Ils étaient 56 candidats venus de toute la France (métropole et outre-mer) dont 7 Mahorais à avoir postulé à la direction de la Société immobilière de Mayotte (SIM). C’est finalement le DG par interim qui a convaincu. A 47 ans, pour Ahmed Ali Mondroha, c’est l’aboutissement d’un parcours à valeur d’exemple.
Des quatre candidats qui composaient le carré final, le conseil d’administration a donc opté ce vendredi matin pour Ahmed Ali Mondroha. Il a été élu directeur de la SIM, sans aucune voix contre lui. «C’est une consécration bien sûr, une forme de continuité aussi, même si j’ai déjà amorcé quelques virages», reconnait-il.
Le poste reste donc à un Mahorais ce qui n’était pas acquis… «Mahorais, ce n’est pas un diplôme», pose d’emblée le nouveau directeur.
Et de fait, lorsqu’on parcourt les 3 pages du CV du successeur de Mahamoud Azihary, les formations comme l’expérience ne manquent pas. «J’ai fait des études d’économie assez classiques et comme beaucoup de Mahorais qui rentraient à Mayotte à la fin des années 90 avec un DEA, je ne savais pas trop quoi faire», raconte Ali Ahmed Mondroha. Après un bref passage en tant que responsable des ressources humaines au SMIAM, il entre à la BFC où il entame un parcours exemplaire dans la banque.
Responsable du service caisses, puis commercial, gestionnaire de comptes de particuliers et d’entreprises et finalement chargé d’affaires à Mayotte, il part à La Réunion. Son contrat est prévu pour 4 ans mais il revient finalement 2 ans après pour reprendre le poste vacant de responsable du marché entreprises. Nous sommes alors en 2007. «C’était une belle promotion et en même temps, je rentrais au pays», explique-t-il. De fait, il occupe alors le poste de numéro 2 de la banque à Mayotte.
Un banquier à la SIM
Mais les choses ne se passent pas aussi bien que prévu. Tandis que les désaccords se multiplient avec sa direction générale, il apprend que le nouveau directeur général de la SIM, un certain Mahamoud Azihary, cherche un directeur financier. C’est pour lui le début de l’aventure de la SIM, «un beau challenge» alors que Mahamoud Azihary lance le redressement la SIM. «Je lui apporteais mon expérience de banquier. Et parmi toutes les choses à faire, reprendre les relations avec les banques était quelque chose de très naturel pour moi».
Du redressement, la SIM repart dans une phase de production, «huit ans passionnants» où il découvre tous les aspects de la société et multiplient, encore et toujours, les formations. Jusqu’au mois de mai dernier où le patriarche Azihary, à peine installé dans son nouveau bâtiment flambant neuf, n’est pas reconduit.
«En prenant la direction par interim, j’ai tout de suite fait savoir que je pouvais aussi être candidat», reconnait-il. «J’ai pris ce moment comme une chance, comme un test. Ca aurait pu ne pas bien se passer. J’aurais pu arriver à la conclusion que je n’étais pas prêt.» L’histoire démontera le contraire.
Nouveau style, nouvelles stratégies
Apprécié et soutenu au sein de la société, Ahmed Ali Mondroha a rapidement imposé un nouveau style. Probablement moins flamboyant que son prédécesseur, il ouvre une nouvelle époque de la gouvernance de la SIM. «Je me situe à un niveau opérationnel. Je ne fais pas de politique. Il y a des élus au CA qui sont là pour ça, chacun son métier. Je suis là pour mettre en œuvre la politique décidée par le conseil d’administration… Mais je peux aussi faire des propositions.»
Toujours modeste, il a pourtant déjà fait amorcé quelques changements stratégiques. La réalisation de logements sociaux devient ainsi une priorité affichée, comme dans la ZAC Hamaha, alors que les logements intermédiaires ont du mal à trouver preneurs. Des quartiers entiers sont «résidentialisés», c’est-à-dire clôturés, sécurisés et rénovés, comme ce fut le cas dans le lotissement de la Kwalé. Alors que 20 des 26 logements étaient vides, certains patientent aujourd’hui sur liste d’attente pour s’y installer.
«Nous voulons trouver des solutions appropriées pour les zones délaissées. Et ça passera parfois par une requalification des logements pour en faire du social comme à Trévani par exemple», explique-t-il. En ancien banquier, la vacance des logements représente pour lui un impact négatif pour les comptes. Il faut donc régler ce problème… comme celui de recouvrement dont le service a été musclé.
«Comme ailleurs»
Il sait qu’il a encore d’importants dossiers à la peine à traiter comme l’accession sociale à la propriété où le foncier est encore un facteur bloquant. Il prend donc la tête d’une société de 135 salariés qui a réalisé 14,8 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2014 et vise plus de 17 millions cette année. Et les chiffres devraient continuer à s’envoler avec les livraisons de programmes, la construction de 200 logements par an au minimum et le choix de recourir à des promoteurs pour réaliser des opérations… à condition que les artisans mahorais, au cœur de la vie de la SIM depuis toujours, ne soient pas oubliés.
«Ma philosophie, c’est faire comme ça se passe ailleurs», conclut-il simplement. «Ils réussissent de belles choses en utilisant de beaux outils. Je n’ai pas la prétention d’inventer des choses, juste permettre à Mayotte de rattraper son retard.» Il a été élu pour un mandat de 3 ans renouvelable une fois.
RR
Le Journal de Mayotte
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