Des enfants, des jeunes, des vieux, des mamans, tous vêtus de blanc. Ils affluent, ce samedi matin, devant les grilles de la cité à l’endroit exact où le jeune Miki a trouvé la mort neuf jours plus tôt. Certains arrivent seuls ou en grappes, d’autres en régiments qui s’extirpent de bus venus de plusieurs endroits de l’île et dont le passage a été permis par la levée des barrages.
« Je suis Miki », « Miki à jamais dans nos coeurs » ou encore « stop aux violences intervillageoises », peut-on lire sur les t-shirts imprimés en nombre par l’interco du nord.
Et bientôt, alors que la foule se met en branle pour rejoindre Mtsamboro, le village de Miki, cette banderole tendue par un groupe de lycéennes : « l’école n’est pas un cimetière ».
Des mots forts, entre détresse et colère, qui sont de toutes les bouches dans les rangées blanches. « On ne peut pas supporter de voir nos enfants mourir en allant au lycée », lance une maman. « Où est-ce que, ailleurs en France, les jeunes vont au lycée en se disant qu’ils peuvent y trouver la mort ? Comment voulez-vous que l’on devienne la génération que l’on attend de nous, celle qui veut vivre ses rêves dans ces conditions ? », poursuit une lycéenne.
« Combien de morts allons nous encore compter ? »
Si la mobilisation est aujourd’hui un hommage au jeune du nord, le dernier drame intervenu à Mamoudzou renforce le sentiment évoqué. « Combien de marches blanches allons nous faire ? Combien de morts allons nous encore compter ? », se désespère Youssouf Chadhuli à l’arrivée de la marche, sur le plateau sportif de Mtsamboro transformé en agora de deuil. Pour l’éducateur sportif et membre du comité intervillageois de la commune, « il est impératif que l’on sorte de la logique du chacun pour soi, il faut que l’on se mobilise tous ensemble, que chacun à son échelle prenne ses responsabilités ».
Au micro, le voici demandant à la foule de regarder les visages qui entourent chaque personne pour appeler à recréer du lien, de la solidarité. Le message fait mouche, mais à l’ombre d’un mur d’enceinte ou le long de la plage, on regrette tantôt « l’indifférence de l’État qui ne laisserait jamais faire ça en métropole », tantôt « le sentiment d’impunité des mineurs » ou encore « le manque de structure pour prendre en charge les gamins ».
« La méthode est en train de changer radicalement », promet la préfecture
« Je comprends la colère de la population, personne ne peut-être insensible à ces événements dramatiques et nous sommes également profondément touchés par ce qu’il s’est passé. Je pense effectivement que chacun doit jouer sa part, et l’État répond bien évidement présent. Il y a eu les assises de la sécurité et de la citoyenneté, les pactes de sécurité signés avec les mairies et si cela n’a pas encore porté ses fruits, la méthode change radicalement et nous allons relever ce défi », répond Laurence Carval la directrice de cabinet de la préfecture venue accompagnée du recteur Gilles Halbout à l’issue de la marche.
Reste que « ça fait des années que nous nous mobilisons pour le changement, des années que l’on nous promet que ça va changer et des années que tout empire », fait valoir l’éducateur sportif. Lequel, à l’évocation des barrages qui ont transformé ces derniers jours le nord en île dans l’île, se dit « en principe contre » mais « malheureusement c’est parfois la seule méthode pour se faire entendre ».
G.M.
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