“Par dérogation (…) si l’état d’urgence sanitaire est déclaré sur le territoire de Mayotte avant le 30 août 2021, cet état d’urgence est applicable jusqu’au 30 septembre 2021 inclus”. En une petite phrase glissée au milieu du projet de loi, les parlementaires, qui ont négocié jusqu’à tard dans la nuit de dimanche à lundi, ont exempté Mayotte des dispositions d’exceptions prises face à la 4e vague qui sévit presque partout ailleurs.
“À ce stade, la situation est sous contrôle et il n’est pas pertinent de placer ce territoire en situation d’état d’urgence sanitaire” indique le Sénat dans sa motivation pour cet amendement. “Toutefois, (…) si la situation devait se dégrader, ce que le Gouvernement et le préfet cherchent à endiguer, il serait cohérent que l’état d’urgence sanitaire puisse s’appliquer, comme pour la Guyane, la Martinique et la Guadeloupe, jusqu’au 30 septembre 2021” note aussi la chambre haute.
En effet, le Sénat précise toute une liste d’inquiétudes structurelles qui justifient la plus grande vigilance malgré un taux d’incidence exceptionnellement bas.
“Bien que Mayotte semble présenter une situation sanitaire sous contrôle, avec un taux d’incidence de seulement 4, 7 / 100 000 habitants, la dégradation de l’environnement régional et certaines fragilités du territoire nous amènent à faire preuve de vigilance et d’anticipation.
Avec des capacités en réanimation limitées à 17 lits, un schéma vaccinal complet pour seulement 15 % des habitants, une densité de population parmi les plus fortes de la République française et des mouvements de population très importants dans un contexte de vacances scolaires, Mayotte présente des fragilités importantes qui pourraient contribuer à une reprise épidémique.
Ces fragilités sont d’autant plus fortes que l’environnement régional est inquiétant : reprise épidémique très forte en Afrique du Sud et situation particulièrement préoccupante à la Réunion (taux d’incidence à 262 et accroissement des hospitalisations). Pour exemple, au cours de cette période, chaque semaine, près de 2 000 Mahorais se rendent à la Réunion et près de 1 500 Mahorais retournent à Mayotte.”
“Il faut qu’on profite de cette faveur pour éviter la 4e vague”
“Le pass sanitaire et les autres mesures ne sont possibles que par la loi” indique le sénateur Thani Mohamed Soilihi qui décrit l’amendement ci dessus comme un “état d’urgence éventuel” qui peut être déclenché “sans avoir recours à la loi” si le gouvernement le juge nécessaire dans les semaines à venir. “Autant être prévenant au cas où Mayotte serait touchée”.
Or, les mesures décrétées “sont tellement exceptionnelles qu’elles relèvent de la loi, à Mayotte ça ne sert à rien d’imposer des mesures aussi drastiques”. De fait, l’état d’urgence sanitaire a été voté pour permettre justement les mesures exceptionnelles comme le pass sanitaire. En l’absence d’état d’urgence pour l’instant chez nous, il semble logique que le pass sanitaire et les autres mesures restrictives associées ne soient pas d’actualité à Mayotte. “S’il n’y avait pas eu cette dérogation, beaucoup se gens auraient râlé à juste titre, comme les restaurants”. Le sénateur invite toutefois à la prudence. “Il ne faut pas faire comme le camion qui fonce dans le mur en klaxonnant” prévient-t-il.
Si ces mesures venaient à être appliquées dans les semaines à venir, cinéma, spectacles et autres manzarakas pourraient en pâtir. Aucun centre commercial de Mayotte n’atteint en revanche les 20 000m² requis pour tomber sous le coup du pass sanitaire.
“Les gens vont apprécier qu’on ait pensé à Mayotte et qu’on ne mette pas Mayotte dans le même panier tant qu’on est vertueux” réitère le sénateur. “Il faut qu’on profite de cette faveur pour éviter la 4e vague, et pour ça, accélérer la vaccination et appliquer les gestes barrière” recommande-t-il. Si la situation devait dégénérer, le retour de bâton serait douloureux, pour une économie qui commence tout juste à redémarrer.
Y.D.
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