“On ne s’arrange pas sur les affaires pénales”. Le président Bouvart hausse le ton face au prévenu, un grand gaillard, costaud, mais à la voix inaudible. Il est fréquent dans les affaires d’atteinte ou d’agression sexuelle que l’auteur présumé se rapproche de la famille de la victime pour négocier un accord financier. Celui-ci n’a pas fait exception, mais la famille a été au bout de sa plainte.
Ce mercredi, le prévenu, employé dans la grande distribution, était poursuivi pour agression sexuelle sur mineure de plus de 15 ans. Les faits remontent à février 2018. Alors que la jeune fille est en stage dans ce magasin de Mamoudzou, son maître de stage la convie dans le bureau du directeur. “Le dernier jour de mon stage, il est venu me chercher dans le magasin pour remplir le carnet de fin de stage, témoigne-t-elle. Je l’ai suivi dans le bureau du patron”.
C’est là que les choses dérapent. Dans le bureau soigneusement fermé par le responsable, “il m’a demandé si je sortais avec quelqu’un, puis il m’a proposé de sortir avec moi”. Tétanisée, l’adolescente répond par deux fois à la négative. L’homme s’approche alors d’elle. “Il a caressé mon cou avec sa main, puis les seins, et ensuite sous mon tee-shirt, il m’a dit de me laisser faire pour mon bien” poursuit-elle en audition, expliquant avoir vécu ces paroles comme une menace. L’homme lui aurait ensuite touché le sexe et l’aurait embrassée, ce qu’il nie. “Elle était timide, je lui ai mis la main derrière le cou pour la mettre à l’aise” défend-il. Il finira en garde à vue par admettre avoir “fait une connerie, je ne me suis pas rendu compte de mon geste”.
Une peine d’avertissement
Rapidement prévenus, les parents portent plainte au commissariat, et les pressions commencent. L’homme appelle la famille de la jeune fille, sans succès. Ses proches se rendent alors physiquement au domicile de la victime pour tenter de négocier à leur tour, sans plus de résultat. Les parents de la stagiaire la décrivent comme “vraiment traumatisée” par cette affaire, et réclament 6000€ de dommages et intérêts.
Expertisé, le mis en cause s’avère avoir lui aussi, à 12 ans, subi une agression sexuelle de la part d’un “employeur”, mais ne présente pas d’anomalie “mentale ou psychique” selon le psychiatre. Le procureur Rieu réclame à son encontre 2 ans de prison, dont un ferme, et et l’interdiction de travailler avec des mineurs. Pour l’avocat Yanis Souhaïli, “on a quelqu’un qui a dérapé, c’est tout, on n’a pas besoin d’une condamnation aussi sévère”. Une plaidoirie entendue par les trois juges qui ont revu le quantum à la baisse : 6 mois de prison avec sursis simple, et 2000€ de dommages et intérêts.
Y.D.