Des yeux humides. Des voix qui tremblent. Des sourires émus. Et beaucoup de fierté. Au milieu du quartier de Kawéni, sur une petite place à côté de la mosquée de Lazérévouni, 11 mamans et un papa ont été honorés en public. Ils ont reçu le diplôme qui vient couronner deux années d’apprentissage dans le collège K1. Le premier diplôme de leur vie. Les uns après les autres, ils sont venus chercher le précieux document et dire quelques mots au micro, en français.
Car l’examen qu’ils ont passé et réussi est le DILF, le diplôme initial de langue française. L’initiative revient au collège K1 qui durant l’année scolaire 2014-2015 a proposé aux parents qui amenaient leurs enfants le jour de la rentrée de venir, eux aussi, apprendre le français, cette langue si nécessaire à Mayotte mais qu’ils ne connaissaient pas. L’établissement s’appuyait dans sa démarche sur le Greta, la structure de l’Education nationale qui organise des formations pour adultes.
Pour la 2e année, une association du quartier, «Action coup de pouce», est venue s’associer à la démarche pour mobiliser autour de l’initiative. Et les parents ont répondu présent. «Ils sont une bonne centaine à venir suivre des cours d’une heure et demi, deux fois par semaine. Ils sont répartis dans des classes de 10 élèves, ils avancent, à leur rythme, dans l’assimilation de la langue française», explique Assiathi Abdou, une des CPE du K1 mais la seule à parler shimaoré. C’est donc elle qui assure le lien entre les parents et le collège. Elle aussi était très touchée de voir qu’au bout de la 2e année, les 12 candidats qui se sont présentés au 1er examen ont tous été reçus.
L’école appartient à tous
«Les mamans ont montré que l’école, c’est pour les petits et pour les grands», s’est félicitée Nathalie Costantini, la vice-recteur. «Nous qui sommes dans l’école et qui faisons en sorte que nos enfants puissent se former, on est très fiers de voir que cette école vous appartient à vous tous aussi, autant qu’aux petits», a-t-elle confié au public venu assister à l’événement.
«C’est la première fois qu’on délocalise une remise de diplôme de ce type au cœur d’un quartier. C’est un moment important, à la fois pour récompenser ces parents diplômés, juste avant la rupture du jeûne qui est aussi un moment qui compte. On peut allier les deux, comme quoi, ça peut marcher», s’est réjoui la vice-recteur.
Aller à l’école: les parents montrent l’exemple
L’association «action coup de pouce» n’avait pas pour habitude de s’occuper des adultes. Sa démarche est centrée sur les jeunes de Kawéni qu’elle encadre avec des cours de soutien, des animations théâtre et des cours de lecture et d’écriture. «On va sortir un livre avec les jeunes pour raconter notre quartier», explique Dhoirfia Saindou, qui dirige l’association. Mais en accompagnant les parents, la volonté était clairement de montrer l’exemple aux plus jeunes, pour qu’ils comprennent que c’est à l’école qu’il faut apprendre pour avancer dans la vie.
Après cette remise de diplômes, la vice-recteur a déjà donné rendez-vous aux heureux lauréats l’an prochain. «Il va falloir continuer à venir à l’école pour que je vous remette le DELF», leur a-t-elle dit. Ce diplôme d’étude en langue française est l’étape suivante qui est synonyme d’une très bonne maîtrise du français pour ceux dont ce n’est pas langue maternelle. Avec l’émotion suscitée par la 1ère étape, nul doute que ces diplômés vont relever le défi.
RR
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