« Être enfermée dans un tout petit appart’ je peux pas moi ! J’ai pas l’habitude… J’ai même entendu qu’il n’y avait parfois pas de fenêtre ! J’entends plein d’histoire, ça me fait peur… Et puis si je pars loin, comment je fais s’il m’arrive quelque chose ? » Malgré la chaleur de ce vendredi à Chirongui, Moina ne cache pas sa frilosité quant au grand départ. Alors, face à elle, sous une des tentes d’Émanciper Mayotte dressées sur le parking du pôle culturel, Hidaya Baro n’hésite pas à jouer avec la température pour, tantôt bousculer la jeune fille, tantôt la rassurer. « Il faut sortir un peu de ta zone de confort, personne le fera à ta place. Tes parents ne vont pas te dire de partir, c’est à toi de prendre tes responsabilités ! », lui lance ainsi la membre de l’association qui, tout au long du mois, parcourt Mayotte pour sensibiliser les jeunes comme leurs familles à la mobilité (programme en bas de page).
« On est armés pour réussir mais souvent c’est nous-mêmes qui nous mettons des barrières, notamment en écoutant les histoires », reprend Hidaya dans son polo blanc floqué des logos des multiples partenaires de l’association. « Et justement, c’est pour ça qu’on est là, pour bien tout préparer avant le départ », poursuit-elle en désignant les différentes tentes environnantes et occupées par ses collègues.
Le couteau suisse de la mobilité
Ici, tout est prévu : logement, bourses, Erasmus, transport, orientation, vie quotidienne ou encore paperasserie administrative… La liste n’est pas exhaustive, au contraire de l’action
de l’association qui conseille sur tous les volets pour préparer une mobilité des plus sereines. Stages, séjours à l’étranger, cursus classiques, Émanciper Mayotte fait par ailleurs le lien avec l’ensemble des partenaires de la mobilité pour élaborer un plan sur-mesure.
« Normalement ces forums sont un peu la dernière phase avant le départ parce que nous sommes déjà intervenus dans les établissements ou autre pour sensibiliser les élèves », indique Boina Tahanassi, conseillère en insertion professionnelle dans l’association. Ce qui n’empêche pas de guider l’ensemble des publics, à l’instar de Moina qui finira bien par l’admettre : « de toutes façons si je veux continuer dans ma filière, il faudra que je parte… Ça me fait peur mais heureusement qu’il y a des gens comme eux [les membres de l’association] pour nous accompagner ».
Bien partir pour mieux revenir
D’autres ont déjà mieux mûri leurs projets. « Je voudrais faire une licence d’espagnol, je me dis que le mieux serait peut-être de partir en métropole dans un premier temps puis d’aller en immersion en Espagne » Bingo ! La future étudiante a visé juste en s’adressant à Hidaya Baro, justement responsable du pôle Erasmus. Et enchantée d’entendre un tel projet. Quelques conseils avisés d’un côté, plusieurs doutes levés de l’autre et voilà que les deux jeunes femmes se quittent ravies.
« C’est bien ce genre de projets, souvent les jeunes d’ici qui veulent partir se cantonnent à la métropole ou à La Réunion, c’est bien mais il faut aussi savoir aller plus loin, découvrir d’autres cultures », soutient celle qui est incollable sur le dispositif d’échange universitaire européen. Mais attention, pour Hidaya Baro comme pour l’ensemble de ces collègues, si l’on incite à partir, c’est pour mieux revenir ! « L’objectif c’est de faire avancer Mayotte grâce à des jeunes qui auront été bien formés, qui auront connu d’autres expériences, d’autres façons de faire, qui auront su prendre leur indépendance etc. », fait ainsi valoir Hidaya.
« C’est forcément un choc quand on débarque à Charles-de-Gaulle ou autre, et c’est la raison pour laquelle il faut être le mieux préparé possible. Mais c’est tellement important, ces jeunes là sont l’avenir de l’île, il faut qu’ils aient une idée du monde qui nous entoure, en tirer le meilleur pour aider à développer le territoire », complète Boina Tahanassi. Émanciper Mayotte, en somme.
G.M
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