Maymounati Moussa Ahamadi: L’espoir déchu
Victorieuse au premier tour dans le canton de Dzaoudzi-Labattoir, la présidente de la Cress aura émergé comme potentielle présidente. Ses premiers pas en politique auront cependant été cruels : son binôme et premier soutien jusqu’à la veille comme il l’assurait sur les réseaux sociaux lui a en effet fait défaut dans la dernière ligne droite à en croire la
version présentée par son camp. « C’est vrai que je comptais beaucoup sur cette jeunesse pour qu’elle marque l’histoire de Mayotte, l’histoire de la matriarchie, l’histoire de la compétence. J’ai l’impression qu’on a encore du mal avec la compétence féminine, et ce n’est pas propre à Mayotte. J’espère qu’un jour, on se décidera à porter un réel changement dans ce territoire qui été porté par des femmes », livre-t-elle à l’issue du vote des conseillers. « On devrait réellement se pencher sur une évolution du mode du scrutin car on a des compétences qui s’éparpillent alors que l’on a besoin aujourd’hui que ce territoire, le plus pauvre de France, soit pris en main par les bonnes personnes ».
Abdoul Kamardine : Dans le bon camp
Il a sauté de joie à l’annonce du nom du nouveau président. « On l’a fait, la droite est au pouvoir! », s’est exclamé le -largement- vainqueur du second tour dans le canton de Mtsamboro. Pour Abdoul Kamardine, l’incertitude régnait encore au moment du vote. « Rien n’est jamais acquis d’avance, mais le résultat montre qu’il y a eu un respect des engagements, c’est fantastique, la démocratie a été respectée », considère-t-il. « Il y avait deux clans, les résultats ont été obtenus après d’âpres négociations et nous avons aujourd’hui la majorité et la présidence. Le choix s’est porté sur Ben Issa Ousseni, on est dans un rajeunissement et en même temps dans une continuité. Il y a là de la cohérence et je m’en félicite », se réjouit-il encore.
Daniel Zaïdani : « Il y a aujourd’hui deux camps, deux manière de voir »
« La population nous a fait part de sa souffrance, de ses difficultés et de son désir d’arpenter un nouveau chemin et c’est pour ça que nous avons fait le choix de Maymounati qui incarne la jeunesse, la féminisation de la politique et la compétence. Je ne suis pas Néma mais les clivages politiques devaient être dépassés pour cette cause. Ben Issa Ousseni est un ami, je connais sa force de travail mais je pense qu’il était nécessaire d’avoir une présidente qui ressemble à la population. Mayotte ne sera véritablement tirée
vers le haut que lorsque le changement sera réel, c’était notre ambition », soutient amèrement Daniel Zaïdani. « Si Alain Sarment et moi-même incarnions une certaine expérience, notre mouvement portait en son coeur l’idée du renouvellement. Il y a aujourd’hui deux camps, deux manière de voir », ajoute l’ancien président de la collectivité. « Les binômes qui ont fait campagne n’ont pas été solidaires jusqu’au bout, je ne me l’explique pas », regrette-t-il encore. Ce qui, comme beaucoup, le pousse à plaider en faveur d’un nouveau mode de scrutin. « C’est une évidence, au vu de nos attentes et pour éviter les jeux d’alliance qui dépassent le cadre de l’intérêt général, je plaide pour qu’un candidat identifié depuis le départ puisse se présenter devant les électeurs », fait-il valoir.
