Kata Kaona est un projet à moitié abouti, spécialisé dans l’artisanat et le maraichage. Répondant au cadre de l’Economie sociale et solidaire, elle avance une gouvernance horizontale, participative et inclusive pour ses 60 adhérents. 4 jeunes travaillent sur l’artisanat à temps plein, et la structure a déjà participé à 3 marchés paysans. Un modèle économique viable, selon ses représentants, notamment grâce à l’accompagnement de la Chambre de commerce et d’Industrie.
Mais qui bloque pour assurer son implantation définitive, sur un problème de foncier. « Nous avons repéré à Kwalé un terrain à fort potentiel, mais son propriétaire est en liquidation judiciaire, et on nous annonce une procédure complexe. » Une sorte de destruction créatrice à la Schumpeter, qui appelle à tirer des leçons pour stopper le cycle et rester optimiste.
Du jus des mamans à la Régie territoriale
La réussite au nord s’appelle Maécha Espoir. Un engrenage de bonnes idées qui commence par une Régie de Territoire dont nous avait parlée le DGS de la commune. Il s’agit d’un rassemblement d’habitants, de femmes comme souvent à Mayotte, les mamans d’Acoua, qui se sont regroupées pour produire du jus de fruit.
Les habitants intègrent cette Régie à hauteur de 70%, et élargissent à la transformation de produits agricoles. « Une évolution possible grâce au Centre de ressource et à l’intégration du Dispositif Local d’Accompagnement qui nous a permis de nous muscler en terme de comptabilité et de gestion administrative et commerciale. Nous affichons une traçabilité de la production à la commercialisation », explique Toibib Toumbou représentant de la régie Territoriale d’Acoua, qui rebondit là sur l’idée de la Régie de quartier d’un membre de la famille…
Les jus de fruit s’alignent sur les étagères de la réputée boutique solidaire à côté de la mosquée du vendredi à Mtsapéré, « nous avons comme projet de présenter de la farine de manioc ».
Une régie qui semble décliner à la perfection les expériences mises en avant par le film « Demain », puisqu’on évoque une « banque végétale » : « On prend des boutures que l’on plante chez les habitants, et les salariés de la Régie les transplantent dans les espaces publics ». Les bénéfices vont à la formation des demandeurs d’emploi et le financement de soutien scolaire. Une ESS déclinée à la perfection.
La fable du petit douka et de la grande distribution
Le 3ème projet est né du conflit social sur la « vie chère », et d’un constat fait par l’Observatoire des prix, des marges et des revenus : « Il y a un très grand déséquilibre entre les deux leaders de la grande distribution et le reste des commerçants à Mayotte », rapporte qui accompagne « MACODIS, douka Lakweli » (le vrai douka). Nous avions rapporté cette initiative qui a abouti à la création d’une SA, dont chaque adhérent, ils sont 13, possède une voix, et dont les bénéfices sont réinvestis dans des entrepôts de stockage pour les commerçants.
Ces petites épiceries appelés doukas à Mayotte, se fournissaient il y a peu, auprès de la grande distribution, et donc proposaient des produits plus chers. Ils sont parvenus à s’entendre sur le mode de la coopérative et importent par containers leur marchandise désormais. « L’objectif est de rendre les petits aussi grands que les deux grands de la place », évoquait …….. La réaction du groupe Bourbon-Jumbo ne s’était pas faite attendre puisqu’il avait créé les Douka Bé.
Le représentant de Macodis invitait le chaland : « Peu de gens de cette assemblée viennent dans nos doukas. Ils ne sont pas moins fournis que les gros supermarchés et nous sommes moins chers ! »
Ce n’est pas encore la vie en rose pour l’économie sociale et solidaire, mais la démarche participative de ses initiateurs, par rapport à l’économie classique mérite d’être encouragée. Le risque serait de l’épauler financièrement, et de perdre toute visibilité sur sa rentabilité. Un équilibre encore à trouver pourrait-on conclure à la fin de cette 1ère conférence de l’ESS, inaugurant le mois qui lui est consacré.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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