« Les pharmaciens libéraux soutiennent avec force le mouvement des médecins. » Voilà l’état d’esprit, très clair, de la délégation mahoraise de l’ordre des pharmaciens. La grève des médecins libéraux, suspendue depuis ce matin, semble servir de porte-voix à beaucoup de professionnels de santé.
« Nous sommes tous confrontés à la désorganisation du système de santé à Mayotte, explique Roseline Nicolas, pharmacienne à Mamoudzou. Même si certaines de nos problématiques ne sont pas les mêmes, nous travaillons aujourd’hui dans un environnement qui n’est plus tenable. »
C’est l’action de la CSSM (Caisse de sécurité sociale de Mayotte) sur laquelle se focalise leur mécontentement. « L’absence de réactivité de la CSSM nous place souvent dans des situations délicates », explique Philippe Amardeilh, le président de l’ordre des pharmaciens à Mayotte. Absence d’interlocuteurs ou dossiers qui se perdent, les récriminations ne manquent pas. Et le temps passé à gérer les dossiers administratifs semble prendre une place toujours plus importante.
Mais c’est surtout la gestion des attestations de droits à la sécurité sociale qui plonge les professionnels dans des situations complexes. Ces documents ne sont délivrés que pour six mois et leur renouvellement entraîne bien souvent des délais qui ne sont pas toujours compatibles avec les obligations médicales.
« On est dans une situation d’urgence médicale permanente, dénonce Roseline Nicolas. Si le patient se présente sans que je sache s’il a des droits, qu’est-ce que je fais ? Bien sûr, j’avance les médicaments en espérant être remboursée, un jour, quand les démarches aboutissent. Je ne peux pas, en tant que professionnelle, interrompre un traitement en cours ou refuser l’accès aux médicaments. On a l’impression de faire de plus en plus de l’humanitaire. Nous n’oublions jamais qu’en face de nous, nous avons des patients dont nous avons la responsabilité mais aujourd’hui, nous sommes des entreprises et des professionnels fragilisés. »
Un mouvement de coordination se dessine : pharmaciens, médecins, dentistes, spécialistes, infirmiers, sages-femmes… tous, pourraient s’associer pour dénoncer cette désorganisation et tous les éléments bloquants qui les détournent de leurs missions premières. « On bosse souvent plus de 10 heures par jour et on passe nos soirées à préparer des actions pour faire bouger les choses. On veut avancer !» s’exclame Roseline Nicolas.
L’issu du mouvement des médecins sera déterminant. « Il est évident que nous attendons une amélioration de la condition des médecins, explique Philippe Amardeilh. Ils sont les moteurs pour des changements à Mayotte. S’il ne se passe rien pour eux, le risque est qu’il n’y ait aucune évolution du système de santé. »
Un système pourtant à bout de souffle. Comme les professionnels de santé.
RR
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