Vous étiez devenus fatalistes dans les bouchons du matin ? La Direction de l’Environnement, de l’aménagement et du logement de l’Etat va vous redonner des raisons d’espérer. Pas d’annonce de contournement de Mamoudzou et ses villages grouillants de monde, non, « une route supplémentaire ne résout rien, elle ne fait qu’accroitre de 25% le trafic », mais déjouer les tics et les tocs qui bloquent notre chaussée, plutôt. C’est Armand Gosda qui est aux commandes, Directeur du bureau d’étude Ingénierie Sécurité routière, mandaté par la DEAL.
Il a disséminé 19 caméras ce mardi sur le Grand Mamoudzou, du rond point de Jumbo (Majicavo), à l’intersection de Tsararano (Dembéni). Et derrière les caméras, 60 enquêteurs veillent au bon déroulement des enregistrements : « Les 5 premiers caractères de vos plaques d’immatriculation sont relevés, pour tracer votre véhicule et enregistrer vos habitudes. »
Plus aucun secret pour eux donc, de la mère de famille qui arrive du nord de Mamoudzou, pour emmener les enfants à l’école, puis se rendre au travail, au vendeur d’oignons qui traverse pour se rendre au marché… « Nous attribuons à chacun une couleur différente en fonction du moyen de locomotion, puis nous reconstituons en simulation dynamique le fonctionnement de la ville. »
Redémarrage en accordéon
Armand Gosda décortique ensuite, et cela prendra deux mois, les impacts sur la circulation, du taxis aux arrêts intempestifs, du bus qui a les mêmes travers, de l’autostoppeur, « ici, ils se mettent souvent aux ronds points, provoquant d’un coup un fort ralentissement. Un bus qui s’arrête une minute trente, bloque les 150 voitures qui le suivent, qui mettent chacune 2 secondes à redémarrer, provoquant un arrêt de 5 minutes au final pour la dernière de la file. »
Quant à la manif du matin qui bloqua le rond point SFR, ce fut une bénédiction pour eux : « Nous allons pouvoir calculer le temps d’impact sur la circulation d’un blocage d’une heure. »
A leur QG, les quelques secondes de visionnage de leurs écrans sont édifiantes : les files sont en permanence stoppées, par des discussions, des arrêts d’autostop, un camion qui manœuvre … « Il faudra ensuite s’approprier l’étude et prévoir des aires d’arrêt, et sans doute communiquer sur la conduite idéale à tenir sur les routes. »
Ces flaques qui tachent les djellabas
Si la DEAL a commandé et financé l’enquête de 10.000 euros, le conseil départemental et la mairie de Mamoudzou, sont partenaires, « la mairie a d’ailleurs financé une étude sur le stationnement à Mamoudzou », et pourront intégrer ces remarques dans leurs plans de transport respectifs. « Nous les guiderons dans les options, feux de signalisation, peu probable, ou circuits individuels de bus. »
Justement, il y a 6 mois, le cabinet a effectué une étude sur Doujani, « le plus gros du ralentissement était provoqué par une flaque d’eau que les automobilistes, par courtoisie envers les piéton, ne voulaient pas traverser trop vite », rapporte en souriant Armand Gosta. Depuis, l’évacuation a été nettoyée. Quatre esquisses sont à l’étude pour le village, dont deux fois deux voies, dont l’une réservée aux bus. Un appel d’offre a été lancé pour des relevés de terrain. « Les travaux commenceront début 2017 », annonce Jean-Yves Bellini, Chargé de la politique de déplacement à la DEAL.
Slalom autour des îlots de Kaweni pour les secours
Vont-ils se pencher sur les îlots de Kawéni, ces terre-pleins centraux qui ont ralenti la circulation, et empêche tout dépassement pour les véhicules de secours, « Ils ont surtout sauvé des vies, en permettant aux piétons de traverser et en empêchant les voitures de faire demi-tour, et donc de percuter des deux roues », assure Armand Gosta en faisant référence à l’accident mortel de la rocade la semaine dernière. D’ailleurs, l’accroissement du nombre de deux-roues, 6% par an avait signalé la mairie, lui fait craindre une augmentation des accidents graves : « Il faut absolument régler la fluidité. »
La ville de Sada se dit intéressée par la démarche qui a déjà été mené dans quelques villes de métropole, Capbreton, Hossegor, Valenciennes… « Nous avons travaillé pendant 20 ans à La Réunion en parvenant à infléchir les habitudes. »
L’objectif est donc de rendre la route vivable, en optimisant la circulation malgré le nombre croissant de 10% de nouvelles voitures par an.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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