Nature et culture s’opposent facilement dans la culture populaire. A Mayotte, les deux se marient particulièrement bien. L’association Jardin de Mtsangamouji l’a bien compris, et fait de l’environnement un patrimoine au même titre que les vestiges méconnus du territoire communal.
Samedi, une randonnée organisée par l’association avait justement vocation à faire découvrir “le secteur peu connu de Mtsumbatsu”, non loin du plus connu gîte de Mliha.
“Avant, il y avait un village dont on peut encore voir les vestiges et à 10 minutes de là, il y a une fausse grotte qui est une richesse naturelle” explique Nassim Moussa, président de l’association.
La randonnée, assez courte, démarre par la traversée de zones cultivées, via un chemin pratiqué par les agriculteurs du coin. A l’ombre des bananiers et autres cocotiers, le visiteur découvre ou redécouvre les avantages certains du jardin mahorais, fait d’une grande diversité de cultures, par opposition à une pratique intensive qui ne fait la part belle qu’à une espèce. Attoumani Harouma, de la communauté de commune du centre ouest (3CO), partenaire de la visite, explique sans se lasser cette “traversée d’un champ mahorais où l’on trouve une culture vivrière, aevc du papayer, de la pomme cannelle, là c’est un combava”, indique le guide du jour qui précise que si ce citrus est ” connu pour son zeste, on utilise aussi ses feuilles”. Pour lui le jardin mahorais, c’est en un même lieu “tout ce dont on a besoin de l’entrée au dessert”. Ici l’ambrevade, “on est à la fin de la saison”, là, quelques unes des “34 variétés de banane parmi lesquelles les agriculteurs choisissent”. Et bien sur “le manioc, plante préférée des Mahorais, avec ses feuilles ont fait le mataba, on fait du feu avec ses branches et on en mange le tubercule”. Dans le manioc, tout est bon, même si ça ne rime pas. Et bien sur, comment ne pas s’arrêter sur le songe, “majimbi” en shimaoré, qui est l’emblème de Mtsangamouji.
Dans un coin reculé du champ, des restes de murs jonchent le sol. Ces vestiges sont les dernières traces de la mosquée qui se dressait là il y a quelques décennies à peine, au centre d’un village dont il ne reste plus rien, à part le puits, toujours fonctionnel. “Les mosquées étaient les premiers bâtiments en dur de Mayotte, alors que du village en bois, il ne reste pas de trace. Celle-ci est faite en sable et en chaux, c’est à dire du corail brûlé, bien sur on ne pourrait plus faire cela aujourd’hui” sourit Nassim Moussa.
Et au bout du chemin, deux perles à découvrir : la plage de Mtsumbatsu, vierge de tout déchet, comme on aimerait en trouver davantage. A l’exception d’une carapace de tortue qui vient rappeler le carnage qui s’y déroule quand personne ne surveille les lieux.
Et à quelques dizaines de mètres, la fameuse “fausse grotte”, formée par l’éboulement d’un colossal bloc de pierre basaltique, elle offre un espace de fraîcheur apprécié de ceux qui la connaissent, et des insectes qui y trouvent refuge.
“On a donc des richesses naturelles, et des richesses historiques”, résume le président Nassim Moussa, “et tout cela, c’est ce qui constitue un patrimoine”.
Un patrimoine méconnu et menacé. En témoignent les nombreux brûlis rencontrés le long du la promenade, et le concert assourdissant des tronçonneuses qui brouillait les explications du bénévole. En pleine crise de l’eau, un propriétaire déboisait un pan entier de colline. Non loin, un champ de bananiers sur une terre rouge et sèche rappelle les risques de ce genre de pratiques qui transforment les jardins en padzas.
Et c’est justement avec le souci de sensibiliser dès le plus jeune âge que l’association Jardin de Mtsangamouji a décidé de tourner les journées du patrimoine vers ces derniers, et d’organiser cette visite une semaine avant.
Y.D.
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