La démolition promise par la mairie à la première heure a débuté très tôt ce matin : à la mi-journée, il ne reste déjà plus grand-chose de ce qui fut jadis l’unique marché du littoral à Mamoudzou.
Les engins de chantier, tractopelles, camions de l’entreprise de recyclage Enzo, démolisseuses, étaient à l’œuvre dès 6 heures. Certains commerçants avaient œuvré jusqu’à tard hier au soir pour retirer leur marchandise et récupérer leurs tôles. Il s’agit pour la mairie d’offrir une meilleure image de la commune chef-lieu, notamment devant les sorties des barges et amphidromes.
Si la déconstruction de ce qui fut le marché jusqu’à l’avènement du bâtiment couvert avait commencé dans le calme ce mardi matin, les tensions se faisaient peu à peu jour : « nous n’avons pas eu le temps de récupérer nos affaires ! », râle Roukia, une commerçante malgache qui ne veut pas, avec d’autres, rejoindre le périmètre de sécurité imposé par la police municipale, qui reçoit pour l’occasion le soutien de la police nationale.
Et pourtant, le préavis de la mairie avait été placardé sur les barrières depuis plusieurs jours. Si elle évoque le temps pluvieux d’hier, « on n’a pas pu charger les camionnettes », ses voisines glissent qu’un avocat, dont personne ne connaît ou ne dévoile l’identité, leur aurait conseillé de tout laisser en place.
Des patentes non patentées…
La perte est sèche et il est difficile pour ces hommes et femmes de voir leur marchandise partir en lambeaux. Qu’ils s’appellent, Ismaël, Roukia ou Ahmed, tous affirment être en situation régulière et payer une patente : « moi c’est 90 euros par an pour vendre mes fripes », indique Ismaël, « 418 euros », dixit Roukia pour des fantaisies et des tissus. Une charge qu’ils affirment tous payer à la Chambre de Commerce, en montrant du doigt le grand bâtiment blanc.
C’est pourtant difficile, « nous ne gérons que le marché couvert, et en aucun cas le périmètre extérieur. Les commerçants ne paient rien à la CCI », nous ont affirmé les services de la Chambre.
Par ailleurs, les commerçants ont discuté avec le maire, « nous sommes 47 à vendre des vêtements, il nous faut un autre emplacement. Sinon, nous resterons chez nous à rien faire ». Pour d’autres, c’est seulement un revenu d’appoint, « nous travaillons tous les deux, quelqu’un tenait la boutique pour nous ».
Une présence qui était devenue gênante pour les commerçants du marché couvert qui dénonçaient régulièrement cette concurrence déloyale, sans parler des odeurs nauséabondes qui s’échappaient du tas d’ordures régulièrement entreposé aux abords.
En dehors d’une personne qui s’est blessée en voulant récupérer ses tôles, la destruction du marché se poursuit, dans un grand fracas de tôles d’un côté, et d’allers et retours de camionnettes chargées de marchandises diverses de l’autre.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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