A peine assis, les 23 enseignants ont vite compris qu’ils entraient dans une cercle d’élite, celui des décorés d’un titre honorifique institué par Napoléon 1er . Les Palmes académiques étaient alors destinées à honorer les membres de l’Université, englobant alors les lycées. C’est le président René Coty qui instituait en 1955 l’ordre des Palmes académiques, comportant trois grades : Chevalier, Officier et Commandeur. « Pour accéder à ce dernier grade de Commandeur, c’est facile, il suffit de devenir recteur ! », lançait un Gilles Halbout en grande forme.
Avant le vice-recteur, c’est Noureddine Rokia qui avait introduit la cérémonie pour vanter les mérites de l’AMOPA qu’il préside, l’Association des Membres de l’Ordre des Palmes Académiques, « être Chevalier, c’est appartenir à un ordre, l’idéal c’est d’être membre de l’association ». Une association dont la renaissance aura duré l’éphémère temps de présence sur le territoire de l’ancien vice-recteur, Stephan Martens, et qu’il cherche donc à relancer.
Pénurie de médailles
Il n’y a rien qui ressemble plus à une cérémonie de remise de médaille qu’une autre. Les médaillés sont habituellement « tous de braves types » pour paraphraser un chanteur à texte. Mais la situation de l’éducation à Mayotte et ses enjeux, mettait de la gravité et de l’authenticité dans les propos. « Au service de l’Etat, la personne doit toujours s’effacer derrière la fonction. Outre votre zèle et votre compétence, c’est pour ça aussi que vous être honorés », soulignait Gilles Halbout.
Depuis 2018, les quotas de nominations de Chevalier ont été divisés par deux, un moyen d’élever le mérite. Et si cette année, les récipiendaires sont sur le « quota Outre mer », vice-rectorat oblige, l’année prochaine ils le seront sur celui de l’Education nationale. Et ce sera décidément mieux l’année prochaine, à écouter le vice-recteur, puisque les médailles seront fournies, alors que cette année, seul le diplôme était remis, « ce n’est pas normal ! »
“On sait pourquoi on se lève le matin”
Beaucoup de « parcours exemplaires », soulignait le représentant de l’Education nationale, à commencer par Abdoul-Anziz Oihabi. Contractuel en 2000, puis instituteur, professeur des écoles en 2012, titulaire du Certificat d’aptitude aux fonctions d’instituteur ou de professeur des écoles maître formateur, Cafipemf, et enfin, conseiller pédagogique de Tsingoni depuis 2013. Fierté et émotion submergeait l’ancien instituteur qui ne pouvait que remercier en brandissant son diplôme.
Enseignante d’arts plastiques et conseillère pédagogique, Anne Bal n’était pas moins émue, félicitée pour ne pas « ménager son temps auprès des élèves et des autres enseignants ». Elle se disait fière de servir, au delà de l’institution, « le territoire de Mayotte, qui mérite un engagement sans faille de ses équipes enseignantes. Et les élèves de Koungou méritent amplement tout le temps que je leur consacre »
En écho, sa principale au collège de Koungou, la dynamique Sophie Bourdin qui s’était illustrée pour son accueil des familles de la commune lors du cyclone Kenneth, exprimait sa volonté d’éduquer « tous les enfants de la zone dont certains sont délaissés. On sait pourquoi on se lève le matin, pour eux. »
Beaucoup ont donc été honorés, notamment Chantal Charles-Alfred, pour son action dans le plurilinguisme, et nous conclurons par le discours de Daniel Ben Souffou, inspecteur de la circonscription de Mamoudzou centre : « Je ne me suis jamais focalisé sur l’idée de recevoir cette médaille, mais aujourd’hui, toute ma carrière défile devant mes yeux, à commencer par mes premiers pas dans l’éducation nationale grâce à des fundis qui m’ont donné confiance. »
Anne Perzo-Lafond