Une application internet s’apprête à faire entrer le tribunal administratif de Mayotte dans le 21e siècle. Toutes les démarches sont dématérialisées mais pas encore pour tout le monde.
La conseiller d’Etat Anne Guérin a fait le déplacement de Mayotte. La présidente de la cour administrative d’appel de Bordeaux est venue se joindre à Bernard Chemin, le nouveau président des tribunaux administratifs (TA) de Saint-Denis et de Mayotte pour engager l’océan Indien dans la voie de la dématérialisation des démarches.
L’affaire est importante : après la métropole qui remplace les dossiers papiers par des démarches via internet depuis décembre 2013, l’Outre-mer s’y met à son tour. Avant les Antilles-Guyane en décembre et le Pacifique en 2016, nous sommes les premiers à basculer «dans le tribunal administratif du 21e siècle».
«J’avais déjà pris mon bâton de pèlerin, en novembre 2013, pour faire ce travail auprès des juridictions de métropole. A l’époque, on ne savait pas réellement quelle avançait cela représentait», indique Anne Guérin.
«En démarrant après la métropole, l’Outre-mer bénéficie d’une version améliorée du service, avec de nouvelles fonctionnalités et une sécurité totalement validée», explique Anne Guérin. Hier mardi, elle présentait l’application devant l’ensemble des services de l’Etat, les principales collectivités locales, les chambres consulaires et des institutions, de l’AFD au CHM, rassemblées au vice-rectorat. Ce mercredi, c’était au tour des avocats de bénéficier de cette présentation.
Pas pour tout le monde
Cette application s’appelle «Télérecours». Elle permet une transmission des requêtes par voie électronique, aussi bien en première instance, en appel que vers la Cour de cassation. Tous les contentieux, toutes les pièces pour tous les actes de l’instruction sont concernés.
Tous les justiciables ne peuvent pas encore l’utiliser. Premières visées : toutes les administrations de l’Etat ou des collectivités territoriales, leurs établissements mais aussi les organismes de droit privés chargés d’une mission de service public comme la CAF (caisse d’allocations familiales).
Les avocats signent une convention
Les avocats vont également intégrer le dispositif. A l’issue d’une formation de deux heures, ce mercredi matin, le bâtonnier Nadjim Ahamada a signé très officiellement une convention dans ce sens. «C’est quelque chose d’extrêmement important pour moi, une vrai joie», a confié le président Bernard Chemin. «Je partage la même satisfaction. La volonté du barreau de Mamoudzou est de se moderniser, de suivre le processus de dématérialisation des procédures. Ca va être un gain de temps et d’argent pour les avocats et ça va donner plus de fluidité dans l’instruction des procédures.»
En revanche, les justiciables qui se s’appuient pas sur les services d’un avocat devront continuer à utiliser les démarches classiques, sur papier et par courrier. Cela concerne environ la moitié des dossiers car, comme le rappelle la Conseiller d’Etat, «nous sommes le juge du RSA, du droit au logement, des employés auxquels on refuse une assurance chômage… Toute une catégorie de justiciables pour lesquels l’accès internet pourrait être plus difficile.»
Cette ouverture interviendra probablement l’année prochaine.
Une plus grande proximité
Le tribunal administratif de Mayotte sera opérationnel dès le 8 juin, jour de lancement officiel de la plateforme dans l’océan Indien, les mises à jour techniques, les équipes et les formations des personnels ont été effectuées. Mais certains n’ont pas attendu. La formule des démarches dématérialisées est déjà utilisée par la préfecture de Mayotte qui compte une trentaine de dossiers non-papier, en cours d’instruction à la cour de cassation à Paris.
Parmi les conséquences, on pourrait assister à l’augmentation du nombre de dossiers jugés en appel à Bordeaux. «Je ne serai pas surprise que l’effet de distance qui dissuade probablement beaucoup de justiciables soit atténué», indique Anne Guérin. Ce serait finalement, grâce à la dématérialisation, le signe d’un fonctionnement plus démocratique de nos institutions.
RR
Le Journal de Mayotte
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