Si tout le monde est d’accord pour adopter une gestion des déchets exemplaires avec l’ouverture de l’ISDND*, chacun veut payer le juste prix avec la certitude d’un service rendu. Ce fut le débat proposé par la CCI dans ses locaux vendredi dernier.
Pour répondre aux critères d’hygiène nationaux et aux normes européennes, les cinq décharges illégales à ciel ouvert de l’île seront fermées au 1er juillet pour laisser la place à une installation ne recevant que les déchets non dangereux, l’ISDND à Dzoumogné.
Cela suppose un circuit de recyclage des déchets en amont, et l’orientation des plus nuisibles vers les entreprises spécialisées. Quatre des anciennes décharges seront transformées en quais de transfert, « une zone de récupération des déchets ménagers avant leur envoi vers l’ISNDN », explique Hafidhou Abidi Madi, Directeur général du SIDEVAM 976, syndicat unique de collecte et de traitement des déchets de l’ensemble de l’île.
S’il annonce l’ouverture de l’ISDND pour le 16 juin 2014, comme prévu, tout n’est pas encore prêt en amont. Les quais de Malamani et de Hamaha sont opérationnels, « mais ceux de Kahani et Badamiers sont encore provisoires en attendant leur ouverture en septembre 2014.
De même pour la Commission chargée du suivie de l’exploitation composée notamment des communes, et présidée par le préfet, « elle n’est pas encore créée », indique Jean-François Le Roux, en charge des installations classées à la DEAL.
Une retenue collinaire à proximité
L’Installation de Stockage des Déchets non Dangereux est pensée pour écarter tout risque de pollution, «avec 50 centimètres de matériaux très imperméables, au dessus de 25 mètres de roche d’argile rouge elle-même imperméable », indique Ludovic Barthélémy, responsable d’Exploitation de l’ISDND pour Star Urahafu (Star Réunion, filiale de Suez Environnement).
Des piézomètres, dont la mise en place a retardé le démarrage de la structure, capteront les eaux souterraines pour les analyser. Une précaution indispensable : à proximité, plusieurs captages approvisionnent la retenue collinaire voisine de Dzoumogné.
D’une capacité maximale de 2,5 millions de tonnes de déchets, la décharge moderne est prévue pour durer 30 ans. Un terme modulable en fonction du volume apporté, c’est à dire du recyclage des déchets. Les déchets admissibles sont les ordures ménagères, les déchets encombrants produits par les déchetteries et les déchets industriels ni valorisables, ni dangereux.
Crainte de décharges sauvages
Mais tous les produits refusés ne pourront pas être recyclés dans un premier temps, les filières n’étant pas prêtes. C’est le cas des matériaux de démolition du BTP, du traitement des pneumatiques, des déchets verts… Que va-t-il advenir de ces déchets ? Il est à craindre que, les anciennes décharges fermant le 1er juillet, leurs propriétaires ne les expédient dans la nature…
On peut également prédire, sans se tromper, de belles prises de têtes : particuliers et professionnels devront remplir une fiche d’identification des déchets avec un code spécifique… « Et si un pneu a été mis au fond du chargement ? », s’enquiert Enzo Di Girolamo, spécialisé dans le recyclage.
Le prix de l’hygiène
Pour toute anomalie, «une photo sera prise et un avertissement envoyé au producteur, mais le but n’est pas de refuser systématiquement les bennes de déchets», Ludovic Barthélémy se veut conciliant, mais il sait que le risque de pollution du site est une épée de Damoclès.
Là où les décharges comme Chirongui et des Badamiers étaient ouvertes à tous, entrepreneurs et particuliers vont devoir payer pour le transport et le traitement des déchets, « le prix de la propreté ! » Et plus on est loin de Dzoumogné, plus le chiffre enfle : « les déchets en provenance de Petite Terre par exemple coûteront trois fois plus cher en transport que depuis Hamaha au nord », 142 euros la tonne contre 53 euros. Auxquels il faut ajouter les prix du traitement et de la barge. Des tarifs qui pourraient faire l’objet d’un réexamen.
Les industriels veulent bien payer un surcoût mais s’il s’accompagne à coup sûr d’une dépollution de l’île, « de toute manière, ils vont devoir intégrer ces surcoûts dans leurs prestations », concluait Ludovic Barthélémy.
Les dix caméras de surveillance du site sont connectées et les entreprises de travaux se succèdent pour que tout soit opérationnel le 16 juin 2014.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
*ISDND : Installation de Stockage des Déchets non Dangereux
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