Le chômage continue sa très forte progression dans notre département. C’est ce que révèle l’Insee qui publie son enquête emploi 2016*. Pour autant, l’économie n’est pas en train de s’effondrer, il s’agit en réalité d’une normalisation des statistiques. Au 2e trimestre 2016, le taux de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT) s’établit à 27,1% à Mayotte.
Il augmente encore fortement (+3,5 points) par rapport à 2015, après la forte hausse (+3,9 points) de l’année précédente. En deux ans, l’augmentation est donc de 7,4 points. C’est un record national, à nuancer.
Au 2e trimestre 2016, 17.100 Mahorais sont au chômage, soit 3.200 chômeurs de plus en un an. Mayotte devient ainsi le département français avec le taux de chômage le plus élevé.
Les jeunes sont particulièrement concernés avec un taux de chômage record de 47,2% pour les 15-29 ans. «Les générations plus âgées sont favorisées sur l’emploi, notamment grâce l’emploi public. Le côté privilège de l’âge est quelque chose que l’on retrouve dans beaucoup de territoires», précise Jamel Mekkaoui, le responsable de l’Insee à Mayotte.
Les hommes en première ligne
Comme en 2015, la hausse du chômage provient essentiellement des hommes. Leur taux de chômage augmente de 4,5 points contre 2 points pour les femmes. En deux ans, le taux de chômage des hommes a augmenté de près de 10 points contre 3,4 points pour les femmes. Celui des femmes reste néanmoins beaucoup plus élevé que celui des hommes (32,6% contre 22,6%).
Il est à noter que les femmes sont moins présentes sur le marché du travail que les hommes. Ainsi, seulement 43,2% des femmes mahoraises en âge de travailler sont actives, contre 58,9 % des hommes, mais leur taux d’activité augmente sensiblement en 2016 (+2,7 points), après une hausse de 4,7 points en 2015.
Les créations d’emplois ne suivent pas
Cette hausse globale du chômage a deux explications principales. Il est d’abord évident que les Mahorais sont plus nombreux sur le marché du travail. Et si la population active augmente très fortement, les créations d’emplois ne parviennent pas à suivre le rythme.
En 2016, 62.500 Mahorais en âge de travailler sont actifs (soit en emploi soit à la recherche d’un emploi), ce qui porte le taux d’activité à 50,5% (+2,3 points sur un an). En deux ans, le taux d’activité s’est accru de 6,1 points.
Parallèlement, l’emploi n’a que faiblement progressé en 2016: 45.400 Mahorais ont un emploi, soit seulement 1.200 personnes supplémentaires en un an. Seuls 36,7% des Mahorais âgés de 15 à 64 ans ont un emploi. Ce taux est stable par rapport à 2015, alors qu’il avait progressé de 1,2 point en 2015 et de 1,8 point en 2014.
La diminution du halo
L’autre explication à cette envolée du chômage est la diminution d’une «anormalité» des chiffres que l’on connaissait jusqu’à présent à Mayotte, avec un très important «halo autour du chômage». Ce «halo», ce sont les personnes qui souhaitent travailler mais qui ne sont pas inscrites en tant que chômeurs, parce qu’elles ne font aucune démarche de recherche d’emploi ou ne sont pas disponibles pour travailler. Ainsi, en 2016, ce «halo» concerne encore 24.100 personnes mais ce nombre diminue de près de 1.300 personnes. Soit elles ont trouvé un emploi, soit elles sont désormais considérées comme des chômeurs.
Pour connaître la réalité de l’évolution des personnes sans-emploi à Mayotte, il ne faut donc pas se contenter des chiffres du chômage. Il faut additionner les personnes qui sont au chômage et celles qui sont dans le «halo». On obtient alors 41.200 Mahorais sans emploi souhaitant travailler, soit 31,6% des personnes de 15 ans ou plus. Avec ce regard global, on se rend compte que la situation est quasiment stable, avec un nombre de sans-emplois qui n’augmente «que» de 0,6 points.
«On a une tendance de fond très claire : si on ne crée pas beaucoup d’emplois, le chômage va continuer à augmenter”, relève Jamel Mekkaoui. Mais on peut, malgré tout, regarder ces chiffres en restant optimiste. Mayotte crée beaucoup de richesse, comme en témoigne la hausse du PIB. Mais jusqu’à présent, cette richesse profite surtout à la consommation et aux importations et peu à la création d’emplois, avec un secteur privé qui n’est pas encore assez développé». Autrement dit, notre économie a les ressources pour entrer dans une dynamique nouvelle en matière d’emploi… à condition, que les flux financiers aillent dans la bonne direction.
RR
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*Cette enquête emploi a été réalisée pour la 1ère fois à Mayotte en 2009. Depuis 2013, elle est actualisée au 2e trimestre de chaque année. C’est la seule source qui permet de mesurer le chômage au sens du Bureau international du travail (BIT), un chômage qui prend en compte tous ceux qui n’ont pas du tout travaillé pendant la semaine de référence, qui sont disponibles dans les 15 jours pour occuper un emploi et qui ont effectué des démarches actives de recherches d’emploi dans le mois précédent l’enquête.
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