Né en 2015 du cerveau d’Edith Semmani, dont le cœur de métier est la communication, le concours « Femmes précieuse » est « un projet de cœur » dont l’objectif est le partage et l’échange « avec l’espoir de susciter chez les jeunes l’envie de se dépasser et d’entreprendre », explique sa conceptrice sur son site.
Sur la dizaine de prix remis à des femmes d’exception, l’un a été créé pour élargir le lien à la région, le trophée « Ile Vanille », intégrant Maurice et Rodrigues, et s’est étendu cette année à Mayotte. IL a été attribué à Jacqueline Guez, gérante de Clap Production. Un choix qui n’a rien d’anodin, vu le profil pas du tout politiquement correct de la lauréate.
« Je ne m’y attendais pas, je ne sais même pas comment ils ont entendus parler de moi », nous confie-t-elle au téléphone alors qu’elle vient d’atterrir à Mayotte. A coup sûr, le séisme Colocs aura-t-il atteint plus que les côtes réunionnaises, pour entrer dans les foyers, et pas seulement de la communauté mahoraise de La Réunion.
Et c’est d’ailleurs fidèle à son franc parler qu’elle livre un court discours lors de la remise du prix ce dimanche : « Pour une fois, Mayotte est représentée à La Réunion en bien, où notre territoire reste mystérieux, qui fait parfois la une de la presse et pas en bien ! » Un rire autant confus que diffus parcourt la salle. Et c’est précisément ce prix dans un contexte difficile qui l’a marqué, « ce qui m’a le plus touché, c’est que les rapports entre La Réunion et Mayotte sont compliqués, et qu’ils sont quand même attentifs au fait que des gens se bougent à Mayotte. Et qu’ils m’aient choisi moi, qui dis les choses crument, c’est incroyable. »
Elle créée une bourse d’études cinéma
L’événement est parrainé par la région Réunion et par plusieurs grosses sociétés réunionnaises.
Elle, elle se veut le porte-drapeau de l’engagement des femmes, « je veux mettre des mots sur les maux de ma société », avec son arme, la caméra… et l’humour. C’est ce qui transpirait dans les épisodes de ‘Colocs !’, où 4 filles refaisaient le monde, leur monde, en cassant les codes pour tenter de trouver leur place entre tradition et modernité. L’une d’elle était issue d’un quartier de cases en tôles de Kawéni, « c’est ça aussi que je veux montrer ».
Cela lui permet d’ailleurs d’être accompagnée financièrement par la Politique de la Ville, la Délégation des droits des femmes, « je suis en attente de la réponse de France TV pour lancer la saison 2 de ‘Colocs !’ ».
En attendant, Jacqueline Guez œuvre à la création d’une vraie filière cinéma à Mayotte, et pour cela, il fallait encourager les jeunes à se lancer dans ces études en métropole ou à La Réunion. « J’ai monté une bourse d’étude, qui délivre 1.500 euros chacun à 4 jeunes qui se lanceront dans cette voie de l’audiovisuelle, car acheter son matériel, les caméras, les logiciels de montage, c’est pas rien. Il faut créer une main d’œuvre locale. » C’est la première fois qu’un privé soutient ainsi le démarrage d’une filière.
Et son prix à la main, la jeune femme rêve plus loin, « celui d’un studio de cinéma à Mayotte ».
Anne Perzo-Lafond
Comments are closed.