Deux jours après la prise de parole du président de la République, le préfet a traduit ses effets pour Mayotte.
Tout d’abord l’état des lieux du confinement. Constatant un relâchement, le représentant de l’Etat annonce multiplier les points de contrôle, « qu’ils soient fixes ou dynamiques ». Depuis le début, 5.300 PV à 135 euros ont été distribués. Les légionnaires du DLEM se positionneront en renfort des forces de l’ordre de 22h à 6h du matin pour garder entrepôts et commerces, « cibles de voyous », « ils ne seront jamais engagés en cas de frictions ».
Dans « l’unique département de France où les vols commerciaux sont arrêtés », l’avitaillement en alimentation comme en matériel sanitaire se font soit par la mer, avec des approvisionnements maritimes qui tournent « malgré une désorganisation total du fret maritime né des conflits sociaux dans certains ports de métropole », soit par les airs. Grâce aux deux vols hebdomadaires d’Air Austral, ce sont jusqu’à 26 tonnes de fret par semaine qui sont livrés, dont 5 tonnes pour le CHM, des produits pharmaceutiques et de l’alimentaire, ou aux vols militaires en CASA ou affrétés comme le A330 ETEC de la présidence de la République. Le porte-hélicoptère Mistral arrive ce jeudi avec 230 tonnes de fret, dont du gel hydro-alcoolique, « nous sommes desservis, ça fonctionne. »
Après avoir dû annuler une distribution alimentaire par crainte de gros rassemblements, le préfet opte « définitivement » pour des bons, « c’est la plus efficace ». Il passera par les CCAS « qui ont leur liste de familles », les associations, « qui touchent les étrangers en situation irrégulière qui vivent dans la crainte », et des enseignants d’établissements du secondaires « qui connaissent des élèves ».
De l’eau et du pétrole
Les habitants auront un accès facilité à l’eau avec des rampes d’eau dotées de boutons poussoirs installées dans 14 secteurs prioritaires définis avec l’ARS, un établissement public sera ouvert par village pour un accès libre à l’eau, 50 cartes de bornes fontaine seront remises par la Croix Rouge, « et la société Vinci en a financé 700 qui seront distribuées dans les commerce d’alimentation. »
Le pétrole lampant a fait couler beaucoup d’encre dans nos colonnes. Jean-François Colombet pointait la responsabilité de Total, « il fallait permettre comme la loi l’exige, de payer en espèce, et, au lieu de contingenter, multiplier les points de distribution », tout en se félicitant que la société et le groupe Sodifram, mette à disposition et à leurs frais, 4 cuves de 1.000 litres sur 3 points de distribution, la station de Kawéni, et Sodifram prés du rond-point SFR. « Les militaires du DLEM seront présents ». L’opération est menée jusqu’à vendredi, avec un bilan tiré ce jour là.
Sur tous les volets, « la coordination est parfaite avec le conseil départemental », notamment sur les aides aux entreprises, « 792 d’entre elles ont demandé du chômage partiel, pour 7.800 salariés, c’est beaucoup à Mayotte. » Le travail mené avec les maires « volontaires » – pas tous donc – permettra la mise en place d’une cellule de conseil aux petites entreprises.
Parmi les 4 enjeux à venir, le ramadan figure en 1ère place, « nous travaillons sur les recommandations fournies par un groupe d’experts mahorais ». Bonne mesure, les marchés alimentaires, dont certains avaient ouverts en marge de la marge habituelle, vont rouvrir, « j’ai proposé cette dérogation aux maires, car ils permettront accéder aux produits cuisinés pour le ramadan, et d’écouler le production des agriculteurs. »
Un médecin au chevet des morts
Dans l’optique d’une rentrée scolaire par un beau jour de mai, 25.000 masques alternatifs ont été commandés aux entreprises locales, « labellisés AFNOR », « les besoins du recteur sont de 10.000. »
En matière de pratiques funéraires, le mort doit protéger la vie, « le Grand cadi invite à ne plus pratiquer la toilette mortuaire », et la mise en bière dans une housse mortuaire devrait être effectuée par un opérateur extérieur, « opération financée par la commune ». Sur les 800 décès par an à Mayotte, les deux tiers se produisent à domicile, « tant que durera l’état d’urgence sanitaire, un médecin sera disponible H24 pour constater le décès. » Un plus qui devrait améliorer les statistiques. L’ARS travaille à un tarif incitatif pour le déplacement du médecin.
Sur la durée du confinement et les critères utilisés ici pour juger d’une amélioration de la situation, Jean-François Colombet lâchait, « le 11 mai, ça se gagne ! Par le confinement. Nous nous baserons notamment sur l’évolution des admissions en réanimation. Si les autres DOM connaissent un plateau et pas nous, c’est que le virus y a circulé 13 jours avant en Martinique. Les chiffres actuels sont encourageant, mais au moindre relâchement, se serait un malheur pour Mayotte. » Une donnée n’a pas échappé aux scientifiques, « le rassemblement évangélique du côté de Mulhouse, un des gros foyers de la maladie en métropole, a très donné très peu de contamination en Guyane où étaient revenus plusieurs fidèles. » Des études sont en cours.
La porte de sortie du confinement à terre ne s’ouvrira qu’après s’être dotés d’un masque pour tout le monde, « et le ciel ne s’ouvrira que si la menace a disparu à l’extérieur. Si par exemple, la situation s’améliorait à Mayotte et se complique en métropole, nous n’allons pas nous exposer à une 2ème lutte ! »
Anne Perzo-Lafond
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