«Une grande erreur de méthode a été faite, celle de penser une politique ultramarine sans les Outre-mer». Emmanuel Macron a posé sans détour son constat sur la situation dans les territoires ultramarins avant de préciser son projet et sa méthode pour changer les choses. Ce weekend, il rencontrait une centaine d’associations ultramarines à Paris et s’est prêté au jeu des questions-réponses pendant un peu plus d’une heure pour mieux critiquer les politiques conduites.
«Il y a une dizaine d’année, j’étais déjà fonctionnaire à Bercy, on faisait déjà des rapports sur l’octroi de mer et sur tous les sujets dont on peut se parler aujourd’hui. On peut décider de continuer à faire pareil, ça continuera à exploser, aujourd’hui en Guyane, demain en Guadeloupe ou à Mayotte. Si on ne veut pas voir la réalité de l’urgence et des défis, on ne pourra pas se relever», a-t-il affirmé.
Pas question pour autant de «dérouler le tapis rouge» avec de «grandes promesses». Il a voulu marteler ses «engagements de programme». Le candidat a tenu également à différencier les territoires les uns des autres: «Je n’ai pas une approche classique des questions ultramarines. L’Outre-mer n’est pas un grand tout, ce n’est pas vrai. Il suffit de voir les défis migratoires et sécuritaires qui existent en Guyane et à Mayotte, ils n’existent pas de la même façon en Guadeloupe ou en Martinique. On doit avoir une réponse très différenciée (…) Les contraintes ne sont pas les mêmes, les défis ne sont pas les mêmes».
Une urgence pour les 12 premiers mois
Il a posé sa méthode pour mettre en œuvre une politique «avec une obligation de résultats dès la première année». Il propose d’instituer «des assises qui définiront les politiques à mettre en place d’urgence sur les 12 premiers mois du quinquennat». Elles seront pilotées par des délégués rattachés au Président de la République dans chaque territoire et auront 3 mois pour «dresser une feuille de route».
Passés ces 12 premiers mois, une politique sera établie sur le plus long terme, avec un référent Outre-mer dans chaque ministère.
«On le voit actuellement, vouloir repousser les échéances, c’est voué à l’échec. En Guyane, la réponse à apporter est plus coûteuse aujourd’hui que si on l’avait fait il y a 3 ans, dans un contexte plus apaisé».
Une politique de développement
En matière économique, le candidat souhaite développer une approche par filière, avec des adaptations réglementaires, législatives voire constitutionnelles. L’agriculture devrait bénéficier d’une part de son «programme d’investissement national». «On a besoin de négocier avec Bruxelles pour les filières critiques», a-t-il indiqué, comme pour la pêche: «Pour les RUP, on peut négocier (avec l’Europe) des conditions à part qui n’ont rien à voir avec les problématiques continentales», a-t-il affirmé.
«En terme de transports, d’énergie, on a besoin de redonner aux collectivités des marges de manœuvres mais aussi des responsabilités».
Le candidat veut aussi continuer à s’attaquer à la vie chère pour «s’assurer d’une juste concurrence et d’un juste niveau de prix». La DGCCRF (fraude et concurrence) aura un rôle «renforcé». «On a des oligopoles qui entretiennent des prix hauts au détriment des populations», a-t-il affirmé. Il souhaite aussi développer l’entreprenariat avec, pour tous les jeunes à 18 ans, un numéro de K-bis gratuit et automatique, facilement déblocable, «un élément de simplification très fort».
Des recrutements pour la sécurité
Sur l’éducation, le candidat revendique «une politique de formation plus adaptée aux territoires ultramarins», avec dans les zones REP et REP+ à 12 élèves par classe en CP et CE1 et «plus d’autonomie éducative» pour faire face aux réalités de terrain.
En matière de sécurité, il a rappelé sa volonté d’augmenter de 10.000 fonctionnaires, les forces de police et de gendarmerie, avec la mise en place d’une police de proximité.
«Ce n’est pas une stratégie de clientélisme que je souhaite mettre en œuvre, on l’a trop fait. Je ne veux pas porter un discours de compassion (…) mais un discours de développement économique et d’émancipation», a-t-il conclu.
Enfin, répondant à une question de Jean-Pierre Frédéric, actuellement commissaire de police en métropole et ancien directeur de cabinet du préfet de Mayotte, il s’est déclaré favorable à ce que les nominations se fassent à partir de «listes d’aptitude (publiques) qui prennent en compte la diversité et la parité». Car il a rappelé que si les personnes issues des Outre-mer ne se sentent pas suffisamment promues et valorisées, c’est aussi le cas des femmes encore trop absentes des postes à responsabilité.
A moins de deux semaines du 1er tour de la présidentielle, Emanuel Macron s’est donc montré «volontariste» face à un électorat ultramarin qui est loin d’être anecdotique à l’échelle nationale.
RR
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