité du site, Longoni 1 datant de 2009 et Longoni 2 de 2015. A contrario, les moteurs de la centrale de Badamiers « sont en vrac dans les halls » des bâtiments Bada 1 (1985) et Bada 2 (1999).
Le feu étant de loin le risque numéro 1 sur le site, une tuyauterie d’un rouge vif cercle les façades des bâtiments abritant les moteurs et s’enfonce dans chaque alcôve pour alimenter, au besoin, des vannes déluges. « Il s’agit du système incendie. Il est entièrement automatisé », souligne Ibrahim Baco. Hadidja Ali Toybou abonde, « on a toujours un stock d’eau pour lutter contre un incendie. On peut tenir une heure s’il y a une coupure d’eau », avant d’expliquer que « chaque technicien de la centrale est formé à la lutte contre les incendies ». Ainsi, une fois par mois un exercice sur le site est réalisé afin de peaufiner les gestes et les procédures du personnel. Un professionnalisme renforcé au contact des pompiers lors de l’exercice annuel grandeur nature pour assurer une mise en condition totale.
En outre, chaque loge de moteur dispose d’un système de caméras de surveillance. Depuis la salle de contrôle, le chef de bloc dont la mission est de piloter la production d’électricité, peut observer en temps réel les machines. Il est appuyé dans sa mission par un rondier qui fait le tour des équipements. En cas de doute, il peut se rendre directement sur place. Cette complémentarité au sein des équipes assure une réactivité nécessaire pour assurer, coûte que coûte, la production d’électricité pour Mayotte.
Pierre Mouysset
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