L’aventure a commencé pour elle au hasard d’une conversation. Elisabeth Chowanski est à Mayotte pour travailler sur le projet de Revitalisation et de Renforcement de la centralité urbaine à Dembéni. Recrutée par le maire Jouwaou Ambdi Hamada comme Cheffe de projet, elle a été particulièrement bien accueillie dans la commune, au point d’intégrer rapidement un Club de paroles qui se tient tous les vendredis soirs : « Au cours d’un échange, les habitants m’ont avertie ‘profite bien des fruits de saison, parce qu’après, il n’y aura plus rien !’ »
Elle pense immédiatement à un pressoir à fruits, « ça marche bien en métropole, il y en d’ailleurs un à Coconi, mais il est réservé à la formation agricole. » Elle veut le rendre accessible à toute la population. « Chaque habitant pourra venir avec ses fruits, et repartir avec des bouteilles de jus pasteurisé, qui élimine les bactéries et permet de mieux se conserver. »
Elle cherche, et opte pour le même fournisseur Alsacien qu’à Coconi, « plus pratique pour les pièces de rechange. »
Santé publique et environnement
Dans le cadre des ses missions, elle a déjà travaillé sur la problématique des déchets, « et de l’élimination des canettes. D’autre part, il faut contribuer à la santé publique en contrant la consommation pharaonique de soda ici. C’est une autre des vertus de ce projet de jus de fruits frais, qui en plus, ne sont pas traités aux pesticides à Mayotte, contrairement aux légumes. »
Pour manier ce pressoir pédagogique, géré par la mairie dans le cadre de la Politique de la ville, les habitants vont donc devoir se former, notamment au dénoyauteur. « Ils recevront aussi des informations sur le coût de gestion des canettes, et l’impact sur la santé publique, par rapport aux jus de fruits frais. » Le pressoir peut produire 200 litre par heure, « chaque consommateur devra verser une petite participation financière qui permettra d’entretenir la machine et d’assurer la stérilisation des bouteilles. »
La production fruitière de l’île serait de l’ordre de 50.000 tonnes chaque année dans notre département, pour un chiffre d’affaires estimé à 11 millions d’euros.
Prix remis par Stéphane Le Foll
La démocratie est participative à Dembéni puisque tout le monde a travaillé sur ce projet, « entre 10 et 30 personnes sont présentes aux ateliers de concertation publique les samedis. » Ce qui entre dans un de ses objectifs, “Si les équipements structurants se mettent progressivement en place, les équipements dits de proximité sont appelés à jouer un rôle considérable dans la mosaïque de réappropriation des valeurs des habitants.”
Nous avons réalisé cette interview quelques jours après la réception d’un courrier lui indiquant que le projet de Dembéni était lauréat de l’appel à projet national du Programme National de l’Alimentation, « c’est la première fois qu’un projet Mahorais est retenu depuis le lancement de ce concours en 2014 ! ».
Elisabeth Chowanski et Jouwaou Ambdi Hamada s’envolaient le lendemain pour Paris, plus exactement vers le Salon de l’Agriculture, très prisé de nos politiques en cette année électorale. Le maire de Dembéni y a reçu des mains de Stéphane Le Foll, Ministre de l’Agriculture, le prix de 40.000 euros, qui couvre presque le financement du pressoir pédagogique, de 50.000 euros. « C’est une formidable occasion de mettre en avant nos potentialités, nos richesses et de donner une image positive de notre île », soulignait-elle.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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