Espèce protégée, « la raie Manta a une valeur patrimoniale mondiale considérable », explique Raïma Fadul, la présidente de l’association mahoraise ATOLL, Association Territoriale pour l’Observation du littoral et du lagon, créée précisément il y a 3 ans pour étudier les raies manta.
Devant une salle de cinéma bien remplie, la jeune femme expliquait que cette drôle de forme (Manta signifie couverture en espagnol) était liée à ces cornes céphaliques qu’elles déroulent pour attraper le zooplancton dont elles se nourrissent et le ramener vers leur énorme bouche. Ce n’est que vers 15-20 ans de maturité sexuelle que l’on va pouvoir distinguer le mâle de la femelle, mais difficilement, ce qui plonge encore dans l’incertitude pour un tiers de la population du lagon. 54% sont des femelles.
L’association en a dénombré 24 dans qui nagent autour de Mayotte, pour une population estimée à 40, « elles sont 5.000 aux Maldives », lance le plongeur-photographe Marc Allaria. Elles ont chacune un petit nom, celui de leur découvreur, et identifiée par leurs tâches noires sur la partie ventrale, « leur empreinte génétique. »
Deux noires uniques au monde
Leur observation a permis d’affirmer qu’une espèce est très présente chez nous, « 100% des Manta du lagon sont ‘Alfredi’, plus petites, alors qu’on pensait qu’il n’y avait que des ‘Birostris’, qui peuvent mesurer jusqu’à 9 mètres d’envergure. » Nos Manta, mesurent environ 3 à 4 mètres en moyenne, « avec peu de juvéniles, ce qui pose une interrogation quant à la reproduction de l’espèce. »
Mayotte peut se targuer d’une spécificité : « Deux de nos raies Manta ne sont pas blanches, mais noires. Ce sont les seules jamais photographiées à ce jour. »
Elles se regroupent naturellement sur deux zones, dans la passe de Longoni au nord de Mayotte, et vers les 3 passes du sud. Et migrent rarement d’une à l’autre. « Quatre sont passées du nord au sud, avec l’hypothèse qu’elles fuyaient peut-être la pression humaine liée à l’observation depuis les bateaux de touristes. »
Les pièges du lagon
Si leurs grands prédateurs naturels requins et orques n’y pénètrent pas, le paisible lagon cache bien d’autres menaces pour les raies manta : « La pêche directe pour s’en nourrir ou accidentelle, les filets posés sur leurs zones de nourrissage, la pression d’observation par les touristes, la pollution de l’eau liée au déversement de terre lors des pluies non freinées par la pratique du brûlis, les lessives en tout genre, les station d’épuration non raccordées et le phénomène El niño. »
Rappelons qu’un arrêté préfectoral en interdit la pêche à Mayotte. Tous ces renseignements sont compilés dans un document de sensibilisation proposé par ATOLL.
La soirée se poursuivait dans une salle de cinéma hyper climatisée, par les images de portfolio proposées par le Festival de l’image sous-marine, avec des trio-thématiques magnifiques, proposés par des candidats qui arrivent maintenant des quatre coins du monde. Un film « Méditerranée : Sur la piste des cétacés », permettait au public de découvrir les baleines à Bec de Cuvier.
La remise des prix du Festival aura lieu ce dimanche soir.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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