Alors que les élèves de CE1 et CM1 de l’école de Pamandzi 2 arrivent à hauteur de Musical plage à bord d’un catamaran, deux plongeurs s’activent sous l’eau pour récupérer des fragments de coraux abîmés par l’activité humaine ou la houle et déposés sur le fond marin. « Pour la première fois à Mayotte des enfants vont bouturer du corail et étudier sa croissance en milieu naturel », s’enthousiasme Aline Tribollet, biologiste-écologue des récifs coralliens et coordinatrice du projet de recherche Future Maore Reefs.
« Sensibiliser les enfants à la préservation de l’environnement »
« Ce projet a été co-construit avec le CUFR, le Parc-marin, l’Office de la biodiversité ainsi que l’Institut de recherche pour le développement (IRD). Il est financé dans le cadre du dispositif France Relance », explique la coordinatrice. Cette matinée participe à « sensibiliser les enfants à la préservation de l’environnement et notamment des coraux en ayant la possibilité de manipuler cet animal, savoir comment il grandit, de combien de centimètres », détaille Aline Tribollet. Les deux classes de Petite-Terre incluses dans ce projet suivent depuis la rentrée 2021 des animations réalisées à l’école par les scientifiques que ce soit sur le corail, le fonctionnement des récifs coralliens, ou encore sur les menaces qui dégradent les écosystèmes. « On leur a appris à suivre un protocole scientifique comme des vrais scientifiques en herbe », témoigne la biologiste-écologue.
Atelier de bouturage et photogrammétrie
Des petites piscines sont progressivement installées sur le sable de la plage et remplies d’eau, « il ne faut pas que les coraux restent hors de l’eau trop longtemps, cela les abîme », indique François Guilhaumon, modélisateur-écologue des récifs coralliens. Par petits groupes, les enfants s’installent autour de ces piscines. Les explications débutent, « vous allez prendre un corail, et vous allez le coller sur un plot de calcaire et ensuite le positionner dans les interstices de la grille ».
Studieux et méticuleux, les élèves munis de gants suivent les instructions sous le regard
observateur de l’équipe encadrante. Une fois l’atelier bouture terminé, le groupe d’enfants s’adonne à la photographie pour la réalisation d’une photogrammétrie. Ce procédé permet à partir de dizaines de photos de modéliser en 3D le corail et d’étudier la vitesse à laquelle il grandit, en comparant les évolutions dans le temps. Une fois les photos prises, les coraux seront replacés dans l’océan sur leur grille support avant d’être à nouveau observés fin juin. « Les données de ce suivi recueillies à partir de la photogrammétrie, indique le site de l’IRD, seront utilisées pour mesurer la capacité des matériaux artificiels à favoriser la croissance du corail ». En effet, la finalité de ce projet est également de participer, d’ici quelques mois, à la co-construction d’un nouveau sentier marin éducatif à Grande Terre.
« Il faut que la population soit avec nous pour arriver à sensibiliser sur les effets de la dégradation de l’environnement »
D’ailleurs, le 28 du mois prochain, les élèves vont restituer leurs travaux et observations auprès du grand public lors d’une exposition avec l’équipe scientifique sur le parvis du Comité de Tourisme de Mamoudzou. « Il faut que la population soit avec nous pour arriver à sensibiliser sur les effets de la dégradation de l’environnement, considère Aline Tribollet avant de poursuivre, ce n’est pas un hasard si nous avons choisi Musical plage ». Son collègue François Guilhaumon abonde, « on ne peut protéger que ce que l’on aime, on aime que ce que l’on connaît ».
Présent sur les lieux, le recteur Gilles Halbout a salué cette initiative, « nous sommes à la fois dans la transmission de savoir et l’éveil des consciences sur tous les enjeux de préservation de l’environnement. Il est important que des chercheurs de haut niveau puissent expliquer aux élèves les enjeux de la préservation des écosystèmes. On prépare le monde de demain ». Le projet impliquant également deux classes d’élèves de la banlieue parisienne, réalisant du bouturage de corail en milieu contrôlé,à l’Aquarium tropical du Palais de la Porte Dorée à Paris, Aline Tribollet espère « trouver le budget afin de réaliser un échange depuis la métropole vers Mayotte et de Mayotte vers la métropole ».
Pierre Mouysset
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