Soibahadine Ibrahim Ramadani : Passage de relais
L’ancien président du Département se dit ravi de voir l’un des piliers de la précédente mandature reprendre les rênes du conseil. « C’est le choix de la continuité, Ben Issa Ousseni a fait campagne sur son bilan et sur les projets encore à construire et portés par la précédente mandature, tout en ajoutant sa touche personnelle. On ne peut que s’en
réjouir », savoure-t-il. Quid du renouvellement, de l’occasion manquée de voir une femme présider le Département ? « Si le bilan était mauvais il aurait été victime du dégagisme », « les femmes mahoraises prennent toujours beaucoup de place dans le combat politique, pour autant les Mahorais et les Mahoraises ne sont pas encore prêts pour les porter à la tête de leurs institutions, ça n’est pas vrai qu’ici. Maymounati a crevé l’écran pendant la campagne, on aurait pu la prédestiner à un avenir mais il y a peut-être un moment où il faut enrichir l’expérience, se faire connaître, entretenir des relations encore plus fortes et convaincre les réticences. »
Saïd Omar Oili : « Les élus n’ont pas voulu entrer dans l’histoire »
« À chaque fois que les gens font des discours ici, ils disent que le combat de Mayotte a été mené par des femmes. Nous avons voulu aller plus loin que les discours et en faire une réalité politique autour d’une dame extrêmement compétente. Les élus n’ont pas voulu entrer dans l’histoire, c’est dommage », regrette le parrain politique de Maymounati Moussa Ahamadi. « Nous avons voulu répondre à la demande de la population qui était celle du renouvellement. Malheureusement, il y a toujours le fossé entre les paroles et les actes, on a encore du chemin à faire pour que les femmes prennent toute leur place sur le territoire. » Un changement de mode de scrutin pourrait changer les choses estime le baron de Petite-Terre. « Évidement, il est temps de tourner la page sur ces façons de faire, que l’on cesse de séquestrer les élus, de leur prendre leur portable. Il faut que la population connaisse la donne dès le départ, c’est cela la modernité. Regardons autour de nous comment les choses fonctionnent ! J’avais l’espoir qu’il y ait une réaction des autres femmes, mais elles-mêmes ont rejeté la candidature. Il y a a méditer là-dessus ».
Mansour Kamardine : À boulets rouges
Avec le député Kamardine – qui va garder son siège à l’assemblée – tout le monde en prend pour son grade. « L’organisation pour en arriver là a été un véritable capharnaüm, avec des majorités qui se font et qui se défont au gré du vent. Tout au long de ces quatre jours, aucune majorité n’émergeait. J’affirme aujourd’hui qu’aucun des élus n’a le souci de l’intérêt général. Tous allaient chercher leur intérêt. S’il y a une urgence pour Mayotte c’est de modifier le mode de scrutin pour mettre un terme à cela », dénonce l’avocat. « Un capharnaüm aussi car on a acheté les élus comme du pain », accuse le député. « On a vu dans la nuit des personnalités venir arracher des élus d’une majorité pour les amener dans un autre groupe », poursuit-il encore, avant de cibler.
« La seule chose que j’ai demandée à la majorité, et c’est la raison pour laquelle je la soutient, c’est de se pencher très sérieusement sur les intérêts de Mayotte par rapport au port de Longoni », entame-t-il.« Ça suffit, les puissances de l’argent ne peuvent plus s’immiscer dans le politique. Qu’est-ce que vient faire Madame Nel à envoyer des textos pour réclamer qu’un élu aille dans tel ou tel groupe ? », poursuit-il tout en montrant une photo sur son téléphone. « Ça, c’est la voiture de Madame Nel qu’on a pisté mardi soir. Elle est devant la maison d’une élue qui le lendemain est venue arracher un conseiller de nos bras pour l’amener dans l’autre groupe. Heureusement, il a su résister mais ce sont des choses insupportables. »
Avant de balancer une autre bombe, cette fois à l’encontre de Maymounati Moussa Ahamasi : « le problème c’est que ce n’était pas cette femme qui devait être présentée. Jusqu’à hier [mercredi] 14 heures, elle était dans notre majorité, première vice-présidente. On est venu l’arracher pour la présenter comme présidente dans l’autre groupe, vous croyez vraiment que c’est une façon de promouvoir la place des femmes ? »
G. M
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