« Une équipe internationale de scientifiques (…) s’est penchée sur la sismicité associée à cette crise volcanique l’année précédant la campagne, et a mis en lumière des mouvements de magma sous le fond marin avant et pendant l’éruption sousmarine qui a débuté en juin 2018 » , indique le communiqué du CNRS et de l’université Toulouse III Paul Sabatier.
Peu à peu, « les scientifiques parviennent à reconstruire les différentes étapes de la formation du volcan et le drainage d’un réservoir très profond (~ 30 km). C’est la plus grande éruption sous-marine (plus de 3,4 km3 ) enregistrée à ce jour. L’étude est publiée, le 6 janvier 2020 dans la revue Nature Geoscience. »
Outre les séismes largement ressentis, et les dizaines de milliers de micro secousses dont seuls les instruments les plus précis ont connaissance, « des centaines de signaux sismologiques d’un type plus rare ont aussi été détectés bien avant la crise, dès janvier 2018, la plupart d’entre eux à partir de juin 2018. Il s’agit d’arrivées d’ondes monochromatiques (c’est à dire des ondes dont les oscillations sont toutes à une seule fréquence, ici 15.5 s), d’une durée de 20 à 30 minutes, appelées signaux très longue période (VLP pour very low period), généralement associés à la résonance de structures volcaniques. L’énergie générée par les plus importants VLPs est considérable (équivalant à l’énergie libérée par un séisme de magnitude 5), générant des ondes de surface détectées partout sur Terre. C’est une observation inédite en sismologie. »
Ces éléments sont compatibles avec le mouvement de Mayotte vers l’est et son enfoncement dans le plancher océanique.
L’analyse des séismes a ainsi permis de retracer l’histoire de la naissance du volcan.
Une naissance étape par étape
« Tout d’abord, l’observation d’une migration rapide et ascendante de la sismicité en mai-juin 2018 a indiqué une propagation du magma depuis environ 30 km de profondeur jusqu’au plancher océanique où la campagne océanique MAYOBS 1 a permis de découvrir la création d’un nouvel édifice volcanique. Une fois le conduit formé et un passage ouvert pour le magma vers la surface, l’éruption a commencé en juin 2018, laissant le magma sortir sans difficulté ce qui a entraîné une diminution de l’activité sismique et un affaissement du réservoir magmatique en profondeur, détecté à l’aide des stations GPS. À partir de septembre 2018, une autre phase a commencé, avec un regain de sismicité en profondeur et plus proche de Mayotte. Celle-ci était due au drainage et à l’effondrement du réservoir magmatique s’étendant entre l’île et le volcan. Le nombre de VLPs a également augmenté. Pour l’équipe, ces VLPs constitueraient la manifestation du réservoir magmatique entrant en résonnance lors du drainage du magma. Tout au long de la crise, les propriétés de la résonance changent, ce qui serait le signe d’une modification lente de la géométrie du réservoir, celui-ci s’amincissant dans un premier temps, puis, à partir de septembre 2018, se raccourcissant sous l’effet de son effondrement. L’équipe a ainsi pu reconstruire les différents processus de la mise en place du volcan au large de Mayotte et du drainage d’un réservoir très profond, à environ 30 km de profondeur. Il s’agit de la plus grande éruption sous-marine jamais enregistrée à ce jour (plus de 3,4 km3 ). Les auteurs identifient un risque potentiel d’effondrement du réservoir à proximité de l’île de Mayotte. Ils démontrent aussi l’intérêt de l’analyse de signaux faibles enregistrés à partir de stations sismologiques lointaines pour étudier des épisodes volcano-tectoniques de régions peu instrumentées. Les identifier et les caractériser au plus tôt à partir des réseaux globaux pourrait ainsi motiver par la suite des déploiements d’instrumentation locaux adaptés pour un suivi plus précis de la crise en cours. »
Y.D.
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