Prendre du recul et offrir un panorama de l’évolution de la richesse à Mayotte sur une période relativement longue. L’étude sur le PIB à Mayotte publiée par l’INSEE ce lundi matin ne donne aucune donnée fondamentale nouvelle, mais elle permet de prendre conscience du big bang économique que connaît notre département depuis l’an 2000.
L’INSEE scinde la période en deux parties. La première, de 2000 à 2008, est synonyme d’une croissance «très forte», de 9,3% par an en moyenne. Elle est alors plus de 5 fois supérieure à celle de la France entière (+1,7%) et plus de 2 fois supérieure à l’ensemble des DOM.
Même la Guyane, elle aussi en plein rattrapage, est derrière nous avec une croissance annuelle moyenne de 4,5% sur la période.
La Réunion, qui affiche pendant ces années-là un grand dynamisme, affiche une augmentation de son PIB de 4,2% par an.
La crise, relative, après 2008
Après 2008, la donne change. La crise économique mondiale frappe la métropole. L’INSEE parle «d’un tournant économique pour l’ensemble du territoire français mais l’impact est différent selon les régions». Mayotte n’y a pas échappé. Cette crise a freiné «fortement» ce rattrapage que nous opérions. Entre 2008 et 2013, l’activité ralentit nettement, passant à +4,2% par an en moyenne sur la période.
Notre croissance est pourtant restée «bien plus dynamique que dans toutes les autres régions françaises. Elle est 10 fois supérieure à la croissance annuelle moyenne française (+0,4%) et 4,5 fois plus rapide qu’à La Réunion», note l’INSEE.
Les Antilles ont été plus durement impactée. Seule la Guyane, portée par l’activité du port spatial européen de Kourou a tiré son épingle du jeu (+3,7% par an entre 2008 et 2013). Résultat, sur cette dernière période, «les rythmes de croissance sont proches entre Mayotte et La Guyane alors que Mayotte progressait deux fois plus vite avant crise».
Quatre fois moins riches de les Hexagonaux
Sur le papier, ces chiffres sont donc très significatifs… Mais nous partions de loin. Résultat, deux lectures sont possibles. La vision pessimiste consiste à voir que la richesse par habitant à Mayotte s’établit en 2013 à 8.000 euros, soit le quart seulement du PIB par habitant de la France entière. «Le PIB par habitant à Mayotte en 2013 est équivalent à celui de la France du milieu des années 1950. Mayotte accuse ainsi un retard économique de 60 ans sur la France», explique l’INSEE.
Nous sommes aussi deux fois moins riches que les Guyanais, 2e DOM le plus pauvre.
Les optimistes retiendront autre chose: en 2000, notre PIB par habitant était de 3.900 euros, 6 fois moins important que celui de la France entière. Il a donc doublé en 13 ans !
Trop faible qualification des Mahorais
L’INSEE offre des explications à cet écart encore très important. Non seulement, le taux d’emploi (le nombre de personne avec un travail) est bien plus faible chez nous qu’ailleurs (18 emplois pour 100 habitants contre 41 dans toute la France), mais la productivité du travail est aussi bien faible à Mayotte. Nous cumulons ces deux handicaps importants.
Résultat, «le niveau de richesse créée par l’économie mahoraise reste encore très faible», précise l’étude. Chaque emploi génère 44.073 euros de richesse… très loin de l’Île-de-France qui signe le record national avec 105.303 euros de PIB par emploi. Une des causes est à trouver dans le faible niveau de qualification de la population avec 71% des Mahorais qui n’ont aucun diplôme qualifiant, contre 52% à La Réunion et 34% pour toute la France.
Mais là encore, les optimistes ont de quoi nuancer : notre démographie, avec une proportion très importante de jeunes, biaise les chiffres. Seulement 53 % des habitants sont en âge de travailler contre 64 % en France… Et notre jeunesse est bien plus diplômée que la génération précédente.
Le rattrapage est donc bien réel même si le chemin est encore long.
RR
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