« Nous sommes très surpris de l’ampleur qu’a pris le mouvement depuis son début le 15 juillet dernier », déplore le Docteur Didier Troalen qui dirige le laboratoire privé d’analyses médicales avec le Docteur Pierre-Emmanuel Bonnave. Pour les deux directeurs, des discussions régulières ont déjà eu lieu avec les employés ainsi que des réunions de travail au cours desquelles les points de désaccord avaient déjà été abordés et, pour eux, résolus. Les grévistes dénoncent notamment le non-respect du protocole de sortie de crise mis en place suite à la grève d’avril 2019, ce qui est faux pour les deux directeurs. « La plupart des points ont été respectés dans la mesure de ce qui est possible de faire à Mayotte », précise le Docteur Troalen. Au premier rang des revendications des grévistes figure l’application de la grille des salaires bruts minima conventionnels de la convention collective nationale des laboratoires de biologie médicale extra-hospitaliers du 3 février 1978. « Premièrement, nous rappelons que cette convention collective n’est pas applicable de droit à Mayotte et deuxièmement, nous avions déjà répondu aux attentes du personnel sur ce point », expliquent les deux directeurs.
Un personnel déjà très bien payé selon la direction
En effet, suite au mouvement de 2019, la direction avait consenti à faire une application volontaire des dispositions de la convention collective en adaptant néanmoins les salaires indiciaires pour qu’ils soient équivalents en net à ceux perçus par les salariés qui sont employés en métropole. « Avec les charges applicables à Mayotte, si on aligne les salaires bruts sur ceux de la métropole, les salariés de l’île toucheraient 17% de plus en net que les salariés métropolitains », explique la direction qui affirme donc qu’elle ne peut pas accéder à cette revendication. « En outre, cela engendrerait une augmentation sensible de la masse salariale du laboratoire qui ne serait pas supportable en termes économiques », ajoute-elle. Mayotte rattrape chaque année un peu des charges qui incombent aux entreprises, mais ce rattrapage se fait lentement, ce que ne comprennent pas les grévistes selon la direction. Par ailleurs, les deux directeurs nous ont expliqué qu’ils avaient déjà mis en place un treizième mois et de nombreuses primes pour leurs salariés. « Avec le treizième mois compris, une femme de ménage à temps partiel touche déjà environ 2500 euros chez nous, un coursier 2800 euros et un technicien de laboratoire près de 6000 euros. Nous estimons que nous faisons déjà beaucoup d’efforts en termes de salaires », affirment les directeurs.
Un blocage du laboratoire inadmissible
« Nous n’entamerons aucune forme de négociation tant que les grévistes bloqueront le laboratoire, empêchant les non-grévistes de travailler et les patients d’accéder au laboratoire », affirment les deux directeurs. « Nous respectons le droit de grève, mais nous condamnons fermement le blocage des patients et les menaces de certains grévistes qui sont agressifs et ont parfois voulu en venir aux mains avec nous », ajoutent-ils. Pour eux, ces comportements pourraient à terme engendrer de graves problèmes sanitaires sur l’île. Beaucoup de personnes sont refoulées à l’entrée du laboratoire dont des femmes enceintes ou d’autres présentant des pathologies graves telles que des cancers.
Concernant le manque de qualification des techniciens de laboratoire dénoncé par les grévistes, la direction réfute ces accusations en affirmant que tous leurs techniciens de laboratoires ont des diplômes certifiés par l’ARS. Il en va cependant de la responsabilité du technicien de faire valider son diplôme afin d’obtenir un numéro ADELI. « Il s’agit d’une simple démarche administrative », expliquent les directeurs. En revanche, concernant le manque de personnel, la direction affirme qu’elle fait son possible pour faire venir du personnel qualifié sur l’île mais que personne ne veut venir à Mayotte. « Et au vu du climat social, cela ne va pas arranger les choses », déplorent le Docteur Troalen et le Docteur Bonnave.
« Les grévistes veulent la mort du laboratoire »
« On a l’impression que les grévistes veulent la mort du laboratoire », déplore le Docteur Troalen qui affirme qu’il n’est pas impossible que la direction mette la clé sous la porte si la situation ne vient pas à se calmer. Les grévistes souhaitent en effet l’arrêt de la prise en charge des analyses du laboratoire en PMI qui représente la moitié de leur activité. « S’ils attaquent cela, cela mettra un terme à l’activité de la structure », expliquent les deux directeurs. Les grévistes souhaitent également l’implantation d’un autre laboratoire d’analyse sur le territoire, ce qui mettrait aussi en péril les activités de Mayo Bio.
En tout cas, pour le moment, la situation semble bloquée malgré quelques échanges de mails entre les syndicats et la direction. Les grévistes prônent une grève illimitée tandis que la direction refuse toute négociation tant que le laboratoire sera ainsi bloqué par les grévistes qui ne sont pourtant qu’au nombre de 15 sur les 28 salariés que compte l’entreprise.
N.G
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