Les événements comme les «Jeunes Talents BGE» qui récompensent les créateurs d’entreprises sont-ils les (beaux) arbres qui cachent la (triste) forêt? C’est ce que semble révéler l’INSEE qui publie une étude qui vient encore affiner notre connaissance de l’économie mahoraise. Elle porte sur les créations d’entreprises à Mayotte en 2015, au nombre de 825. Ces entreprises nouvelles sont donc moins nombreuses qu’en 2014 (-3% après +0,6% en 2014) et elles sont surtout le fait de créateurs relativement âgés. A Mayotte, l’entrepreneur qui crée sa structure a, en moyenne, 39 ans, soit deux ans de plus que la moyenne nationale.
«Compte tenu de la jeunesse de notre population, on pouvait s’attendre à ce que les porteurs de projets soient le reflet de la réalité démographique. Ce n’est pas le cas. Comme dans les autres DOM, les créateurs sont plus mûrs, comme s’il fallait avoir avancé dans la vie, peut-être fondé une famille ou avoir acquis de l’expérience pour monter une entreprise», relève Djamel Mekkaoui, le responsable de l’INSEE à Mayotte.
Les créateurs âgés de 30 à 39 ans sont les plus nombreux (38% contre 29% au niveau national) alors que les moins de 30 ans ne sont que 19 % (contre 32 % en France).
Résultat, les initiatives comme le concours Jeunes Talents se révèlent absolument essentielle pour inciter les jeunes à prendre une part nettement plus importante à la construction de l’économie mahoraise. «Ce concours a sûrement une valeur d’exemplarité mais ce ne sont malheureusement pas ces porteurs de projets qui font la masse. En revanche, il semble évident qu’il faut renforcer ce type d’initiatives ou tout type de dispositif pour porter la jeunesse vers la création d’entreprise», souligne Djamel Mekkaoui.
Une situation inquiétante
Car, de façon générale, ces chiffres du nombre de créations d’entreprises en recul sont au mieux décevants, au pire alarmants. «En ce qui me concerne, je dirais qu’on peut qualifier ces 3% de baisse ‘d’inquiétants’», explique Djamel Mekkaoui. «Car de façon générale, on sent bien qu’en 2015, l’élan de l’économie mahoraise est moins fort que précédemment».
Notre économie devrait en effet générer la création d’un nombre bien plus grand d’entreprises. Avec des taux de croissance très impressionnant, l’arrivée des fonds européens, l’alignement des prestations sociales et une indexation qui poursuit sa montée en puissance, les investisseurs devraient se bousculer pour profiter de ce qui ressemble, sur le papier, à véritable petit Eldorado économique. Or, ils ne sont pas là. Pire, ils ne semblent même pas se prépositionner.
Pas encore de McDo
Le symbole de cette économie qui peine à enclencher un véritable développement, est l’absence d’un restaurant Mc Donald, une enseigne qui est toujours un signe de l’accession d’une économie à un certain stade de développement. L’absence de cette chaîne internationale, comme d’autres, est le signe que notre économie n’offre pas encore les gages suffisants pour permettre une installation.
Pour autant, avec 825 créations d’entreprises, nous en sommes pas non plus avec un électro-encéphalogramme plat. «Nous ne sommes pas défaitistes, ce n’est pas une situation totalement atone, mais c’est moins bien», nuance Djamel Mekkaoui.
Mayotte reste encore pénalisé par l’absence du régime d’auto-entrepreneur (requalifié en microentrepreneur depuis décembre 2014) alors que la formule est choisie en France par 43% des créateurs d’entreprise.
Quant au taux de création, il s’établit à 9,6% mais s’il est bien en dessous de la moyenne nationale, c’est surtout qu’à Mayotte, les cessations d’entreprises ne sont pas toujours déclarées et enregistrées dans les temps, gonflant artificiellement le nombre de sociétés.
Les femmes impliquées dans l’économie
En 2015, les 825 entreprises nouvelles se répartissent pour moitié dans le secteur «commerce et réparation automobile» et si la construction reste un secteur important, il marque le pas avec 2% de créations d’entreprises en moins.
Moins d’une entreprise sur quatre est créée dans les « autres services » contre plus d’une sur deux en France. Quant à la part des professions libérales parmi les créations d’entreprises individuelles, elle est particulièrement faible (11 % contre 42 % en France).
Enfin, dernière particularité de l’entrepreneuriat mahorais: il concerne très largement les femmes. En 2015, 44,2% des entreprises individuelles sont créées par des femmes, soit plus qu’au niveau national (40%). Mayotte est ainsi au 8e rang des départements français pour l’entrepreneuriat féminin, derrière la Guadeloupe (48%), la Martinique (47%) ou Paris (47%).
Vous êtes, mesdames, particulièrement nombreuses parmi les créateurs de commerce de détail (62%) ou dans les activités pour la santé humaine (59%).
A l’inverse, la construction reste de façon écrasante un métier d’homme (94%) comme les transports (89% d’hommes).
RR
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