La pêche est un des dossiers économiques de première importance pour Mayotte. Les représentants des pêcheurs et du Parc naturel marin ont été reçus, la semaine dernière, par les plus hautes autorités européennes pour faire valoir les intérêts mahorais.
L’invitation a été formulée officiellement et de vive-voix par Régis Masséaux, le vice-président du Parc naturel marin de Mayotte et entrepreneur du secteur de la pêche (Captain Alandor). Elle a été acceptée. La Commissaire européenne chargée des affaires maritimes et de la pêche, María Damanáki, devrait venir à Mayotte dans les semaines qui viennent.
Le rendez-vous bruxellois organisé la semaine dernière par le Parc naturel marin entre les professionnels mahorais de la pêche et les plus hautes autorités européennes a permis de faire le point sur nombre de dossiers : la question des équipements avec le ministère français de la pêche, la RUPéïsation avec le staff de la commission européenne, les intérêts économiques du secteur avec des députés européens et EuroDom la structure qui représente les départements d’outre-mer auprès de l’Union. Les Mahorais ont donc même réussi à échanger avec la Commissaire en personne.
Visite européenne pour des eaux européennes
L’actualité du secteur est propice à la visite. Au 1er janvier, les eaux mahoraises passent sous gouvernance européenne. Et l’Union a anticipé : il y a tout juste une semaine, l’UE a signé avec les Seychelles un «accord d’accès de pêche».
Il autorise huit thonniers battant pavillon seychellois à opérer dans les eaux de Mayotte pour les six prochaines années. La contrepartie : le paiement de droits versés par les propriétaires des navires. «Lorsque nous avons obtenu la limite des 100 miles à l’intérieur de laquelle tout le monde ne peut plus pêcher, nous savions qu’il y avait des navires qui y opéraient, explique Régis Masséaux. Ils peuvent continuer à y travailler.» Dans cette zone, cependant, on ne peut pas accentuer la pression de pêche. Le nombre de bateaux ne pourra donc qu’être amené à diminuer.
Mayotte à part dans le paysage «européen»
«Le secteur est ici très différent de ce qui existe en Europe, d’abord parce que nous sommes les seuls à avoir des pirogues en bois, rappelle Pierre Baubet, le président de la COPEMAY. Ensuite, les politiques européennes visent à mettre en place une pêche durable. Elles sont donc dans des logiques de limitation de la flottille. Nous, on part de beaucoup plus loin et nous demandons l’inverse. Ce que nous devons obtenir ce sont des fonds pour permettre son développement.»
Problème : autour de nous, nos voisins développent de véritables industries de la pêche, auxquelles l’Europe apporte de solides contributions. «Mayotte est le parent pauvre de la région en matière de pêche, plaide Régis Masséaux. Les thonniers des Seychelles prélèvent environ 6.000 tonnes par an. A Moroni, on construit une usine de 5.000 m² pour traiter 11.000 tonnes de pêche annuelle. Si on rajoute les Malgaches et les Mauriciens, on obtient une masse de pêche très importante dans la zone à un niveau industriel. Pendant ce temps, à Mayotte, la volonté est de favoriser les petits pêcheurs avec des bateaux de moins de 12 mètres. A côté des industries voisines, on nous condamne à faire des ‘poissons vie chère’ !»
Manques d’équipements frigorifiques, de quais de déchargement, d’approvisionnements en matériels ou de zone de vidange et de traitement des huiles… Le chemin est encore long pour la mise en place d’une industrie dans le secteur à Mayotte. Et si on attend beaucoup de l’Europe, la France en général et Mayotte en particulier vont devoir s’impliquer pour combler notre retard régional.
«C’est la politique des petits pas, admet Pierre Beaubet. C’est déconcertant mais ça avance. Plus la machine est lourde en face, plus il faut de l’énergie pour faire avancer les dossiers.»
RR
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