Les chiffres de la délinquance 2013 étaient présentés ce matin par le préfet, le procureur de la République et les autorités de gendarmerie et de police. L’augmentation se poursuit et des caractéristiques «inquiétantes» se dégagent.
L’augmentation générale des «faits de délinquance» a été de 11% en 2013 à Mayotte par rapport à l’année précédente. Notre département enregistre ainsi un nouveau record avec 7.458 faits constatés. Ils n’étaient «que» de 6.698 en 2012.
Trois caractéristiques particulières se dégagent. Tout d’abord la part prépondérante des «atteintes aux biens». Ils représentent à eux seuls 74,5% de la délinquance. Rien que pour les cambriolages , en 2013, le nombre atteint 1.985. «C’est un fait extrêmement spécifique à Mayotte qu’on ne retrouve dans aucun autre département métropolitain ou ultramarin», notait le préfet Jacques Witkowski en présentant ces données ce matin. Si le phénomène était jusqu’à présent urbain, il concerne progressivement l’ensemble du département avec une accélération du nombre de cambriolages en zone rurale.
Des mineurs toujours plus impliqués
Deuxième caractéristiques de la délinquance à Mayotte : l’implication des mineurs. Ils sont liés à 36% de la délinquance générale. On retrouve même des mineurs dans 93% des cambriolages élucidés à Mayotte. Il s’agit parfois de «très jeunes mineurs de 14 à 16 ans et même parfois plus jeunes», relevait le préfet.
«Ce n’était pas imprévisible, notait Joël Garrigue, le procureur de la République, la population étant très jeune à Mayotte. Mais on atteint des proportions qui alertent.»
Les collectivités locales doivent réagir
Interrogé sur la réponse pénale, souvent pointée du doigt, le procureur tentait de se faire pédagogue en expliquant «l’ordonnance de 1945» qui, en matière de délinquance des mineurs, fait primer le préventif sur le répressif. Le problème, à Mayotte, est le «manque cruel» de foyers de placements ou de familles d’accueil pour «recueillir ces mineurs et leur donner un cadre éducatif qu’ils n’ont pas dans leur famille.»
La déficience du Conseil général mais aussi des communes dans ce domaine s’impose comme une évidence alors que depuis 1982, «l’aide sociale à l’enfance» fait partie de leur responsabilité. «Créer ce genre de service ne se fait pas en un jour», expliquait le préfet. Pour autant, «le dispositif doit monter en puissance mais pas à échéance de 40 ans !» indiquait-il.
Le procureur en a profité pour indiquer qu’une réécriture de cette ordonnance de 1945 est programmée par le ministère de la justice pour l’adapter à la délinquance de 2014.
Dernier point notable, le nombre d’actes de violences contre les personnes (physiques ou verbales) qui poursuit lui aussi sa progression pour atteindre 1.604 cas recensés en 2013. «Le recours des Mahorais à la plainte est plus systématique, notait le préfet, y compris pour des altercations verbales.»
Pas d’amalgame entre immigration et délinquance
Cette délinquance, en particulier à Mamoudzou, se répartit sur l’ensemble de la ville, même si la concentration des établissements commerciaux à Kaweni et Zone Nel explique l’importance qu’occupe ce quartier dans les chiffres. De la même façon, les services de police ne sont pas parvenus à identifier des moments privilégiés de la journée ou de la nuit pendant lesquels ces actes sont commis.
Quant à l’amalgame souvent réalisé entre délinquance et immigration, préfet et procureur ont tenu, à nouveau, à indiquer que «nous n’importons pas de délinquants par conteneurs». «L’immense majorité des mineurs impliqués ont une carte d’identité française». «L’intégration fait la fierté de notre pays dans le cadre d’un contrat républicain global, concluait le préfet. Mayotte ne doit pas échapper à cette logique d’intégration et de vie en commun.»
Des poursuites contre les parents
Des mesures de préventions déjà installées plus ou moins récemment vont être reconduites, comme des opérations “voisins vigilants” mais aussi des mesures de responsabilisation des parents. Le procureur indiquait également que la réponse judiciaire pourrait être renforcée. Concernant les vols et cambriolages, les recéleurs pourraient être poursuivis : être en possession d’objets volés fait encourir les mêmes peines que celles auxquelles s’exposent les cambrioleurs. Quant à la responsabilité des parents, le procureur «n’exclut pas, loin de là, d’engager des poursuites pénales» à l’encontre d’adultes qui auraient notoirement renoncé à s’occuper de leurs enfants mineurs.
RR
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