La Politique de la ville vise à réduire les écarts de développement au sein des villes, et veut « restaurer l’égalité républicaine dans les quartiers défavorisés et améliorer les conditions de vie de leurs habitants ». Aujourd’hui, 5,5 millions de personnes vivent dans les 1 500 quartiers les plus pauvres, ciblés par la géographie prioritaire en France.
A Mayotte, le développement économique est balbutiant, replaçant les centres bourg dans un contexte que la métropole a connu plus de 50 ans en arrière. Et les périphéries dans une lutte contre l’occupation illégale et l’habitat informel. Les dispositifs d’aide de droit commun n’ont donc pas encore produits leurs effets, faute pour certains maires de les avoir mis en place, et la Politique de la Ville s’avère parfois être la ressource de 1er plan.
C’est le cas de la Politique de réussite Educative (PRE). Relation Ecole-famille, lutte contre l’illettrisme… Beaucoup est encore à faire, ce qui implique des budgets bien supérieur que ce qui se fait en métropole où l’accompagnement est à la marge. Depuis le portage de la Politique éducative par le collège de M’gombani en 2007, de nombreux élèves ont été suivis.
« Vous voulez prendre en charge tous les élèves ?! »
« En 2015, ils étaient 345 sur les 2.500 élèves à M’gombani », explique à la Secrétaire d’Etat le responsable de la Politique Educative à la maire de Mamoudzou, « et 269 en 2016. En grande majorité entre 7 et 11 ans ». Mais s’il estime le prévisionnel à 450 pour 2017, il indique un potentiel d’accompagnés à 9.000. « C’est à dire tous les élèves ? ! » s’exclamait la ministre, interloquée. Il confirmait en effet, que selon les critères métropolitains d’accompagnement de la Politique de la ville, 90% des élèves seraient couverts par le dispositif.
Hélène Geoffroy en concluait que la Politique de la Ville se substituait aux dispositifs de droit commun. Ce qui demande un investissement sans commune mesure avec ce qui se pratique en métropole.
Or, rien n’est acquis. La priorité auparavant donnée aux actions d’équipement au détriment des actions à caractère social, avait été dénoncée, et plusieurs dispositifs avaient été mis en place, comme les adultes relai, ou les médiateurs de proximité portés par l’association PEPS.
60 médiateurs en sursis
Ce dispositif “clés en main”, entièrement financé par l’Etat a permis depuis 2 ans aux médiateurs de se déployer efficacement aux abords des établissements scolaires et dans les quartiers afin de faire face de manière préventive aux situations tendues.
« Nous réglons les petits conflits, et souvent les jeunes les plus bagarreurs s’éloignent quand nous sommes là » : les 4 PEPS affectés au collège de M’gombani sur la soixantaine employés par la mairie de Mamoudzou, sont allés au devant d’Hélène Geoffroy à M’gombani. Un dispositif qui s’éteint en juin cette année. « Nous cherchons un moyen d’intégrer en emploi dans le droit commun ces jeunes qui ont été formés », explique Cédric Lelaidier, président de l’association PEPS Mayotte, qui se disait fataliste après les passages des différents ministres. « Je ne promets jamais, mais je vais me pencher sur votre cas », assurait la secrétaire d’Etat, qui va devoir laisser sa place dans deux mois.
Un rapport d’une Délégation interministérielle à la Politique de la Ville daté de 1999 se concluait ainsi : « Les “exclus” à Mayotte représentent actuellement près de la moitié de la population : les actions de la politique de la ville ne s’adressent donc pas à une minorité mais à une proportion de la population autrement plus importante que celle concernée par les méthodes métropolitaines. Une particularité trop souvent occultée et qui pourrait bien conduire, si elle n’est pas prise en considération, à une véritable explosion sociale. »
Prés de 20 ans plus tard, on pourrait faire le même constat, à ceci prés que des outils, comme les médiateurs, ont été mis en place, qu’il ne faut pas supprimer, mais renforcer.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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