Le wébinaire qui s’est tenu jeudi soir à l’initiative de la représentation Mahoraise de Paris avait un objectif clair : étudier les “opportunités” liées à la découverte du volcan sous marin qui poursuit son éruption à 50km à l’est de Mayotte.
Pour en parler, des invités de renom, tous ayant travaillé de près sur ce nouveau phénomène. Gilles Halbout, le recteur, Saïd Saïd Hachim, le géographe du Conseil départemental, mais aussi des scientifiques comme Nathalie Feuillet, cheffe de mission May’Obs ou encore le Pr Eric Humler, directeur scientifique du Revosima.
Pour bien comprendre ce dont on parle, Nathalie Feuillet rappelle que ce nouveau volcan est ni plus ni moins “la plus grosse éruption sous marine jamais documentée”. Avec un volume émis de 6 kilomètres cube de lave, c’est “l’équivalent de la ville de Paris entièrement recouverte d’une couche de 10 mètres d’épaisseur”.
Et si les séismes, quoique quotidiens, se font plus discrets, l’activité se poursuit, avec notamment des panaches bien plus proches, à 10km à l’est de Petite Terre.
Pour Mohamed Zoubert, directeur de la délégation de Mayotte à Paris, ce volcan et le wébinaire qu’il organisait sont l’occasion de “parler de Mayotte autrement”. Et pour cette première conférence d’une longue série, il s’agissait moins de parler de science que d’économie. Car ce volcan est une manne financière énorme. Rien que jusqu’à présent, ce sont pas moins de 17 millions d’euros qui ont été débloqués pour l’étudier et prévoir les risques éventuels, et l’équivalent de 300 personnes qui travaillent dessus.
“Il faut en profiter”
“Il faut maintenant aller de l’avant et voir comment rebondir de façon positive et construire avec les Mahorais quelque chose qui dure”, estime ainsi le Pr Eric Humler. “Les métiers de l’environnement sont là, le volcan fait partie de son environnement incroyable, c’est un objet naturel qui se met en place, il faut l’accepter et avancer vers une dynamique”.
“C’est une opportunité, il faut en profiter” poursuit-il.
C’est le cas notamment en tout ce qui touche aux métiers de la mer. Nathalie Feuillet a pu s’en rendre compte lors des différentes missions océanographiques menées depuis deux ans. « Sur les navires il y a beaucoup d’opportunités, l’océanographie, la marine marchande… il y a différents métiers, ce sont des plate forme sur lesquelles ont dit 24h/24, il faut des gens en machine, en cuisine, des métiers de l’hôtellerie, des chercheurs… C’est un mélange de compétences où tout le monde a le même objectif.”
Il y a donc tout un panel de métiers autour de la recherche pure, mais aussi des opportunités touristiques à construire et à saisir estime Saïd Hachim.
“Je suis persuadé qu’on est au début d’une grande aventure. L’Europe, le Département, investissent dans l’économie bleue. L’avenir est dans la mer. Demain des privés iront découvrir le volcan de mayotte. Personne n’est encore allé voir ce volcan”. Et le géographe mahorais de dresser le parallèle avec la conquête spaciale, qui a commencé par de la recherche financée par les états avant d’être récupérée par le secteur privé à des fins de tourisme de luxe. D’ailleurs, un milliardaire sur le volcan, c’est arrivé bien avant un milliardaire dans l’espace rappelle-t-il. “Paul Allen (co-fondateur de Microsoft NDLR) est venu à l’époque, ils ont essayé d’y aller mais son sous marin ne pouvait pas aller jusqu’à 3000m. Se sachant condamné il a voulu aller voir quelque chose d’extraordinaire, et il a choisi Mayotte ! Il faut continuer à être dans l’innovation et informer la jeunesse sur les opportunités qui sont assez nombreuses” poursuit-il.
Les domaines d’emploi d’avenir touchent aussi à la biodiversité, dont Mayotte est aussi un hotspot. Ainsi Nathalie Feuillet note que lors des dernières missions, le volcan était déjà recouvert de vie bactérienne, de quoi ouvrir tout un champ de recherche sur “l’apparition de la vie” rebondit Saïd Hachim.
“Créer des vocations”
Et puisque le volcan est nouveau, hors normes, et presque inaccessible avec ses quelque 3500m de fond, il est aussi une inépuisable source d’inspiration technologique. L’étudier a nécessité d’inventer des outils, comme le robot Rosette conçu pour étudier les couches d’eau au dessus du dome. Actuellement, une technologie rare de fibre optique est déployée pour étudier les vibrations et mouvements du fond marin. Qui sait quelles autres inventions à la fois productives et lucratives pourront être inventées à moyen terme pour étudier et valoriser le phénomène ?
Pour Gilles Halbout, ce volcan “a plusieurs effets bénéfiques, appréhender les risques mais aussi créer des vocations”. Celles-ci pourront passer par le projet de lycée de la mer, mené conjointement entre le rectorat et le conseil départemental mais aussi par le CUFR où “se crée un pôle d’excellence autour des métiers de l’environnement”.
Sans parler de tous les métiers autour des conséquences du volcan dans la vie quotidienne, conclut Saïd Hachim :”génie civil, urbanisme” sont autant de domaines d’activité qui sont impactés par ce phénomène géologique unique en son genre, et dont il nous appartient de tirer profit.
Y.D.
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