Guito Narayanin devait quitter La Réunion pour rejoindre Mayotte, mardi matin, où il dirige l’entreprise IBS. Mais c’est avec deux jours de retard et encadré par des policiers de la brigade criminelle du commissariat Malartic de Saint-Denis que le célèbre entrepreneur réunionnais pourrait faire le voyage, aux frais de la justice. Car c’est la juge d’instruction Sylvie Roy qui souhaiterait le voir dans son bureau, elle qui a en charge de un dossier ouvert pour «association de malfaiteurs et violences en réunion».
Interpellé dans les locaux de son entreprise à Saint-André, en compagnie de trois de ses collaborateurs, Théophane «Guito» Narayanin est soupçonné d’être le commanditaire de l’agression d’une avocate du barreau de Mayotte, frappée par quatre hommes âgés entre 25 et 30 ans, le matin du 2 septembre 2015 en arrivant dans son cabinet des Hauts-Vallons.
Les quatre suspects, dont trois résident à la Réunion, avaient été interpellés dans les jours qui ont suivi les faits, avant d’être placés en détention provisoire. L’un d’eux avait mis en cause Théophane Narayanin comme étant le commanditaire avant de revenir sur ses déclarations.
«Extorsion de fonds»
Les derniers éléments de l’enquête indiquent que l’entrepreneur et trois des quatre agresseurs présumés ont eu de nombreux échanges téléphoniques avant et après les faits. Entres autres éléments, l’exploitation des fadettes ainsi que des écoutes téléphoniques feraient apparaître des indices qui auraient troublé les enquêteurs. Ce qui a conduit la juge d’instruction à demander l’interpellation de Guito Narayanin.
Selon les informations de nos confrères du JIR que le JDM est en mesure de confirmer, une procédure a relancé l’enquête en septembre dernier quand l’homme d’affaires a déposé plainte chez les gendarmes de Saint-Benoît pour extorsion de fonds à l’encontre de trois des agresseurs présumés.
Ceux-ci étaient venus à plusieurs reprises «faire pression» et lui réclamer une somme d’environ 15.000 euros pour chacun. Le prix, selon eux, correspondant au contrat avec, en plus, la rétribution des onze mois de détention provisoire. Selon des écoutes portant sur des conversations téléphoniques, les trois hommes auraient reproché à Guito Narayanin de n’avoir pas respecté les termes du contrat. Ils s’en seraient plaints aussi à des proches de l’entrepreneur. Entendus par les policiers, ces derniers ont été remis en liberté dans l’après-midi d’hier mercredi.
«Une cabale montée de toutes pièces»
Depuis que son nom est apparu dans cette affaire, Guito Narayanin a toujours vivement réfuté les accusations à son encontre. Selon lui, les trois agresseurs présumés savaient surtout qu’il avait de l’argent. D’après lui, ils auraient voulu le voler en profitant des «rumeurs» liées à l’agression de l’avocate. Lorsque son nom est sorti dans la presse, peu de temps après les faits, Guito Narayanin avait déclaré être victime d’une «cabale montée de toutes pièces». Il se disait alors à la disposition de la justice.
Tout expliquant, en septembre 2015, qu’il était prématuré «de parler d’affaire Narayanin», les policiers de Mamoudzou avaient très vite orienté leur enquête sur un règlement de comptes et pas un acte crapuleux. Il ressortait que l’avocate était tombée dans un guet-apens dans le hall de la résidence abritant le cabinet pour lequel elle travaillait.
Une erreur de cible
Ses agresseurs n’avaient bizarrement dérobé aucun bien à l’avocate frappée de plusieurs coups de poing lui ayant fracturé le nez. Surtout, plusieurs indices ont montré que les malfaiteurs s’étaient trompés de cible mais en voulait, en fait, à Me Sylvie Sevin, patronne du cabinet d’avocats employant la victime.
Conseil de Frédéric d’Achery, décédé en mai dernier, Me Sevin est intervenue à de multiples reprises dans l’interminable contentieux démarré en 2006 sur l’exploitation de la carrière de Kangani. Frédéric d’Achery contestait l’exploitation de la carrière par le groupe IBS de Guito Narayanin et avait obtenu son expulsion. « Je sais bien que ce cabinet d’avocats est historiquement contre moi mais il y a beaucoup d’excitation dans cette affaire», déclarait Guito Narayanin en septembre 2015. Aujourd’hui, il continue de contester les faits.
Reste à savoir si ces arguments vont convaincre la juge d’instruction de Mamoudzou. La magistrate pourrait décider aujourd’hui de délivrer un mandat d’amener afin de faire transférer l’homme d’affaires. Il pourrait donc arriver à Mayotte sous six jours, le délai imparti dans de telles circonstances.
RR, le JDM
avec Jérôme Talpin, le JIR.
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