L’équipage et le navire malgaches remorqués le 15 juin dernier sont toujours coincés à Longoni. Des avancées sont peut-être attendues demain du côté administratif. La solidarité alimentaire commence à se tarir.
«C’est comme si on était pris en otage. On ne sait pas quand on va être libérés». Jaotombo Romel, le capitaine de l’embarcation malgache bloquée au port de Longoni est désespéré. Depuis le 15 juin, son boutre et les 8 membres qui l’accompagnent sont coincés dans le port de Mayotte, bloqués par les différentes législations qui régissent le secteur de la mer mais aussi les entrées et sorties du territoire.
Ils sont arrivés à Longoni après un appel de détresse : leur boutre qui effectuait une liaison commerciale entre Majunga (Madagascar) et Moroni (Comores) était victime d’une avarie de propulsion. Il était alors remorqué vers le port mahorais.
Problème : le bateau ne répond à aucune norme internationale et, à Mayotte, aucune institution ne veut ni ne peut engager sa responsabilité face aux risques évidents d’un départ en mer du navire. Son état évoquerait plutôt celui d’une épave… qui n’aurait même pas d’ancre.
Manger froid
Voici donc le boutre et ses hommes coincés, et pour longtemps. 41 jours après, peu de choses ont changé. Seuls, les 4 passagers ont été acheminés à Anjouan, le 5e ayant disparu dans la nature.
Les 9 membres d’équipages vivent sur leur embarcation, avec les moyens du bord et la solidarité. «Le réchaud à gaz ne fonctionne même plus», se désole le capitaine qui s’inquiète aussi de ne plus avoir grand-chose à se mettre sous la dent.
L’élan de solidarité –Sodifram, Lion’s Club, Croix rouge et Secours catholique- a permis à l’équipage de disposer de denrées alimentaires. Mais la situation ne peut pas durer éternellement et les associations ont indiqué à l’équipage que d’autres solutions devaient être trouvées.
Nouveau rendez-vous demain mardi
«Nous ne sommes pas payés, on ne peut rien faire ! Le patron dit qu’il n’a pas d’argent et il ne veut rien donner, ni à nous ni à nos familles. Mais on ne peut pas vivre sans salaire», s’indigne Fabien Ramaharo Manana, mécanicien graisseur à bord du boutre.
Normalement, le capitaine est payé 400 euros par mois, les matelots environ 80 euros. Mais depuis le remorquage, leur contrat s’est terminé. Officiellement, ils ne travaillent donc plus pour l’armateur depuis le 30 juin dernier. «Il doit se débrouiller pour faire venir une relève et nous rapatrier à Majunga», tranche le capitaine… pas vraiment certain de pouvoir obtenir gain de cause.
Le capitaine et les matelots se sont rendus vendredi à la préfecture puis aux Affaires maritimes. Ils doivent y retourner ce mardi en espérant que les autorités françaises trouvent enfin une solution à leur invraisemblable situation.
Oignons pourris
A présent, le capitaine affirme avoir réparé la fuite de gazole qui avait provoqué l’avarie. Il serait donc en mesure de quitter Mayotte pour rejoindre Moroni. Mais l’Union des Comores, dont le pavillon flotte sur le bateau, doit donner son accord pour laisser partir le navire.
Plusieurs clients, à Madagascar et aux Comores, qui avaient confié leurs produits pour les faire transiter par le boutre, auraient porté plainte contre le propriétaire du navire, pensant que l’équipage avait détourné les marchandises. Elles sont pourtant encore bien à bord mais «les oignons sont complètement pourris».
RR
Le Journal de Mayotte
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