Dynamiser une filière qui ne pèse que pour 2% du PIB de Mayotte, c’est tout l’enjeu du schéma régional du tourisme, longuement étudié par le conseil départemental et voté ce mardi matin par les élus locaux. De longues études qui ont donné l’impression de déboucher sur des conclusions que l’on connaissait déjà.
D’une part, il faut “améliorer l’image de Mayotte” conclut le schéma, constat dressé que presque personne ne vient visiter notre île sans autre motif de voyage. Une destination “peu connue à l’international” et un développement qui est resté “confidentiel” est-il écrit dans le document adopté par les élus. C’est un fait, l’essentiel de l’offre touristique est actuellement tournée vers les résidents, et les touristes affinitaires, c’est à dire ceux qui viennent à Mayotte parce qu’ils y connaissent déjà quelqu’un. Le schéma adopté ce mardi ne prend donc pas un grand risque pour l’avenir en présentant ces deux cibles de clientèle comme des priorités. Elles le sont déjà pour les acteurs privés qui n’ont pas attendu ce constat pour divertir les habitants de l’île et leurs visiteurs.
Le schéma vise aussi, et ce n’est pas nouveau non plus, les touristes d’affaires. Il s’agit des personnes qui viennent à Mayotte pour motif professionnel, et qui pèsent déjà lourd dans le chiffre d’affaires des opérateurs touristiques. Et pour cause, comme ces clients restent peu de temps, ils concentrent les activités payantes sur une courte période, et disposent en théorie de moyens financiers pour ces activités. En théorie car l’argent ne sort pas forcément de leur poche. On peut penser aux gendarmes mobiles qui, hébergés dans les (trop rares) hôtels de Mayotte, font vivre ces structures à vocation touristique, et participent au chiffre d’affaires du tourisme de l’île.
Et si le schéma pointe le lagon et la plongée comme atour phare à mettre en avant, les nombreux professionnels du secteur n’ont là non plus pas attendu pour développer leurs entreprises et faire vivre l’île.
La grande nouveauté du schéma, c’est la volonté de répondre justement au manque d’offre d’hébergement. Trop longtemps les acteurs se sont renvoyés la balle : pourquoi construire des logements s’il n’y a pas de lignes aériennes pour amener des touristes, pourquoi créer une ligne aérienne si on n’a pas de place pour loger les visiteurs, etc. Cette fois la base est acquise, 1 000 chambre d’hôtel devront être construites, dont la moitié devra répondre au moins à des standards 3 étoiles. Ces hôtels ne risquent-ils pas de servir aux futurs gendarmes affectés sur l’île si les touristes n’affluent pas ? “Ce n’est pas le but” balaye Ben Issa Ousseni, vice-président du CD en charge du développement économique et du tourisme.
Le gaz du Mozambique en arrière plan
Issa Issa Abdou s’interrogeait lui sur la “vraie stratégie” qui manque à ses yeux, et sur le rôle du comité de tourisme, pas du tout évoqué dans l’hémicycle avant son intervention. Guère plus que la difficulté à obtenir un visa pour les touristes potentiels de la zone : un entrepreneur malgache ou comorien, fût-il fortuné, n’a que peu de chances d’être autorisé à entrer à Mayotte, même avec des garanties. Enfin, une cohérence avec les intercommunalités est aussi de mise, ces dernières ayant adopté aussi la compétence tourisme, sans attendre qu’un schéma vienne dresser le constat des nombreux besoins.
Derrière ce schéma, ce n’est pas une révolution qui est recherchée en attirant des touristes qui ne connaissaient pas l’île, mais une adaptation logique à l’opportunité qui pointe son nez : le gaz du Mozambique. En visant “50% de touristes d’agrément et d’affaires”, le conseil départemental pense bien à ces industriels pétroliers qui transiteront forcément, tôt ou tard, par notre île. “L’objectif est de créer des offres de qualité pour répondre aux besoins liés au projet gazier” précise en effet Ben Issa Ousseni.
Quoi qu’il en soit, si l’on attribue à Archimède l’idée d’un “levier pour soulever le monde”, il n’est pas interdit de voir d’un bon œil ces leviers économiques destinés à tirer Mayotte vers le haut.
Y.D.
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