Ahmed n’a que 27 ans et déjà un parcours semé d’embûches. Papa d’une petite fille, scolarisée et confiée à une nounou, le jeune homme, SDF, a un gros problème de stupéfiants. Depuis tout jeune, l’alcool, la chimique et le bangué sont son quotidien. Il a d’ailleurs déjà été condamné à plusieurs reprises, notamment en 2011 et 2015 pour des faits liés à la drogue, et à des violences.
Ce n’est pourtant “pas un violent”, assure son avocate, mais sous emprise, il ne contrôle plus rien. Et c’est ce qui lui est arrivé dimanche, vers une heure du matin. Une patrouille de police circule route de Vahibé suite à un cambriolage quand les fonctionnaires voient l’homme marcher au milieu de la chaussée. La voiture s’arrête à la hauteur du piéton, et un des policiers lui demande de se rabattre sur le trottoir. Mais le jeune, drogué, s’enerve et s’approche à deux reprises des fonctionnaires, qui finissent par le repousser en usant d’une bombe lacrymogène. Sans grand effet, puisque Ahmed saisit alors un objet au sol, et le jette sur le Duster, brisant la vitre arrière, heureusement sans blesser de policier. Les agents sortent de leur véhicule et finissent par maîtriser le garçon avant de l’emmener. Non sans mal, en témoigne le bandage au poignet que le prévenu arbore à la barre lors de sa comparution immédiate pour rébellion et dégradation de la voiture de police.
La chimique “on en trouve partout”
Interrogé sur ce déroulé des faits, le jeune homme acquiesce. “Je ne me souviens pas des faits, mais ce que vous dîtes est juste car la dame de la police m’a dit la même chose.” C’est comme ça quand il prend de la chimique. Ahmed ne se souvient de rien. Penaud, il présente ses excuses au policier auquel il a asséné un coup de pied au commissariat. Ca non plus il ne s’en souvient pas. Il se souvient par contre où il achète sa drogue. “On en trouve partout, même devant le commissariat”. Il se réjouit en outre de sa sobriété forcée en garde à vue. “Je me sens tout blanc dedans”.
Face aux réquisitions du procureur qui demande de la prison ferme pour obliger le prévenu à se sevrer, l’avocate s’insurge. “On ne se sevre pas en prison, on y trouve de la chimique, comme devant le commissariat. Et le Spip (service d’insertion et de probation) a deux ans de retard sur les dossiers, accuse-t-elle.”
En l’absence d’alternative pour aider le toxicomane à sortir de ce cercle vicieux, le tribunal l’a envoyé à Majicavo pour 4 mois. Il devra y engager des soins. S’il n’est pas suivi par un médecin à sa sortie de prison, 20 autres mois de détention l’attendront. De quoi se sentir tout blanc encore longtemps, à condition de ne pas succomber à la tentation… en prison.
Yohann DELEU
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