Ce n’est qu’un début. Le passage au droit commun et l’arbitrage national qui déshabille, si peu, les communes riches, pour habiller les plus déshéritées, bénéficient à Mayotte. Mais, un débat est en cours sur une évolution de ce système, et les parlementaires ont leur rôle à jouer.
La loi de finances est décortiquée, ces lundi et mardi, pour les agents territoriaux par un expert et formateur en finances locales, Alain Guengant, également directeur de recherche honoraire au CNRS.
Chaque année, à l’invitation du CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale), il se colle à l’exercice, qui devient particulier cette année où Mayotte passe en fiscalité de droit commun. Le 101e département a maintenant intégré les DOM et ne fait plus partie des Collectivités d’outre-mer comme c’était le cas auparavant. Une mutation bénéfique pour notre département, surtout pour ses communes, même si certaines s’en sortent mieux que d’autres.
Tout d’abord, il fallait répéter que les outre-mer ne sont pas concernés par la réduction de 11 milliards d’euros, 12 en réalité, sur trois ans des dépenses de l’Etat vers les collectivités locales.
Ensuite, les communes les plus déshéritées, la plupart des ultramarines, bénéficient de la solidarité nationale de leurs sœurs mieux nanties de métropole : « les communes de Mayotte dont la population augmente voient s’accroître leur dotation globale de fonctionnement. Mais ce n’est pas l’Etat qui finance, ce sont les communes les mieux nanties », explique Alain Guengant. Un désengagement de l’Etat qui se confirme donc, grâce à une péréquation nationale.
Par le même système de financement, les communes en difficulté en métropole et toutes les ultramarines bénéficient d’un accroissement de 11,6% d’une autre dotation de péréquation.
7 communes mieux servies
Enfin, 7 communes de Mayotte ont reçu en 2014 des subsides d’un autre fonds, le FPIC (Fonds de péréquation des ressources intercommunales) : Mamoudzou, Koungou, Pamandzi, Dzaoudzi, Sada, Ouangani et Chiconi, versé sous condition de ressources. Par exemple, 918.000 euros ont abondé les caisses de Mamoudzou et 780.000 euros pour Koungou. Cerise sur le gâteau, «les communes bénéficiaires peuvent espérer 40% de supplément l’année prochaine».
La réduction de la contribution de l’Etat à l’ensemble des communes métropolitaines étant en baisse, le risque de voir s’infléchir les investissements est grand, d’où la mise en place d’une dotation d’équipement des territoires ruraux, abondée de 36 millions d’euros en 2015 par l’Etat cette fois, applicable dans les DOM, «uniquement sur projet d’investissement».
Nous bénéficierons également de la dotation d’équipement des territoires ruraux que l’Etat abonde cette fois de 36 millions d’euros en 2015 pour l’ensemble des communes rurales, « mais sur projet d’investissement ».
140 euros par habitant à Mayotte
Ce n’est plus le département qui est le destinataire final de l’octroi de mer, mais les communes qui bénéficient de 10 millions d’euros, mais plafonnés, ce qui les avait fait monter au créneau.
Enfin, les prestations comme le RSA, la solidarité logement ou l’aide sociale aux handicapés et personnes âgées, traduisent la difficulté d’évaluer le volume de bénéficiaires.
Le fonds d’amorçage à la mise en place des rythmes scolaires est donc maintenu à 90 euros par élève pour les communes défavorisées.
Des transferts qui vont permettre de redonner du souffle aux communes car avec 140 euros par mois par habitant Mayotte est encore loin du compte puisque « les dotations globales pour la Guyane et La Réunion sont 3 à 4 fois plus élevées ».
Pour l’année prochaine, une réforme en profondeur de ces dotations se prépare, avec la nomination d’une mission parlementaire, composée de Christine Pires Beaune et Jean Germain. Elle prend place dans un contexte de baisse des dotations donc, et ne laisse pas d’interroger le député guyanais Georges Patient, « les communes d’outre-mer ont-elles intérêt à conserver ces dotations ou à passer sous le droit commun ? »
Une certitude pour Alain Guengant, le dernier mot ira au Comité national des finances locales, composé d’élus locaux. Si Mayotte a des doléances, c’est à cette porte qu’il faudra frapper…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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