Lorsqu’elle récupère en 2015, à la demande du conseil départemental, l’autorité de gestion des fonds européens, la préfecture de Mayotte se trouve fort dépourvue. Sans détenir d’agrément de gestion, commençait pour elle une « période transitoire », ainsi que la nomme pudiquement Pierre Papadopoulos, le Secrétaire général aux Affaires régionales de la préfecture (SGAR).
Une période qui aura vu 4 SGAR aux commandes, de 2015 à 2017 : Philippe Laycuras, Alain Faudon, Jean Almazan et Pierre Papadopoulos… et encore, avec des périodes d’intérim entretemps. Une valse que n’aime pas la mise en musique de la chevauchée fantastique des fonds européens, qui préfère une équipe et des interlocuteurs stables. Pendant deux ans, le Pôle Affaires européennes a monté sa formation cahin-caha, « l’effectif est complet depuis un an environ », déclare Pierre Papadopoulos.
La commission européenne s’est déplacée deux fois par an pour constater l’avancement, et la capacité pour l’équipe de gérer de manière autonome l’enveloppe de 378,5 millions d’euros. La Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC) l’a validé le 17 juillet 2017, et le 3 août 2017, le premier ministre Edouard Philippe a officiellement désigné la préfecture de Mayotte comme autorité de gestion.
Mieux que les Antilles
Jusqu’à présent, la préfecture ne pouvait officiellement qu’étudier les dossiers, « désormais l’agrément nous permet de les mettre en paiement. »
Avec l’adjointe du SGAR arrivée il y a une semaine, l’équipe du Pôle des affaires européennes, est complète, « 15 personnes formées ou en cours de formation », et un contrôleur de la CICC est présent.
Peu de fonds ont été consommés, « l’essentiel des projets étant arrivés en 2016 et 2017 », souligne le SGAR, à la suite des appels du pied de ses prédécesseurs. Par contre, en engagements, c’est à dire en démarrage de projets, nous serions pas mal classés. Le fonds structurel de développement FEDER l’était à hauteur de 36% en mars 2017, « donc 150.000 millions d’euros », essentiellement sur les amphidromes (en instruction de paiement) et l’hôpital de Petite Terre. On y trouve aussi les projets du Syndicat des Eaux et des privés (investissements touristiques, bateaux, hôtellerie, photovoltaïque). « La Guadeloupe est à 12%, et la Martinique à 25% », rapporte Pierre Papadopoulos.
L’expertise incontournable
Les acteurs économiques sont notamment appelés à venir déposer leurs projets : « Ils doivent les fignoler et les professionnaliser grâce aux acteurs compétents de leurs secteurs, je pense aux chambres consulaires notamment. Nous pouvons ensuite les accompagner financièrement sur une assistance technique. »
Moins de satisfaction en revanche du côté du fonds social européen, le FSE, « nous sommes moins bons, avec 21% en programmation ». Et alors qu’en matière de social, beaucoup est encore à faire à Mayotte. L’IEJ, l’Initiative pour l’Emploi des Jeunes, a très bien marché en revanche, « on est à plus de 100% », consommé par des structures qui ont des appuis nationaux, et donc des expertises en matière de consommation de fonds européens, comme le BSMA, Apprentis d’Auteuil, ou Tama (groupe SOS). L’IEJ va être fusionné avec le FSE.
« Open bar » à la pref
Sur ce fonds, nous n’en étions qu’à 1% au début de l’année, glisse le SGAR, « c’est pourquoi j’ai décidé de l’ouvrir, c’est ‘open bar’, désormais ». Pierre Papadopoulos ne va pas délivrer des bières à tout-va, mais des validations, du moins l’espère-t-il : « Il n’y aura plus d’appel à projets, plus de critères imposés. C’est une simplification colossale ! » Il envisage un schéma facilitateur équivalent pour le FEDER, mais qui demande davantage de précautions. Et travaille aussi avec l’AFD, « pour mettre en place une ligne de trésorerie sur des dossiers que nous aurions validés. »
Sur le FEADER agricole, nous sommes au même niveau de programmation que la Guadeloupe, indique-t-il, 32%, mais à zéro quasiment pointé pour le FEAMP, que vont sauver les Affaires maritimes avec le projet d’implantation de 7 pontons de pêche autour de l’île, « pour accompagner notamment la petite pêche. »
Pour ne pas se trouver de nouveau au dépourvu quand la nouvelle programmation sera venue, la passation de relais doit s’organiser vers le conseil départemental qui va reprendre l’autorité de gestion dès 2021. « Le conseil départemental cogère avec nous le comité de programmation, en sélectionnant avec nous de manière très active, les dossiers à retenir. » Le comité se réunit une fois par mois.
Avec cet agrément, et à écouter Pierre Papadopoulos, en janvier la consommation devrait avoir fait un bond, « nous avons un gros boulot maintenant, il va falloir payer ! »
Anne Perzo-Lafond
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