Un père qui tabasse son fils dans une cours d’école avant de terminer la correction dans une salle de classe. La scène a fait réagir les adultes présents ce jour-là dans l’école primaire de Bandrélé, à tel point que le directeur a prévenu la gendarmerie.
Les faits se sont déroulés peu de temps après la rentrée scolaire, le 10 septembre dernier. Il est 7h30 et comme tous les jours, le directeur reçoit des parents qui le désirent lorsque il est prévenu d’une bagarre dans la cour. Il ne comprend pas tout de suite que la scène ne concerne pas deux adultes. Il voit un homme, de dos, donner des coups de poings à un 2e tombé au sol. Il comprend qu’il s’agit d’un père venu donner une leçon à son fils, âgé de 5 ans, lorsque l’homme agrippe le gamin pour le soulever.
D’autres parents tentent alors de s’interposer, le directeur lui-même se précipite. L’homme les repousse violemment en criant : «C’est mon fils, c’est moi qui sait ce que je fais de mon fils !»
Le temps que les gendarmes arrivent, le gamin a regagné sa salle de classe mais le père l’a suivi et lui assène de nouveaux coups, devant les autres enfants. Le directeur parvient à mettre la petite victime en sécurité et constate sur l’enfant des saignements, un côté de la tête enflé et des traces sur tout le corps.
Voici l’affaire que doit trancher le tribunal : jusqu’où peut aller un père pour corriger son enfant? A la barre, le père s’explique : «Ca faisait plusieurs jours qu’il n’allait pas à l’école. Il fallait qu’il comprenne une bonne fois pour toute.»
-Ca vous donne le droit de le frapper aussi violemment ? demande le juge.
-Je me suis rendu compte que c’était une erreur mais c’était trop tard. Je n’ai pas voulu lui faire de mal.
Une répétition sans fin
Le juge montre les photos des blessures et s’interroge sur des traces de fouet plus anciennes. Mais l’homme nie frapper régulièrement le petit. Il est père de 5 enfants, âgés de 5 à 19 ans et au fil de l’audience, le tribunal va comprendre les raisons qui l’ont amené à ce coup de folie. Lui-même a déjà été victime de violences répétés durant son enfance, une éducation à la dure que beaucoup ont connu à Mayotte qui serait ainsi perpétuée.
«Et en le frappant, vous n’avez pas peur qu’il prenne le chemin de la violence Vous ne craignez pas qu’il pense que frapper les autres, c’est un moyen normal de régler ses problèmes?» demande la procureure.
C’est aussi la crainte de la délinquance qui l’a amené à agir ainsi, dans un climat où beaucoup de parents perdent pied face à une jeunesse qu’ils ne comprennent pas. Mais ne pas se rendre à l’école lorsqu’on a 5 ans, cela ne fait peut-être pas d’un enfant une graine de voyou. «Il faut qu’il apprenne à vivre comme les autres», maintient le père.
Vaine pédagogie
«Il y a une différence entre le droit de correction et des violences. Quand on dépasse les limites, on passe devant le tribunal», explique Me Yanis Souhaïli, l’avocat de l’administrateur ad hoc de l’enfant. «Parce que , sans le vouloir, il arrive que des parents en étant trop violents, donnent la mort à leur enfant. On est là pour vous faire comprendre que vos actes ont été dangereux. Vous allez repartir avec l’enfant, vous allez vivre ensemble, il ne faut pas recommencer».
Même volonté pédagogique du côté du parquet. Indiquant qu’«on ne peut pas légitimer des violences sous le prétexte de l’éducation», la procureure demande 9 mois de prison avec sursis, 170 heures de travail d’intérêt général et une amende de 500 euros.
Mais face à un homme qui visiblement ne comprend pas les nuances que la cour lui explique, la sentence tombe : 18 mois de prison répartis en 6 mois ferme et 12 mois de sursis avec mise à l’épreuve, une amende de 300 euros et 500 euros de dommages et intérêts pour le petit.
L’homme a décidé de faire appel du jugement.
RR
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