Quatre syndicats, CGT, FO, FSU et Solidaire ont lancé un appel à une manifestation « anti austérité » ce jeudi 9 avril partout en France. Si l’appel se voulait unitaire, à Mayotte les enseignants portaient leurs propres revendications.
Bien que peu étoffée pour une manifestation censée drainer les trois fonctions publiques, elle symbolisait ce jeudi matin une revendication sociale profonde. A la fois nationale avec le principal mot d’ordre de refus de la politique d’austérité du gouvernement, la grève de ce jeudi 9 avril recouvrait aussi des revendications plus locales, portées essentiellement par les enseignants.
Le mot d’ordre qui garantissait l’unité interprofessionnelle de cette journée est le gel du point d’indice des fonctionnaires depuis 2010 et la dégradation des conditions de travail.
Si les syndicats nationaux n’avaient que peu protesté lors de cette décision de blocage des salaires et de sa reconduite par la ministre Lebranchu, c’est que l’argument d’une solidarité nationale face à une croissance zéro et au sein d’une politique d’austérité pour tous était recevable. Ils estiment maintenant que leur pouvoir d’achat a été anormalement imputé, pour n’avoir pas suivi une inflation, pourtant faible voire négative.
Pour le SNES-UNSA local, le préjudice est bien plus grand qu’on ne le pense : « alors que ce pays compte 5 millions de chômeurs, 30% des concours du CAPES, le certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré, ne trouvent pas preneurs ! Forcément, les profs à Bac plus 5 touchent à peine 10% de plus que le SMIC, et doivent gérer des classes et des comportements de plus en plus difficiles », s’enflamme Thierry Wuilliez, le secrétaire général SNES FSU de Mayotte.
Plus de contractuels que de titulaires
Une situation qui sévit aussi à Mayotte, aggravée par le problème d’attractivité que l’on connaît : « 800 postes ne seront pas pourvus à la prochaine rentrée. Le vice-rectorat a de plus en plus recours aux contractuels. D’ici deux ans, ils seront plus nombreux que les titulaires, en dehors d’un collège préservé pour les mzungus qu’est K2 », accuse le syndicaliste.
D’autre part, et selon un enseignant de Chirongui, certains postes vacants n’apparaîtraient pas au mouvement, empêchant des enseignants éventuellement intéressés en métropole de répondre : « Mayotte est une variable d’ajustement financière, il faut que ça coute le moins cher possible, peu importe si on sacrifie la qualité d’enseignement. Qu’on ne nous dise pas que le service public est le même parce que nous sommes département ! », critique Thierry Wuilliez. Ils appellent également le gouvernement à concrétiser sa promesse sur une renégociation des salaires, la fameuse « clause de revoyure ».
Autour des questions statutaires et de rédaction des conventions collectives, bien d’autres services sont dans la rue : les fonctionnaires des transports, des services fiscaux, de la douane, « nous ne voyons pas la santé », lance un gréviste, le représentant des retraités, « des retraites qui ne dépasse pas 170 euros par mois pour certaines ». Pour eux, et El Anziz Hamidou s’en fait le porte-voix, « le Pacte de responsabilité, la réforme territoriale, la loi Macron, sont au service du capital. Non ! Karivenze (nous n’en voulons pas) ».
Ce sont ces constats que les syndicalistes sont allés porter en préfecture où ils étaient reçus depuis 11 heures. “Nous avons écouté les doléances que nous ne pouvons régler à notre échelle. Nous avons fait remonter à Paris”, rapportait à l’issue Jean-Pierre Frédéric, directeur de cabinet du préfet.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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