Pour résumer avant de détailler, c’est le passage au droit commun avec les transferts financiers qu’il implique, qui maintient la croissance à Mayotte. Le secteur privé est toujours peu présent dans ces données qui datent de 2011.
Le chiffre du Produit Intérieur Brut (PIB), indicateur de la production d’un territoire vient d’être connu pour 2011 à Mayotte : il est de 1,57 milliard d’euros. Donc encore très faible puisque, rapportée à chaque habitant, la richesse est de 7 900 euros, contre 15 100 euros en Guyane, « le plus touché des départements après Mayotte », souligne Christian Monteil, responsable des Comptes à l’INSEE Réunion.
L’INSEE qui vient de fournir ce chiffre très attendu, mais dont il faut relativiser l’analyse puisqu’il date de 2011, indique une croissance très dynamique depuis 2005, soit 8,7% par an. La comparaison n’a pas été faite à partir de 2009, dont on a pourtant le montant, « par manque de temps et d’investissement méthodologique », explique Christian Monteil, qui vient travailler dans notre département deux fois par an.
Le premier des constats, est que l’administration publique porte plus que jamais la croissance. Sa contribution était de moitié en 2009, « elle est de 60% en 2011 essentiellement par le doublement de fonctionnaires payés par l’Etat, l’implantation de nouvelles administrations et l’augmentation des prestations sociales ».
Seul le BTP moteur chez les ménages
On peut donc toujours parler de développement économique de transfert depuis la métropole. Surtout que, pendant ce même laps de temps, l’investissement n’a pas évolué, puisqu’il n’augmente que de 15% depuis 2005. Avec une nuance, « il est très dynamique chez les ménages en raison de constructions neuves », mais reste quasiment stable pour les sociétés, et en régression chez les administrations publiques, « les problèmes du Conseil général, principal investisseur peuvent l’expliquer, mais les grèves de 2011 aussi ».
Dernière des composantes du PIB, le commerce extérieur est, on le sait fortement déficitaire à Mayotte où l’on ne fait que réexporter.
Autre moteur de la croissance, la hausse du revenu par habitant qui atteint 5 500 euros (PIB auquel on ajoute les transferts sociaux et retranche les impôts), qui n’est donc pas à imputer au développement du secteur privé, mais aux transferts nationaux. « Ce revenu est quasiment alloué à la consommation des ménages qui augmente dans la même proportion ». Leur pouvoir d’achat aurait ainsi augmenté de 35%. Pour ramener ces chiffres au nombre d’habitants, les économistes ont estimé l’évolution de la population à partir des recensement de 2007 et 2012 ».
Défaut de jeunesse
L’état des lieux fourni par l’INSEE ce lundi matin est donc peu réjouissant. Mais il aurait mérité d’être enrichi par une comparaison avec les autres DOM. Mayotte est en effet un tout jeune département (2011) quand ses sœurs ultramarines le sont depuis 1946. Or à La Réunion en 1990, la part des dépenses publiques contribuait à 74% du PIB. Il est donc possible que ce soit un défaut de jeunesse, mais il faudra réussir ce que les autres départements comme La Réunion ont entrepris : transformer cet apport financier de métropole pour créer des filières et se doter de leviers de croissance.
Car Mayotte se fait rattraper par Maurice où les dépenses publiques ne s’élèvent qu’à 13% du PIB, et qui dispose donc d’un potentiel de développement bien supérieur. Mayotte conserve néanmoins des atouts non encore mis en valeur, le tourisme notamment.
On peut dire merci à l’Europe et au passage de Mayotte en RUP (Région européenne) : si les chiffres des PIB 2012, 2013, 2014 doivent sortir plus rapidement, « c’est une exigence communautaire. Pour que le territoire accède aux Fonds de convergence, le PIB du territoire doit être inférieur de 75% à la moyenne européenne ».
Le département bénéficiera donc d’une réactualisation des chiffres chaque année.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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