Les « décasés » ont reçu ce matin la visite du préfet Frédéric Veau et de sa directrice de cabinet. Ils accompagnaient un contrôle de la Police aux frontières, « 30 personnes en situation irrégulière ont été reconduites à la frontière. Il s’agissait de départs volontaires », nous indique la préfecture.
Ils ne sont pas les seuls à vouloir rentrer aux Comores. Bien que la situation soit difficilement “clarifiable”, la PAF estime à 60 le nombre d’étrangers en situation régulière, qui souhaiteraient une aide au retour, puisque ne pouvant « bénéficier » d’une expulsion par le « Maria Galanta ».
Sur la place, certains évoquent même des cas de personnes qui cachent leurs titres de séjour, afin de pouvoir être expulsées… Un comble quand on sait qu’en arrivant en kwassa, les migrants jettent à l’eau leurs preuves de nationalité comorienne afin de faire une demande de papiers français. L’aide au retour ne peut être décidée que par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) mis en place l’année dernière à Mayotte.
« Des études pour mes enfants »
Mais lorsqu’on creuse un peu avec eux, ces « étrangers » en situation régulière nous expliquent ne demander qu’à rester. C’est ce qu’ils ont dit ce mercredi matin en préfecture lorsqu’ils étaient convoqué : « Nous avons des attestations d’hébergement, mais les propriétaires ne veulent plus nous voir », expliquent-ils. Ils se précipitent tous pour nous parler de leurs cas particulier.
L’une habitait un banga que lui louait une anjouanaise mariée à un habitant de Choungui eux-mêmes installés illégalement sur un terrain. Le propriétaire ne veut plus voir personne. Une autre a trois enfants, et le propriétaire du terrain à Poroani a souhaité récupérer son terrain. Une coco nous tire par le bras, « je veux rester ici pour que mes enfants fassent des études. »
Les hommes absents
Alors que nous partons, une boueni arrive en courant, sort son titre de séjour et le passeport français de son fils, il est au collège de Kani Be, nous traduit-on, et revient dormir tous le soirs place de la République. Elle souhaite revenir à Kani Be, « mais j’ai peur », dira-t-elle. Bien que détentrice d’une attestation d’hébergement, elle sait qu’elle ne sera pas la bienvenue au village.
Des témoignages uniquement féminins, les hommes discutent parfois à l’extérieur de la zone de vie, mais sont le plus souvent les grands absents de ces histoires au moment où il faut se soucier de l’avenir de leurs enfants. Ni des troubles qu’ils sèment devenus grands, et qui leur valent parfois d’être eux-mêmes chassés du village.
Une zone de vie qui s’est agrandie, mais dont les barrières protectrices ont été récupérées par la police en matinée. Qu’à cela ne tienne, une bâche a aussitôt été tirée vers midi pour les remplacer.
Le Collectif de Soutien des Délogés de Mayotte (CSDM) qui s’est créé pour gérer les besoins, les repas, les aspects sanitaires, poursuit sa mission d’accompagnement sur un effectif réduit de « décasés ». En espérant que d’autres ne viendront pas grossir leur rang le week-end prochain, donnant là une piètre vitrine de l’ile de Mayotte aux touristes et aux nouveaux arrivants.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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