Constructions scolaires, enseignants et étudiants étrangers sans papier, dotations, titularisation, attractivité… les thèmes habituels de revendication ont à peine trouvé leur place dans l’heure que le ministre a consacrée aux syndicats. « Nous sommes déçus de n’avoir pas eu de précisions sur les moyens mis en œuvre pour obtenir plus de titulaires, une des annonces du ministre. Quelles mesures d’attractivité compte-t-il mettre en place ? », interroge Quentin Sedes, CGT Educ’action.
L’annonce phare du Plan Mayotte porte sur les 500 millions d’euros alloués aux constructions scolaires sur 5 ans, tous degrés confondus. Ce que le secrétaire départemental du SNUipp, Rivo Rakotondravelo n’a pas manqué de soulever : « Avec 100 millions accordés au premier degré, nous sommes à 20 millions d’euros par an, c’est à dire l’enveloppe actuelle. Le ministre nous a expliqué que la ventilation allait donc être revue », mais à enveloppe constante, « nous allons devoir ponctionner sur le second degré. » Ils ont également appris que l’enveloppe comprenait la maintenance, « ça va vite chiffrer. »
Ils demandent un plan pluriannuel de construction cohérent, « et des promesses tenues. Le vice-rectorat avait annoncé un collège par an, or en 2018, aucun n’est sorti de terre », déplore Quentin Sedes. Il évoque un ministre qui a « fait un tour de piste », et a malgré tout noté « qu’il se veut volontariste. Mais nous attendons du concret, sinon, des actions seront menées. »
« Un service après-vente »
Pour Rivo, Jean-Michel Blanquer est « venu assurer le service après vente du Plan Mayotte », mais ne se dit pas déçu, « puisque je n’attendais rien ! Le ministre a reconnu qu’il y avait beaucoup de problèmes, il a appelé à travailler ensemble en se basant sur la confiance, mais la confiance, je l’avais déjà donné à Hollande », (les 500 salles de classe promises par l’ancien président sur son quinquennat n’ont jamais été livrées).
Il se réjouit de l’obligation de scolarisation des 3 ans, « il n’y aura pas de dérogation pour Mayotte », mais déplore « un manque de moyens supplémentaires dans le 1er degré. Je me réjouis malgré tout qu’un ministre de l’Education nationale se soit déplacé à Mayotte pour la rentrée, c’est une bonne chose. »
Du côté des représentants des familles et des parents d’élèves, l’humeur est meilleure, « c’est un ministre à l’écoute », se félicite-t-on. Dix points résument les doléances de la FCPE : la restauration scolaire, la surpopulation scolaire, l’attractivité du territoire, le recrutement d’enseignants qualifiés, la relation famille-école, la laïcité et le respect de la tenue vestimentaire locale, l’enseignement de deux langues vivantes dès la 6ème, les classes d’excellence pour les futures élites locales, l’insécurité aux abords et à l’intérieur des établissements scolaires et la mise en place d’une université à Mayotte.
Les familles ont leur entrée à l’école
Beaucoup de points que le ministre a évoqués en conférence de presse, mais Assani Zalifa a rajouté l’idée d’une coopération internationale sur l’éducation, comme cela se fait pour la santé, « notamment avec les Comores, pour que les enfants des îles voisines soient scolarisés là où ils habitent ». Elle trouve en appui Ali Nizary, président de l’Union Départementale des Associations Familiales (UDAF) de Mayotte, « les meilleurs éducateurs d’un enfant sont ses parents, il faut travailler avec les Comores sur ce concept. »
Lui se dit satisfait de la concertation entre toutes les associations, « un constat commun sur l’état de l’éducation à Mayotte, que nous avons fait partager à un ministre très attentif. » Jean-Michel Blanquer leur a assuré, « à de multiples reprises », vouloir associer les familles à l’école, « par une concertation systématique lors de la mise en place de nouveaux outils ».
L’état sinistrée de l’éducation n’est pas tant lié à « un défi démographique », comme l’a avancé le ministre, pour Ali Nizary il est plutôt « migratoire » : « Il faut trouver une solution sur ce sujet, car les enseignants sont obligés pour chaque arrivée en cours d’année, de rabaisser le niveau pour intégrer le nouveau venu. Et sinon, il faudra construire des écoles tous les jours », le sénateur Thani Mohamed Soilihi l’avait évalué à une classe par jour au regard des 10.000 naissances annuelles.
Il appelle à étendre la Prestation d’Accueil du Jeune Enfant (PAJE) à Mayotte, « il faut alors s’assurer que cela soit bien consacré à l’éducation de l’enfant. »
Une rencontre jugée « trop courte », au regard du nombre de sujets, et qui a été préparée « selon la méthode Macron, avec un émissaire », rapporte Zalifa. Ils attendent « des actes sur le terrain ».
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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