Les premiers jeunes dirigeants d’entreprise à avoir adhéré au CJD, ont reçu mardi soir à Dembéni, des clefs pour manager au mieux leurs équipes. Une master class sans cours magistral, mais avec une preuve par le foot.
Ou par l’arbitrage plus exactement. En dressant un parallèle constant entre l’homme en noir (en jaune ou rouge aussi de nos jours), et le chef d’entreprise, Olivier Lamarre maintient son auditoire dans une attention constante pendant plus d’une heure.
C’est un conférencier qui cumule deux grosses casquettes qui était à Mayotte : Directeur adjoint de la Division de la production nucléaire chez EDF et arbitre en Ligue 1 de foot jusqu’en 2009. Deux expériences qui se sont télescopées pour qu’il contribue à amener le groupe de 23 000 salariés vers le meilleur, et tendre vers l’excellence. Détails utiles, « 11% de la masse salariale sont consacrés à la formation, et 1 600 jeunes sont recrutés chaque année », informe le numéro 2 du Parc nucléaire français.
C’est le Centre des jeunes Dirigeants d’entreprise (CJD) de Mayotte qui a initié cette démarche. Plus particulièrement Yacine Chouabia, Directeur général d’Électricité de Mayotte, qui en est membre, et qui avait déjà suivi cette démonstration.
Aux premiers abords, c’est à dire pendant les 10 premières minutes, les termes utilisés peuvent dérouter, typiques des directions de ressources humaines avec l’énoncé des cinq fondamentaux du bon leadership : « incarner la primauté-sûreté, anticiper et piloter les performances, montrer un focus opérationnel, faire confiance, écouter, responsabiliser et enfin, être exemplaire ».
Un carton rouge assumé
Mais avant même que le cerveau soit engourdi par des termes génériques, Olivier Lamarre s’impose : chacun des invités doit se mettre dans la peau d’un « manager-arbitre ». La greffe de ces deux personnages en un prend immédiatement avec la diffusion d’extraits de matchs.
Des exemples permanents de situations concrètes, houleuses même, que peut traverser un arbitre-chef d’entreprise ou toute personne en situation managériale.
Olivier Lamarre est à l’écran, il arbitre un match retransmis sur Canal+, lorsqu’un joueur réputé pour son fair play, commet une faute grave. La première réaction des commentateurs télé est d’appeler au carton rouge. Mais lorsqu’Olivier Lamarre le brandit, ils nuancent aussitôt, « c’est trop sévère pour ce grand joueur ». Ce qui amène le sportif-dirigeant à transposer au monde de l’entreprise, « en particulier en cas de conflits sociaux. Tout en manifestant ouvertement leur désapprobation pour une sanction contre un employé fautif, au fond d’eux, les salariés se disent ‘s’il ne réagit pas, il ne fait pas son boulot de leader’ ».
La mauvaise décision
Ce qui suppose une bonne connaissance de la loi, et des jurisprudences associées. Yacine Chouabia avait prévenu en préambule, « être dirigeant, ça s’apprend ! ». C’est même le mobile de la création du CJD.
Il faut aussi savoir à l’avance qui est le créateur et qui va être l’enquiquineur dans l’entreprise, « vous n’envisagez pas un Laurent Blanc qui ne va pas dire un mot en mâchouillant un chewing-gum sur son banc, comme un autre ».
Être humble aussi, « comme cet arbitre anglais, le meilleur du monde, qui accorde un penalty à tort, qui élimine de fait les Polonais du championnat ». Constat dudit arbitre, transposable là aussi : « on prend tellement de décisions, qu’il faut accepter d’en prendre une moins bonne. »
Un p’tit jeune qui sauve la situation
Mais en pleine action, quand l’erreur est repérée par tout un public-personnel, qui hurle « houhou » dans un stade ou dans les couloirs, il faut se dégager de l’action, recommande notre arbitre-manager, qui propose deux techniques : se concentrer sur une image positive que l’on a choisi à l’avance, pour irriguer le cerveau d’un flux bénéfique et se concentrer immédiatement après sur l’action, ou bien se projeter sur la seconde d’après, sur l’action à venir.
Enfin, le travail en équipe était mis en évidence avec cette faute grave, hors de son champ de vision, qui lui a fait sortir un carton rouge à la grande surprise des médias présents, « l’arbitre de remplacement l’avait vu, un petit jeune que j’avais mis en confiance et qui a pu assumer son rôle en m’informant par micro interposé. Les jeunes ne doivent pas être écartés dans l’entreprise sur un mode, ‘regarde et prends des leçons’ »
Ce ne sont que quelques exemples de la démonstration brillante à laquelle trop peu de monde a pu assister ce mardi soir, mais qui marquera les esprits des deux conseillers départementaux présents, du sénateur Thani Mohamed Soilihi, et des membres du CJD.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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